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  • Janus

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    …Là tu me coinces, évidemment, parce que tu sais trop bien que je suis incapable de choisir entre le Rouge et le Noir, je te dis que je suis plutôt macadam et tout de suite je change d’avis : plutôt fougère, le garçon va me chercher mon Coca et je le rappelle aussitôt : plutôt Vodka, bref tu sais ma nullité en matière de directives à mes anges ou mes démons, ça craint vraiment, donc on en reste là, on fait demi-tour ou alors on va chacun d’un côté ou de l’autre, ou disons : je prends plutôt à gauche puisque t’es de toute façon un mec de droite et que ça mange pas de pain si c’est le contraire…

    Image : Philip Seelen

  • Ceux qui s'éclatent sur WebcamWorld

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    Celui qui se guillotine le Membre Roi devant 1789 voyeurs de WebcamWorld sans quitter son bonnet de sans-culotte / Celle qui a fait de WebCamWorld son boudoir intime / Ceux qui restent interdits en découvrant ce site permissif / Celui qui relit tranquillement L’Erreur de Narcisse de Louis Lavelle (1883-1951) dans le sous-bois ocellé de belle lumière d’automne/  Celle qui reconnaît sa cousine Cerise sur le site à caractère libertin où elle a pris le pseudo de Vampirella / Ceux qui proposent une enquête à l’Assemblée de paroisse des Bleuets afin de déterminer qui a introduit le démon du cybersexe chez les catéchumènes de première année / Celui qui cherche l’âme sœur romantique sur Skype / Celle qui a toujours estimé que The Chose était très surévaluée par rapport aux satisfactions que procurent le tennis de table ou la randonnée en moyenne montagne / Ceux qui s’exhibent en uniformes strictement boutonnés / Celui qui se montre sur WebcamWorl entièrement nu et couvert de peinture de carrosserie (ce qui est dangereux du point de vue dermatologique) rouge Maserati / Celle qui baise avec un kangourou de peluche couinant au moment M / Ceux qui glapissent More Show dans toutes les langues mais surtout en anglais de texto / Celui qui a calé son laptop dans son écurie ultramoderne d’où il suit - tout en rinçant sa machine à traire nickel - les ébats de MollyMissPussy  à Caracas que 2347 voyeurs encouragent à l’instant et notamment Pedro le Brésilien lui répètant obstinément Suck Your Nipples dont la signification échappe au vacher  modèle /  Celle qui aurait pu rencontrer l’homme de sa vie sur Meetic mais que sa vie à préféré faire le rencontrer sur la terrasse du Bar des Acacias en polo couleur chair / Ceux qui surfent dans le virtuel  sans rien perdre (mais c'est rare) de leur aura très réelle, etc.

    Image:Philip Seelen

  • Les douces horreurs de l'amour

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    Le deuxième roman de Noëlle Revaz, Efina, démêle les fils barbelés d’un impossible amour. Entre guerre des sexes et théâtre à tout dire et son contraire. Un grinçant régal.

     

    Dire que le deuxième roman de Noëlle Revaz, sept ans après Rapport aux bêtes, est captivant, pourrait sembler une formule convenue, mais c’est un fait : Efina vous captive, Efina vous fascine même d’entrée de jeu, ce roman-sparadrap (par allusion au Capitaine Haddock qui n’arrive pas à se débarrasser du foutu sparadrap qui lui colle au doigt et et aux semelles) est immédiatement passionnant par sa façon de vous attirer et de vous repousser, comme les deux protagonistes sont irrépressiblement attirés l’un vers l’autre et repoussés par un désir qui se nie et se multiplie à l’instant de se jurer que cette fois c’est bien fini, et ni.

    Efina est l’histoire d’une obsession mimétique qui se transforme en amour plus profond que l’amour qu’il y a trop souvent dans les livres ou sur les scènes de théâtre, exaltation factice. Le roman commence par les retrouvailles de deux personnages : Efina, qui n’est rien qu’Efina, trentenaire passionnée de théâtre à ses heures, et T., comédien fameux et grand tombeur, dont la première apparition le voit, sur scène, jouer alternativement deux personnages que tout oppose : un escroc ventru et un notable raffiné. Efina voit en lui un « merveilleux comédien » auquel elle écrit le soir même en prenant soin de préciser que « l’amour n’est pas entre eux ». Et la lettre ne partira jamais. Or T. a lui aussi écrit une lettre le même soir, comme il en a écrit une au lendemain de leur première rencontre, à laquelle Efina n’a jamais répondu si tant est qu’elle l’ait reçu – ni l’un ni l’autre ne se le rappellent sûrement.

