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  • Mum

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    … Mais non, Kevin darling, je ne prétends pas que ces jeux te fassent du mal, je ne critique pas non plus ton père qui passe des nuits avec toi sur le front irakien, vous êtes  tous deux des Américains  et Dieu est votre copilote, mais de grâce, quand tu reviens à la maison, voudrais-tu ne pas regarder ta maman avec ce regard de sniper… 

    Image: Philip Seelen  

  • En face des trous

    Panopticon6888.jpg…Il est certain que ce serait tromper notre peuple que de ne pas reconnaître la gravité de la situation, qui nous oblige à ouvrir les yeux tout grands de sorte à considérer les choses telles qu’elles sont et non telles qu’on voudrait qu’elles fussent en se voilant la face …

    Image : Philip Seelen

  • Dilemme d’époque

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    Bon mais c’est pas tout ça, et qu’est-ce que tu vas faire d’eux pendant que tu seras dans le magasin climatisé, t’es quand même adulte et responsable, donc en tant qu’adulte t’as tes fantasmes mais en tant que responsable d’un moins de dix-huit ans tu peux pas rester trop longtemps dans le magasin climatisé, avec tous ces vicieux qui rodent dans le quartier…
    Image : Philip Seelen

  • Le crime de Soues

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    …On a parlé du Tueur de Tarbes, mais là encore on nous offense, une fois de plus on nous snobe malgré la politique de reconnaissance que mène notre maire Lescout, or la victime était clairement une Souessoise, elle avait d’ailleurs participé aux Tchatches à Soues sur Dial65 la veille de l’agression, mais tu vois les gens de Paris faire la différence - moi je te dis que si demain le tueur de Tarbes flingue Carla Bruni à Soues, les gens de Paris vont parler du Bourreau de Lourdes pour faire bon poids…
    Image : Philip Seelen

  • Mister Facebook

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    …Mais comment ça, vous êtes Mark Zuckerberg ? LE Mark Zuckerberg, non mais j’y crois pas, vous vous rendez compte, si ma femme savait avec qui je me trouve en train de parler ce matin (sottovoce : toi je t’ai à l’œil avec ton air de voyeur satisfait), ah mais dites, M’sieur, vous accepteriez de me dédicacer, pour elle,  un portrait de vous en train d’empocher votre premier million ?...

    Image : Philip Seelen

  • Paradise now

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    …Là c’est vraiment le Top Dream, no problem, tu t’allonges exactement au même rang et dans la même file que t’as parqué et t’as toujours ce bon fumet de miel de fioul qui roule sous le ciel et te grise tandis que tu déstresses, et le plus cool c’est qu’on soit là tant de gens à se dire que le Seigneur nous aime vraiment pour nous donner tout ça…
    Image : Philip Seelen…

  • Aux oreilles d'Olympe

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    Notules et notuscules sur les arrivages quotidiens de La Désirade, tous genres confondus…

    LireLodoli.jpgMarco Lodoli. Îles ; guide vagabond de Rome. Traduit de l’italien par Louise Boudonnat. La Fosse aux ours, 218p.

    En préambule, Louis Boudonnat situe assez exactement le type et le ton de ce recueil de chroniques, initialement parues dans les pages romaines de La Repubblica : « La Rome vagabonde de Lodoli n’appartient à aucun guide touristique : c’est une ville d’îlots de beauté et de poésie qui émergent d’un dimanche pluvieux, ou d’un après-midi ensoleillé, mais que seul un œil clairvoyant est capable de saisir. C’est une place immobile redevenue une peinture métaphysique ; une statue nichée dans une église hors des sentiers battus ; un bar où la nuit se transforme en odyssée de solitudes, d’amours et d’existences fortuites ».
    Ledit bar est à visiter, plus précisément, à la toute fin de la nuit, Piazza Venezia, à l’enseigne du Castellino. Et pour des jours à musarder, ou simplement à lire ce livre ailleurs que dans la Ville éternelle, les cent curiosités citées (telle l’église lilliputienne de Largo dei Librari, jouxtant un vieux resto à terrasse où se déguste le filet de morue, à trois pas du Campo de Fiori…) constituent un parcours extrêmement plaisant, agrémenté de commentaires épatants de l’auteur, d’une belle écriture fluide et fantaisiste. En se pointant par exemple place Saint Eustache, juste à côté du Panthéon, en levant les yeux, on apercevra une tête de cerf surmontée d’une croix, dont l’auteur raconte l’histoire intéressante avant de conclure sur la triste fin du saint, cuit tout vif dans un taureau d’airain chauffé à blanc. Dire enfin qu’il y a quelque chose d’un Ramon Gomez de La Serna dans les observations et la poésie de Marco Lodoli…

