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Le coup du téléphone portable

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À propos de Téhéran sans permission, de Sepideh Farsi, vu à Locarno.
Découvrir en même temps une quantité de films récents venus des quatre coins du monde permet, entre autres, de repérer des similitudes thématiques ou techniques intéressantes. Frédéric Maire a relevé la prédominance, dans l’édition 2009 du Festival de Locarno, des thèmes liés à la migration et aux questions d’identité personnelle ou collective qui en découlent, et la croissante inquiétude engendrée par la catastrophe écologique.

Dans une note de son blog de critique de cinéma ferré (http://dua.typepad.com), Antoine Duplan relève aussi la récurrence des séquences finales en bord de mer, comme on le voit dans Shirley Adams, Wakaranai et My sisters’ keeper, mais aussi dans Men on the Bridge, évoquant quelques tranches de vie dans la mégapole turque – tous films auxquels je reviendrai.
Dans l’immédiat, cependant, c’est à une coproduction franco-iranienne que j’aimerais m’arrêter en relevant deux autres récurrences : celle du filmage par téléphone portable, comme s’y est employé Pippo Delbono dans La Paura, et celle de l’intervention du rap, qu’on retrouve au fil de la narration de Téhéran sans permission, de la réalisatrice iranoienne quadragénaire Sepideh Farsi (auteure du Regard et d’une chronique familiale, Harat, présentée en 2007 à Locarno), dont les paroles extrêmement percutantes donnent une idée de ce qui se passe « sous le voile » de l’islamisme.
Kaléidoscope «volé» à la vie quotidienne, où alternent les plans généraux de rues ou de places dégageant un climat de constante surveillance, les panoramiques sur la ville immense et grouillante ou les cadres serrés sur le profil de tel ou tel personnage acceptant d’être filmé en voiture (et ce sont alors des micro-témoignages souvent révélateurs), Téhéran sans permission, parfois brut de décoffrage dans sa forme, et parfois plus élaboré, a le grand mérite de nous montrer l’Iran actuel tel que le traverse une jeune Iranienne occidentalisée, sans entrer dans le détail du débat social ou politique – et c’est aussi ses limites. Impressionniste, servi par des questions claires et fermement formulée par la filmeuse, ce tableau-deportage illustre l’opposition constante de la modernité technologique et de l’archaïsme idéologique d’un pays vivant et plein d’énergies contraintes. La vision, à un moment donné, des caciques islamiques apparaissant en gros plan sur les écrans high-tech de la campagne électorale télévisée, barbes et rides hors d’âge, regards sombres et butés sur fond de studios léchés, en dit autant qu’un discours politisé, de même que ce témoignage d’un jeune disant tout haut ce que ceux de sa génération vivent tous les jours endouce: que c’en est marre de supporter ces plus ou moins vieux birbes dont le Dieu ne cesse de fulminer contre la vie…
Pour saisir cette réalité réelle qu’une équipe dotée d’un lourd matériel n’eût jamais capté de la sorte, le « coup du portable » n’a rien d’un gadget artificiel. Comme la petite caméra ultra légère du filmeur Alain Cavalier, c’est un moyen nouveau de faire passer ce qu’il est urgent de dire librement…

Commentaires

  • "c’est un moyen nouveau de faire passer ce qu’il est urgent de dire librement"... "faire passer ce qu’il est urgent de dire librement"... "urgent de dire librement"... librement... Et comme l'envie de m'en faire une sorte de mantra... Car, en passant, cela résume pour moi beaucoup de choses... Souvent faciles à oublier.

  • Renato Berta hier soir sur la Piazza Grande, au moment de recevoir le nouveau Prix Cinema Ticino: "Tant de films, mais combien de cinéma ?", après avoir évoqué le Niagara d'images qui menace chaque jour de nous submerger. Et de s'adresser aux jeunes réalisateurs: "Prenez votre temps, prenez le temps de revisiter l'histoire du cinéma, faites vos images et refaites-les..."
    Tout à l'heure repasseront les images de Heute Nacht oder nie, imagées par Renato Berta, qui a rendu hommage à deux des réalisateurs qui lui ont le plus donné: Glauber Rocha et Daniel Schmid, précisément. Belle leçon d'un maître chef op' à ceux qui viennent...

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