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A la venvole

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Notes au jour le jour

Plus on avance en âge et plus les choses nous apparaissent avec netteté. Mais c’est aussi un exercice à relancer chaque jour. Cela se cultive et s’améliore possiblement à chaque instant. Question d’attention.

Pense à tout moment à René Girard en observant le comportement de mes semblables. Le mimétisme est partout. Partout cette course rivale sous l’effet de l’envie et de la jalousie, partout cette montée aux extrêmes. Toujours plus le sentiment que le monde actuel tourne à l’asile de fous. Attention pourtant à ne pas céder à la pente catastrophiste.


Mis le nez ce matin dans cette Bible d’hôtel. Tout à coup me saisit l’énormité de cette chose : le Verbe.

A la fois intéressé et rebuté, parfois, par la lecture du dernier livre d’Annie Ernaux, intitulé Les Années et constituant une espèce de double chronique d’une vie de femme, depuis 1940, et de l’époque vécue par la suite des générations dans un monde en rapide changement. Ce qui me hérisse là-dedans, qui me rappelle tous mes amis profs de gauche d’une certaine époque, c’est une façon de s’en remettre, dans sa vie, à l’état de la politique et pour ainsi dire : à l’Etat. Elle le dit d’ailleurs à un moment donné, comme s’il s’agissait d’un personnage important : « l’Etat s’éloigne de nous », avec le ton d’une petite fille abandonnée. Il y a là quelque chose qui m’échappe absolument, autant que la notion même de génération.


Tout est à travailler, à travailler et retravailler, me dis-je le matin en songeant à tout ce qui nous menace de dispersion et de décréation par laisser-aller, par paresse ou par ennui. L’esprit d’enfance, c’est à savoir l’esprit de gravité et de conséquence, me tient lieu de raison et de sagesse, de boussole et d’horizon radieux. A tout instant on est menacé de sombrer. A tout instant je suis menacé de sombrer. A tout instant la distraction et la dispersion menacent. Diablerie. Le diable est celui qui disperse, l’anti-créateur et l’AntiSystème.

«L’importance d’être tenu, d’avoir été tenu, dans les bras des autres. » (dans une lettre de N.H.)

Que répondre aux mots de la haine ? En ce qui me concerne, je me sens complètement désarmé devant les mots de la haine. Ou plus exactement : la vie m’a désarmé. Je me souviens évidemment du temps où je criais parfois, moi aussi, à l’époque où tous criaient. Au moindre désaccord : on criait. Et souvent on pleurait aussi : on pleurait après avoir crié. Mais très tôt j’ai ressenti, aussi, le fait que je criais pour moi et pas du tout pour la Cause dont il était question. Les mots de la haine qui me venaient, comme ceux qui venaient à tous, nous éloignaient de ladite Cause bien plus qu’ils ne signifiaient notre désir sincère de la servir.

Commentaires

  • Bien beau livre, pourtant que ces "Années" d'Annie Ernaux. Cette manière d'incorporer l'Histoire dans le parcours individuel est saisissante. En outre, le lecteur s’investit beaucoup plus que devant une simple biographie puisqu’il retrouve des événements et des impressions qu’ils a connus. D’un côté l’individu-narrateur (narratrice en l’occurrence) est obligé d’être modeste dans la mesure où il se rend compte qu’une bonne partie de ce qu’il est dépend du milieu historique et social. De l’autre c’est cette appartenance involontaire à l’Histoire qui le sauve en partie puisque cette Histoire perdurera dans la mémoire de l’humanité. Du coup, ce qui est à la base de son destin individuel, ainsi que tous ses souvenirs, passeront un peu à la postérité.

    S'en remettre à la politique et à l'Etat, dites-vous. Mais l'état n'est-il pas l'émanation de la volonté des citoyens qui le composent? C'est en tout cas ce que disait votre compatriote JJ Rousseau dans son "Contrat social". Dès lors, l'Etat ne doit pas seulement s'intéresser au sort de quelques privilégiés. C'est en ce sens, à mon avis, qu'il faut lire les propos d'Ernaux. Non pas tout attendre d'un état providence, mais lutter pour une certaine justice sociale.

  • Oui, bon, bah, vous n'avez pas tout tort, d'ailleurs j'avais commis un papier plutôt sympa sur ce livre, même chaleureux il me semble, plutôt Rousseau de ton, alors que je devais être d'humeur Voltaire quand j'ai noté ce bémol, c'est comme ça les Gémeaux, faut se méfier...

  • les grecs, qui n'étaient pas aussi arriérés qu'on peut le penser, avait eu la judicieuse idée de classer l'histoire - avec ou sans majuscule - dans les arts, clio est d'ailleurs la seconde des muses en termes d'importance - relative -; c'est amusant que personne ne prenne le temps de s'arrêter sur cela dans le monde des sérieux.

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