    Nota bene : bon exercice de lecture pour l’amateur de langue italienne : Isole ; guida vagabonda di Roma, Einaudi.

    LireMcCarthy.jpgCormac Mc Carthy. Un enfant de Dieu. Traduit de l’anglais par Guillemette Bellesteste. Actes sud,1992 ; Points Seuil- roman noir, 2008.
    On a beaucoup parlé de Cormac Mc Carthy à propos de ses deux derniers romans, Non, ce pays n’est pas pour le vieil homme, mémorable plongée dans les ténèbres du Mal contemporain, et La Route, admirable fresque apocalyptique, mais Un Enfant de Dieu, datant de 1973, est resté assez méconnu, en tout cas moins en vue que la fameuse Trilogie des confins, Le gardien du verger ou Méridien de sang, alors qu’il relève sans doute de la vision la plus radicale de l’écrivain, du côté du Faulkner du Bruit et la fureur ou de Tandis que j’agonise. Le protagoniste, du nom de Lester, genre innocent monstrueux, marqué en son enfance par le suicide de son père survenu après la disparition de la mère en galante compagnie, préfigure le serial killer dont la morne répétition, en littérature ou au cinéma, n’aura que très rarement l’aura symbolique, voire théologique, de ce muet avatar de l’ange exterminateur. L’écriture de Cormac McCarthy touche ici à l’os de la réalité, avec la même âpre grâce que dans La Route ou Méridien de sang, une phrase après l’autre, un os après l’autre, un os et un clou, un pas et un coup. Relatés par un narrateur neutre rappelant l'implacable murmure d’un choryphée, le roman vibre d’humanité fruste « autour » du trou noir que constitue la présence-absence de l’enfant appliquant à sa façon la « justice divine ». Bref, c’est du haut lyrisme puritain et ça ne se lit pas sur la plage…

    LirePerry.jpgJacques Perry-Salkow. Anagrammes ; pour sourire ou rêver. Le Seuil, 176p.
    Le jeu de l’anagramme fut très prisé dans les cours (et les arrière-cours) aux XVIe et XVIIe siècles, qui consiste à mélanger et intervertir les lettres d’un mot ou d’une expression pour en tirer un autre mot ou une nouvelle expression. Par exemple : Arielle Dombasle – À l’ombre de l’asile. S’il n’est tenu compte ni des accents ni des expressions, le jeu n’en est pas moins délicat, voire ardu. Est-il bien sérieux de s’y livrer alors que le prolétaire se tue à l’usine tant que la ménagère en cuisine ? Cette éthique question ne semble pas avoir troublé Jacques Perry-Salkow qui, après Le Pékinois, en 2007, remet ça pour l’agrément de la mère ou foyer et de l’ouvrier. La France d’en bas goûtera sans doute, ainsi: Jean-Luc Delarue – Le jeune Dracula, ou mieux encore : Jean-pierre Foucault – Purée, la France jouit ! Ou encore : Daniela Lumbroso – Roulis à l’abdomen, et Miou-Miou – Mmm…oui…oui ! Quant à la France qui se dit d’en haut, elle appréciera non moins : La princesse Stéphanie – Hantée par les piscines, ou La madeleine de Proust – Don réel au temps idéal. La fantaisie est au rendez-vous avec La Fontaine gorillé : Le lièvre et la tortue – Le lévrier et le tatou, et le lyrisme embué d’Alain-Fournier : Le Grand Meaulnes – Le sang d’une larme. Enfin, le dernier chapitre consacré aux secreta de la Bible (on sait que la Kabbale fit grand usage de l'anagramme) n’est pas des moindres, où « Je suis le Seigneur ton Dieu » devient « Je souris et déguise l’ennui » et, top de l’esprit évaangélique, où «Aimez-vous les uns autres » donne « Tous, sans mesure, suivez le la »…

  • Les mots à la source

    Notes matinales 

    Hervé Guibert post mortem et autres vivants.