    Les lettres jouent un rôle important dans Efina, autant pour « tout dire » que le contraire, pour séduire en disant le contraire de ce qu’on pense et de ce qu’on sent en inquiétant ou en humiliant (T. est  un champion de ce jeu-là, pour attirer en se dérobant ou en vexant l’autre, pour séduire en jouant la parfaite indifférence, comme les deux personnages s’y emploient - théâtre de la correspondance source de tous les malentendus, aujourd'hui par courriels et textos : masques de l’aveu à distance et défi au temps…

    Après s’être revus une seconde fois au théâtre, Efina et T. s’écrivent donc des lettres qui ne partiront jamais. Tout au long du roman, ils ne cesseront d’ailleurs de s’écrire des lettres, qui arriveront parfois, parfois seront anonymes, souvent diront le vrai, souvent le faux qui parfois est moins faux que le vrai. Or, au dit du roman s’ajoute ainsi le non-dit de lettres non envoyées qui, sous la signature de T., surtout, pourraient constituer un autre roman…

    Efina est un formidable roman de la passion mimétique, telle que l’a décrite René Girard dans Mensonge romantique et vérité romanesque. Mais Efina n’est pas l’illustration d’une théorie : c’est la vie même et la fiction même en craintes et tremblements d'écriture. Efina croit qu’elle aime T. mais c’est peut-être une illusion, en tout cas au début. Elle lui écrit pour lui dire qu’au fond il ne compte pas pour elle, et c’est là, déjà, bien entendu, que la passion repique. Même topo pour T. Efina et T. se cherchent méchamment mais ne coucheront pas avant 40 pages, et ça n’arrangera pas vraiment les choses de découvrir une langue à consistance d'escargot ou des nibards plus fermes qu'on ne l'eut cru, car leur amour est ailleurs, n'est-ils pas ?

    L’amour d’Efina et de T. est tissé par des siècles d’attente d’amour. C'est Paolo et Francesca qui lisent ensemble Love Story avec le même air blasé. T. est marié et saute des tas de femmes, Efina rencontre des hommes plus gentils que T. et s’essaie à la maternité, mais l’enfant l’embête et les hommes se succèdent comme les chiens. Et c’est comme au théâtre, entre cœur et jardins publics : ce qui s’y passe surtout, c’est surtout que le temps passe et vous fait des rides au coeur. 

    Or ce qui ne vieillit pas, dans Efina, c’est l’écriture de Noëlle Revaz. Curieusement maniérée au tout début, ou plus précisément « ralentie » par des expression inattendues, elle s’affûte de magistrale façon au fil des pages, sans se policer pour autant, et devient une joyeuse cavalcade de mots qui font la pige au mensonge romantique pour accéder à la vérité romanesque. Et c’est très drôle, très affreusement juste et drôle, humoristique comme la vie quand elle tombe le masque. 

    Il y a, dans Efina, une énergie endiablée et un humour qui passe, là encore, par les mots.  On pourrait dire que c’est le roman de la dérision du romantisme, et c’est pourtant un roman très émouvant qu’Efina, avec deux admirables portraits d’âme sensibles écorchées vives. Plus on avance « dans » les personnages, plus mufle (apparemment) se montre T., plus insaisissable se montre Efina, plus mal faits l’un et l’autre pour vivre jamais l’un avec l’autre, et plus leur double solitude les rapproche en réalité, pour communiquer parfois. Sans pathos, même si la fin de T. a quelque chose de déchirant, Noëlle Revaz travaille ses personnages à la fine pointe des sentiments et, surtout, sait inscrire leur souffle et leurs pas dans l’inexorable passage du temps. Le temps du roman est un présent apparent, mais qui semble brasser le passé de plusieurs vies et nous ouvrir un autre présent à venir. Roman de la passion invivable, de la guerre des sexes et de la cruauté du grand art (car il y a de l'enfant blessé chez le grand comédien écrabouilleur), entre autres thèmes, Efina fera date (Goncourt al dente ?) et confirme le talent original, avec quelque chose de commun aux héritiers de Robert Walser (pour la candeur jouée) et de Thomas Bernhard (pour la bonne rage), d’une romancière pur jus qui a encore, sans doute, beaucoup à dire…

    Bonheur enfin de lire un vrai roman qui dit le faux pour mieux exprimer la vérité, jusqu’à cette dernière phrase ailée : « Le cimetière est la maison des oiseaux »…

    Revaz2.jpgNoëlle Revaz, Efina. Gallimard, 182p. 

