Celui qui monte sur le toit de la maison de retraite pour voir la mer / Celle qui supplie son fils surnommé Mahmoud le Bon de ne pas se jeter du haut du minaret / Ceux qui se retiennent de hurler en visitant les abattoirs / Celui que la nouvelle planification nationale d’Ambition Réussite décourage d’avance / Celle qui écrit sur le mur d’un ancien bassin pour éléphants autour duquel se pressent ses élèves super attentifs / Ceux qui ne prennent en compte que les écrivains morts / Celui qui se cache de ses potes pour écrire un poème / Celle qui offre un bouquet de violette à la vieille accordéoniste aveugle / Ceux dont la colère gronde derrière les murs du lazaret / Celui qui se tranche la gorge pour n’avoir pas à obéir à l’ordre d’achever les blessés dont il connaît les mères et les soeurs / Celle qui te demande si tu te crois dans un film quand tu braques son bureau de tabac / Ceux qui te font comprendre que chauler un mur tagué coûte trop chaud / Celui qui préfère vivre dans la barre entourée de décharges que dans le quartier de villas Mon Rêve qu’il appelle le Cimetière / Celle qui affirme au TJ du soir que les Palestiniens et les Israéliens devraient entamer «un dialogue franc et ouvert» sans se rendre compte que son chemisier jaune à une tache d’encre violette sous son nibard gauche / Ceux qui enjoignent les Gazaouis de «sortir par la mer» / Celui qui se rappelle le poème lourd de reproche et de colère de Mahmoud Darwich intitulé Passants parmi des paroles passagères / Celle qui rappelle que Darwich n’a jamais préconisé de jeter les juifs à la mer / Ceux qui ont choisi un « lieu de vie » où ils n’ont de comptes à rendre à personne, etc.
Image: Philip Seelen