    On a besoin le matin de phrases limpides, on se lave à l’eau des mots, on boit à la source.
    On lit par exemple : «Le samedi midi, c’est le jour du bifteck de cheval. Louise le mange cru, non haché mas recouvert d’une nappe de sucre en poudre ».
    Ou bien on lit : «L’auteur revoyait dans une succession d’images presque arrêtées tout ce que son père lui avait apporté, au-delà des mots si rares, au-delà des gestes encore plus rares, ces attentions, cette tendresse informulée, ces soucis, ces espoirs pour l’avenir d’un fils, seul garçon de la famille ». Ou bien encore on lit : « Il cherche, une fois de plus, les mots du commencement, des mots, par exemple, capables de nommer ce qui fait le miracle du corps humain, son inexplicable animation, sitôt noué son dialogue muet avec les autres, le monde et lui-même – et aussi la fragilité de ce miracle ». Ou encore ceci tandis que le jour se lève sur les pentes givrées : «Donne à qui sait lire ton âme, fuis qui la déchire, car tu n’as pas le temps ».
    Tous les dimanches, Hervé Guibert allait voir Suzanne et Louise, deux vieilles femmes, ses grand-tantes, qu’il photographiait et décrivait au milieu de leurs objets, deux vieilles petites filles qui ne se parlaient guère qu’en sa présence, et son écriture toute unie et pure raconte le Carmel de Louise et les jambes de Suzanne, les cheveux très longs de Louise jouant à se mettre la muselière du chien Whiskey et le corps de Suzanne jouant à être morte avant de se livrer à la Faculté de médecine. Tous les jours Jean-Jacques Nuel revenait à sa table pour y sacrifier au Rite de l’écriture, tous les jours Cézanne revenait au corps du monde, tous ces matins Giovanna s’en va dans le froid du monde avec en elle peut-être une petite phrase bouleversante qui lui revient en douceur de cette page d’un livre entrouvert : « Donne à qui sait lire ton âme »…

    Hervé Guibert retrouvé ce matin, l’esprit d’Hervé que je retrouve au coin du feu, le corps d’Hervé libéré de sa torture, l’écriture sans rature d’Hervé Guibert décrit le Paradis de Louise : « Elle dit qu’elle ne l’imagine pas. Le corps, de toute façon, n’a plus d’existence, et elle me cite un passage de l’Evangile où un esprit naïf demande avec lequel de ses sept maris une femme qui s’est mariée sept fois entrera au Paradis». Et je lis du petit livre entrouvert de Hafid Aggoune: « Si les livres n’avaient pas été là, je serais mort dans cette forêt. Lire m’a sauvé la vie et le voyage a commencé. Les mots sont mon sang, mon fouet, mon feu ». Enfin je lis ces mots de Jean-Jacques Nuel : « Tout était à écrire. Un livre n’y suffirait pas ».

    Widoff29.JPGHervé Guibert, Suzanne et Louise. Roman-photo. Gallimard, 2005 ; Jean-Jacques Nuel, Le nom. A Contrario, 2005 ; Maurice Merleau-Ponty, L’œil et l’esprit. FolioEssais, 2005 ; Hafid Aggoune, Quelle nuit sommes-nous ?. Farrago, 2005.