     

    Et encore: La cérémonie du T., dans Libération du 3 septembre, sous la plume d'Eric Loret:

    http://www.liberation.fr/livres/0101588537-efina-la-ceremonie-du-t

  • Liberté

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    …Ah mais, Jessica, quand comprendras-tu enfin que ces gens-là ont choisi de vivre comme ça, cela me paraît évident, toi et moi nous ne le pourrions jamais, c’est vrai, nous avons par trop le sens de notre dignité, sans compter que nous restons prisonniers de nos schémas - et ta pitié en est un signe, mon cœur, alors que ces gens-là se réalisent peut-être plus que nous au niveau du senti…
    Image : Philip Seelen

  • Les Assistants

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    …J’sais pas ce que j’ai fait à Big Father, moi, j’sais pas si je mérite ça, j’sais vraiment pas si j’en vaut la peine, mais partout où je risque de m’effondrer je sens ses Agents qui sont là pour me tendre une main ou une chaise, j’vais pour basculer dans le caniveau et flop en voici un qui me retient, ou flip en voilà une qui me sourit dans la glace quand y a que moi et mon revolver tout prêt, pour un peu j’me sentirais sur la Bonne Voie, mais dès que j’me dis ça, ça fait pas un pli:  j’en vois plus le bout d'aile d'aucun…
    Image : Philip Seelen

  • Deuil

    Panopticon634.jpg… Paraît que pour les Japonais ou les Chinois, je sais plus, le blanc serait la couleur de la mort, si tant est que le blanc soit une couleur, mais tu vois ça : la neige, tu te dis chic, la neige, la neige immaculée, la pureté de la neige, les enfants qui se réjouissent et tout ça, mais ni pour les Japonais ou pour les Chinois, alors tu fais comment, Marie-Aubépine, quand t’as des Japonais ou des Chinois qui se pointent à ton gîte des Gais Alpins et que tout est blanc comme ça ?...
    Image : Philip Seelen

  • La ralentie

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    … C’est où ça que tu vois que je dois vivre à cent à l’heure, c’est quand que je devrais attraper l’aileron du requin pour rester dans le trend, si moi je me fous du vent et de la course, et c’est qui, t’as vu sa gueule ? qui me dit comme ça qu’il faut que m’éclate quand mon vrai bonheur est de m’attarder à n’en plus finir dans tes bras de vieille peau grabataire jouant du saxo comme personne, dont le vrai bonheur et de me jouer les préliminaire tout le temps que l’instant se prélasse…
    Image : Philip Seelen

  • Ceux qui font la gueule

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    Celui qui cuve son fiel dans son aigre retrait / Celle qui guette la moindre défaillance de son tuteur / Ceux qui sapent tout ce qu’on leur propose de constructif / Celui qui bute tous les matins sur l’air renfrogné du portrait de sa belle-mère suspendu dans le corridor aux trophées de chasse de l’aïeul plein aux as / Celle qui est critiquée par ses collègues qu’insupporte sa façon ostentatoire de positiver / Ceux qui recherchent un p’tit coin de ciel bleu dans ce monde leur semblant de plus en plus noir / Celui qui cuve son pessimisme avec cette mauvaise délectation qu’entretient en lui son égomanie de longue date / Celle qui enrage de voir ses jeunes voisins tout joyeux sur le balcon d’à côté / Ceux qui se réjouissent muettement de la faillite de leurs amis Du Perrier finalement bien punis de leur insolente superbe / Celui qui t’annonce avec un ravissement mal dissimulé que ton projet de Jardin Tropical Sur Les Toits n’a pas été retenu par le Jury qu’il préside / Celle qui insinue que c’est pour refouler sa sensualité débridée que notre cousine Jessica fait retraite aux couvent des Ursulines / Ceux qui parlent d’un ton revêche aux jeunes du quartier laissant éclater leur bonne humeur dans le nouveau métro / Celui qui exulte littéralement du matin au soir dans son appart minable d’étudiant en mandarin / Celle qui ne veut pas entendre la Bonne Nouvelle que lui annonce l'évangéliste Colinet / Ceux qui estiment que sourire à la vie dénote un manque de sens moral, etc.
    Image : Philip Seelen