  • Cosmos

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    …Quand je te dis que Marelle a le ballon, ce n’est pas vulgaire du tout, tu me piges mal, même si ça fait populo comme langage c’est pile ce que c’est : le ventre de Marelle est rond comme un ballon d’enfant, tiens j’ai envie de le palper et d’écouter ce qui se passe là-dedans en y collant la joue, enfin quoi Marelle a le ballon et celui-ci va rebondir dans la vie, on ne sait pas encore s’il ou elle s’appellera Dominique ou Dominique et s’il ou elle préférera le foot ou la roulette russe, c’est le mystère de la Création, mais bon c’est pas tout ça, maintenant raconte, accouche: es-tu d'accord avec Peter Sloterdijk quand il affirme que se reconnaître vivant dans les sphères équivaut à habiter le subtil commun ?...…
    Image : Philip Seelen

  • EXIT ou l'ultime secours

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    Exit, le droit de mourir, de Fernand Melgar
    Prix du meilleur documentaire suisse 2006


    Il n’y a qu’un pays au monde où, du fait d’un vide juridique, l’assistance à l'auto-délivrance des incurables est autorisée : la Suisse. Un film en a documenté le rituel impeccable, dont le dernier geste est l’administration d’une « potion ». La scène, filmée en temps réel, et aboutissant à une mort non moins réelle, est à la fois insoutenable et bouleversante, qui réunit une femme dont la vie est devenue un tel enfer de douleur physique qu’elle a décidé de mourir, sa plus proche amie et l’accompagnateur, le docteur Jérôme Sobel, médecin lausannois, juif pratiquant et président d’Exit Suisse. Ainsi s’achève Exit, ce film de Fernand Melgar dont la projection initiale au festival Visions du réel, au printemps 2005, a fait grande impression, et qui a été consacré par le Prix du meilleur documentaire suisse aux Journées de Soleure de janvier 2006.
    « Je n’ai pas voulu faire un film sur la mort », explique le réalisateur dont la propre existence a été marquée par la fin tragique d’un de ses enfants. « Ce que j’ai voulu montrer touche plutôt à la question de la dignité humaine : j’ai tenté de comprendre, et donc de faire comprendre, jusqu’à quel point la vie était supportable. Je sais que la question du suicide et de l’accompagnement de celui-ci pose d’énormes questions d’ordre éthique, religieux ou social, mais mon film n’est pas un reportage « objectif » qui expose les éléments d’un débat. Ce qui m’est apparu, lorsque j’ai approché les gens d’Exit, c’est que je devais parler surtout des accompagnateurs. Qui sont ces gens qui prennent sur eux d’aider un de leurs semblables à mourir ? Et comment ces bénévoles le vivent-ils ? Voilà ce que j’ai voulu documenter, à l’exclusion de toute propagande en faveur d’Exit. En temps que documentariste, j’essaie de montrer le monde tel qu’il est, sans multiplier les prises ni rien faire « jouer » à ceux que je filme, sans prendre parti non plus».
    C’est en effet un film vu « du dedans » qu’ Exit, qui nous fait découvrir un monde insoupçonné, un rien feutré, très Helvétie propre-en-ordre, presque effrayant si l’on ne sentait un immense respect humain chez ceux-là qui pourraient faire figure d’« anges de la mort ». Tout ce qui se passe là, du central téléphonique où est fait le « tri » des cas recevables ou non (comme cette dame qui aimerait qu’on la délivre de son cafard matinal…), aux entretiens préparatoires, des messages de désespoir qui s’accumulent sur le répondeur de l’accompagnatrice aux réunions des bénévoles faisant le bilan de leurs « cas » respectifs – tout est « histoire de vie », où l’on perçoit autant la bonne volonté que l’accablement, dont quelque petits mots d’humour soulageront ici et là le poids. Au milieu du film, deux accompagnatrices se retrouvent dans la nature apaisante, soudain envahie de brume fantomatique (absolument imprévue par le cinéaste, soit dit en passant), et tout est alors poétiquement suggéré de ce qui ne peut s’exprimer par des mots.
    Pour obtenir cette « intimité », qui fait oublier complètement la caméra de Fernand Melgar, celui-ci s’est littéralement immergé dans ce petit groupe de gens de bonne volonté, en évitant de filmer les scènes les plus pathétiques.
    « J’ai rencontré quantité de gens et découvert autant de situations, mais je ne voulais pas accumuler les anecdotes ni donner dans le voyeurisme ou la sensation. Ce qui m’a le plus frappé, c’est la dignité des uns et des autres, et notamment dans ce rituel presque sacré que les accompagnateurs s’efforcent de recréer. Lorsque le docteur Sobel, après avoir demandé plusieurs fois, avec la plus insistante prévenance, si Micheline était bien décidée à s’en aller, et qu’il lui dit, à la toute fin, « que la lumière vous conduise vers la paix », il me semble qu’il fait ce que ne font plus le pasteur ou le curé… »
    Si le film de Fernand Melgar se défend de toute prise de position, il n’en reste pas moins qu’ Exit a soulevé et soulèvera encore de nombreuses questions et débats, tant éthiques et religieux que juridiques.
    « J’aimerais que mon film fasse réfléchir à des questions qu’on évacue le plus souvent dans la société actuelle », conclut le réalisateur. « De même que les rites funéraires disparaissent, tout ce qui touche à la mort est escamoté ou esquivé, alors qu’elle fait partie de la vie.»

    Melgar22.jpgFernand Melgar. Exit-le droit de mourir, 1h.15. Disponible en DVD

  • Ceux qui sont à chiens et à chats

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    Celui qui dévore Mon chien Stupide de John Fante dans les allées de la Villa Borghese avant de découvrir que le titre original de ce livre est West of Roma / Celle qui rappelle le soir ses sept chats comme une paysanne ses poules / Ceux qui ont laissé leur Scottish a pedigree long comme ça sous la garde d’un ancien taulard dont l’animal apprécie les restes de la cuisine de première bourre / Celui qui aventure l’opinion selon laquelle les propriétaires de siamois sont des homos souvent refoulés / Celle qui prétend en femme d’esprit que tous les chiens ont une âme sauf le chien de fusil (ah,ah), et que tous les chats en sont dépourvus sauf ceux qu’a évoqués Baudelaire dans sont sonnet fameux / Ceux qui lisent Mein Kampf à leur pitbull / Celui qui va dormir dans la niche de son lévrier afghan Luppi après que sa femme Amandine lui a fait pour la énième fois son chantage du: c’est lui ou moi / Celle qui a gardé et fait naturaliser les peaux de tous ses bassets recousues ensemble en tapis mural du plus bel effet / Ceux qui ont été durement affectés par la mort de leur chat de gouttière Ciccio auquel il ont érigé le treizième mausolée du fond de leur jardin privatif / Celui qui fait courir sa levrette sur le home-trainer de son garage en la menaçant de sa grosse voix au moindre fléchissement de rythme / Celle que le chagrin a terrassée au retour des champs de sa chatte Baby dont la grande faucheuse du paysan Molard a sectionné les quatre pattes / Ceux qui envisagent de pacser leurs deux Danois dont l’orientation sexuelle est clairement différente, etc.

     

    Aquarelle de JLK : la chienne Thea, gardienne vigilante du foyer de la Professorella et du Gentiluomo, à Marina di Carrara, entre sept chats et le robot tondeur Oskar.

  • Ciao da Roma (3)

     

     

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    À Philip Seelen

     

    Dans les jardins du Capitole, ce 21 mai 2009

     

    Cher toi,

     

    C’est un lieu commun que de constater qu’une ville-monde comme Rome contient tout et son contraire, et c’en est un autre que de révéler les effets délétères du tourisme de masse, mais nous n’en étions pas moins enragés et même un peu tristes, hier soir, de retrouver le quartier du Trastevere, naguère si vivant et si telluriquement populaire, bonnement envahi par la cohorte sempiternelle avide de succédanés de pittoresque dont nous avons eu, le temps d’un repas médiocre et mal servi, le meilleur exemple des ravages, à commencer par une suite de rengaines napolitaines littéralement exécutées par un grand flandrin sans voix et sans trace de finesse dans ses resucées, mais accueilli comme LE chanteur typique par les tablées de Bavarois et de Batavois reprenant l’inévitable O Sole mio comme la pire chanson à boire. Tu sais assez que nous ne sommes pas, L. et moi, gens à cracher sur les plaisirs de notre aimable prochain, mais certaine grossièreté intempestive, en certains lieux dont on a connu la qualité de vie, ne peut que déprimer ceux qui restent attachés à celle-ci même sous les formes les plus débonnaires. Autant dire qu’après avoir réglé notre conto (excessif comme tu l’imagines) nous nous sommes trissés vite fait jusqu’aux alentours de la Piazza Navona où nous avons évoqué notre première escale de la soirée au Nuovo Sacher, le cinéma mythique de Nanni Moretti qui ressemble plus que jamais à un cinéma de quartier…