  • Le legs

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    …Nous ne laisserons certes rien derrière nous, Monsieur Meursault, que la pierre et le lierre, j’irai même jusqu’à reconnaître que de votre indifférence esthète il ne restera rien que la pierre sous laquelle vous reposerez et le lierre qui en recouvrira l’inscription effacée, mais notre contrat de La Vie assurée garde cependant toute sa validité pour cette enfant du hasard que vous avez enfin identifiée et reconnue - si vous voulez bien signer là…
    Image :Philip Seelen

  • Welcome

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    …Venez, esprits délicats, votre servante est là qui vous espère et vous attend, venez rétablir la règle angulaire d’affabilité et de géométrie en ce monde souillé et malpoli, ramenez la Force douce et les bonnes manières, venez tendres âmes de l’Origine nous révéler la Lumière à venir…
    Image : Philip Seelen

  • Ceux qui claudiquent

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    Celui qui monte sur le toit de la maison de retraite pour voir la mer / Celle qui supplie son fils surnommé Mahmoud le Bon de ne pas se jeter du haut du minaret / Ceux qui se retiennent de hurler en visitant les abattoirs / Celui que la nouvelle planification nationale d’Ambition Réussite décourage d’avance / Celle qui écrit sur le mur d’un ancien bassin pour éléphants autour duquel se pressent ses élèves super attentifs / Ceux qui ne prennent en compte que les écrivains morts / Celui qui se cache de ses potes pour écrire un poème / Celle qui offre un bouquet de violette à la vieille accordéoniste aveugle / Ceux dont la colère gronde derrière les murs du lazaret / Celui qui se tranche la gorge pour n’avoir pas à obéir à l’ordre d’achever les blessés dont il connaît les mères et les soeurs / Celle qui te demande si tu te crois dans un film quand tu braques son bureau de tabac / Ceux qui te font comprendre que chauler un mur tagué coûte trop chaud / Celui qui préfère vivre dans la barre entourée de décharges que dans le quartier de villas Mon Rêve  qu’il appelle le Cimetière / Celle qui affirme au TJ du soir que les Palestiniens et les Israéliens devraient entamer «un dialogue franc et ouvert» sans se rendre compte que son chemisier jaune à une tache d’encre violette sous son nibard gauche / Ceux qui enjoignent les Gazaouis de «sortir par la mer» / Celui qui se rappelle le poème lourd de reproche et de colère de Mahmoud Darwich intitulé Passants parmi des paroles passagères / Celle qui rappelle que Darwich n’a jamais préconisé de jeter les juifs à la mer / Ceux qui ont choisi un « lieu de vie » où ils n’ont de comptes à rendre à personne, etc.

    Image: Philip Seelen

  • Au niveau du signifiant

     

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    …Et là tu veux dire quoi ? Tu crois pas que tu nous la fais au reflet du réel ou quoi ? Tu crois pas que tu donnes dans le voyeurisme et tout ça ? Tu crois pas que tu donnes dans le misérabilisme et tout ça ? Tu crois pas que tu te la joues pléthore du signifié surdéterminé par l’émotionnel et tout ça ? Et tu voudrais que nous montrions cette image dans notre expo concept Les signes de la Ville - non mais je rêve ou quoi ?

    Image : Philip Seelen   

  • Pour mémoire

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    … C’est quoi ces noms, ça veut dire quoi ces âges ? Moi j’ai vu ça je me suis dit: super le tag mais j'ai pas eu le temps avec ce type qui arrivait, et puis  la craie marque pas si bien sur cette pierre lisse, mais tu peux me dire pourquoi qu’il photographie cette pierre le type avec son appareil, tu crois qu’il photographie ce que j’ai griffonné le type  - tu crois qu’il va montrer ça au gardien ou aux flics antitags ou quoi ?...
    Image : Philip Seelen