    Cela étant, loin de moi l’idée d’exalter notre «bon temps » de jeunes rebelles (tu l’as été bien plus que moi au sens de la militance) alors que, tout au contraire, complètement revivifié par ce que nous venons de voir aux musées capitolins, mon élan de l’instant me porte à célébrer ce qui de l’Art échappe complètement au Temps.

    Tout à coup tu passes un seuil et te retrouves dans la fraîcheur sans âge de telle statue de Vénus ou de tel torse d'un Dionysos endormi, tout autour de toi n’est plus que sublimation par une beauté qui a traversé les siècles, tout semble comme retourné par la lumière émanant du marbre et des formes, loin des mornes amoncèlements des musées ordinaires. Car cela aussi nous a enchantés en l’occurrence : de n’avoir ni réservations à faire ni longue attente à endurer, puis de découvrir la partie nouvelle réservée aux antiques dans de belles salles claaires et clirement documentées (autour de la statue équestre de Marc-Aurèle), sans nous douter du tout, faute de publicité tapageuse, qu’une admirable exposition nous attendait également en ces murs, toute consacrée à Fra Angelico.

    Angelico3.jpgOr il m’est difficile, à vrai dire, d'exprimer le bonheur profond, que j’aurais pu prolonger des heures, et largement partagé par ma abonne amie, de retrouver ce peintre de la pure transfiguration spirituelle, qui allie sapience et simplicité à l’aube de la Renaissance et scelle le meilleur savoir et la meilleure pensée du Moyen Âge tout en multipliant, en artiste radieux, les échappées vers le primitif et vers le tout moderne – sans le chercher évidemment.

    Il y a chez Angelico de la sainteté paysanne à malice profonde (ses détails sont souvent aussi touchants par leur verve familière ou cocasse que le Motif religieux) et de l’émotion perceptible ici de manière beaucoup plus évidente que devant ses chefs-d’œuvre vus et revus. Le coloriste nous lave une fois de plus le regard, et la musique de sa peinture me touche infiniment, qui nous ramène évidemment à Bach plus qu’à quiconque – mais jamais je n’arriverai à parler de Bach. Bref on est ici dans la pure peinture, comme on est avec Bach dans la pure musique.

    Angelico4.jpgEnfin, entre Giotto et Piero, avant la psychologie et les pâmoisons, avant aussi la dilution progressive du spirituel dans l’Art, on est ici dans un équilibre entre rigueur absolue et plasticité déliée, qui tend la contemplation – cela ressenti au cœur de Rome aussi bien que dans les déserts de Fiesole et autres hauts lieux de Toscne ou d'Ombrie...

     

    Mais allez, je t’embrasse, tandis que la touffeur nous embrase...

    Baci

    Jls  

     

  • Dernières nouvelles de Ballard

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    Diverses publications chez Tristram, dont le premier volume de ses Nouvelles complètes, font de ce visionnaire du futur actuel un auteur de plus en plus contemporain
    « Quand arrivera l’apocalypse », écrivait J.G. Ballard, « le problème principal sera le parking ». Depuis le 19 avril dernier, son cancer a résolu les problèmes de parking de l’auteur devenu « culte » non sans malentendu, pour les deux films qui ont été tirés de son œuvre : l’autobiographique Empire du soleil, chronique d’une adolescence marquée par trois ans de vie en camp de prisonniers civils, aux mains des Japonais, entre Pearl Harbour et la fin de la guerre, tourné par Steven Spielberg ; et Crash, adapté par David Cronenberg, illustrant les relations d’érotisme et de violence fantasmatique liant l’homme à la voiture.
    Le malentendu, James Graham Ballard l’a suscité dès ses débuts, en déroutant ses lecteurs de science fiction avec un mélange détonant de technologie folle et de vie quotidienne absolument banale en apparence, où des manipulations génétiques aboutissent à des fleurs cantatrices et des arbres musiciens aux humeurs de massacre, mais aussi des vêtements à fibres étrangleuses, des agences de voyages aux étranges programmes ou des altérations de l’environnement (désertification des terres, pétrification des forêts, déchaînement cosmique des éléments dans Le vent de nulle part) qui prennent, 50 ans plus tard, un relief saisissant.
    Après les contre-utopistes Orwell (1984) et Huxley (Le meilleur des mondes), pas loin non plus du Buzzati du Voyage aux enfers du XXe siècle, Ballard, dès les années 1950, a déployé une fresque extraordinairement inventive, à la fois poétique et ludique, à l’humour grinçant et à la mélancolie profonde, dont la critique prémonitoire a toujours été soumise au génie du conte. Plus encore qu’un Ray Bradbury, Ballard le doux, dont l’enfance au Japon a été marquée par la dureté de la vie et le fracas des explosions atomiques, a su déceler les germes de la violence au quotidien, entre conjoints ou entre parents et enfants, autant qu’il l’a perçue entre classes sociales ou nations. Avant tout le monde, il a pressenti la catastrophe écologique, décrit la guerre « pour le Bien » que pratiquerait l’administration Bush, la fuite en avant dans la consommation, les désarrois explosifs de la classe moyenne, la sexualité banalisée ou poussée aux extrêmes, la culture devenant bouillon fade de jacuzzi, l’ennui fauteur de «pétages de plombs » individuels ou collectifs.
    Notre présent est «ballardien» depuis des années déjà, se dit-on en découvrant le premier volume des Nouvelles complètes de l’écrivain anglais (1956-62), rassemblant une trentaine de récits parmi les meilleurs de six recueils – dont L’homme saturé, Les voix du temps ou Passseport pour l’éternité, plus deux inédits -, et probablement le sera-t-il de plus en plus à l’ère de la globalisation, de l’aventure par procuration des jeux télévisés ou du cybersexe. Pas étonnant qu’il soit une des grandes références d’ un Michel Houellebecq après avoir été le pionnier du roman d’anticipation sociale avant Breat Eaaston Ellis (American Psycho) ou Chuck Palahniuk (Fight Club).
    Bref, après la réédition de La Foire aux atrocités et de Millenium People, entre autres, le lecteur francophone non initié dispose encore de vastes zones imaginaires à explorer avec cet inventeur de réalité…

    Un rêve massacré

    Les banlieues résidentielles propres-en-ordre constituent l’un des décors privilégiés des récits de Ballard, comme dans Millenium People, et plus encore dans Sauvagerie, petit roman tout récemment traduit où il est question d’un massacre collectif frappant les habitants au-dessus de tout soupçon d’un de ces quartiers « de rêve », dont tous les enfants ont mystérieusement disparus. Désigné pour enquêter sur cette énigmatique tuerie, deux mois après les faits, le psychiatre Richard Greville ne parviendra pas mieux que la police à expliciter le drame, en dépit des images vidéo du système de surveillance, dont il ne découvrira le fin mot que cinq ans plus tard. Où l’on constate les effets collatéraux inattendus d’un « régime de bienveillance et d’attention » poussé à l’extrême de la mentalité sécuritaire .

    J.G. Ballard. Sauvagerie. Traduit de l’anglais par Robert Louit. Tristram, 119p.

    Pour lire
    J.G. Ballard


    Le vent de nulle part, roman, Casterman, 1977.
    Empire du soleil, roman, Denoël, 1985
    Super-Cannes, roman, Fayard, 2001.
    La Foire aux atrocités, roman, Tristram, 2003.
    Crash, roman, réédition Denoël, 2005.
    Millenium People, roman, Denoël 2005.
    Nouvelles complètes I, Tristram, 2008.
    À venir : Nouvelles complètes II et III, chez Tristram.