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  • Celles qui diffusent une émouvante beauté

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    Celui qui regarde Effi Briest de Rainer Werner Fassbinder comme pour la première fois / Celle qui est restée quelque part une petite fille / Ceux qui n'ont pas vu l'émouvante beauté de la servanteJohanna non moins humiliée et rejetée qu'Effi mais qui reste solide dans ses sabots et sourit doucement en se retournant pour dire qu'elle ne croit qu'en un Dieu bon et pas en celui qui a rendu son père si méchant avec elle qu'il la menace avec un fer chauffé au rouge enrobé de saintes paroles / Celui qui déplore qu'une certaine critique plus ou moins gay n'ait vu d'Effi Briest que le kitsch glamour tandis qu'une certaine critique féministe n'y voyait qu'une dénonciation morbide du statut de la femme bourgeoise / Celle qui sait pourquoi sa mère est devenue si dure / Ceux qui satisfont au voeu de RWF de lire ses films comme des livres / Celui qui retrouve dans Effi Briest quelque chose de La Prisonnière / Celle qui ne veut rien savoir du prétendu despotisme de RWF qui a su capter toute la gamme des sentiments humains dans les regards et sur les visages de ses comédiennes et comédiens - et tant mieux s'ils en ont bavé un max / Ceux qui chipotent sur le thème rebattu de l'égocentrisme des artistes / Celui qui ne fera pas le compte de ce que la mère de RWF doit à son fils ni de l'inverse vu que tous deux ont génialement dépassé l'imbroglio oedipien selon les normes rappelées par La psychanalyse pour les nuls / Ceux qui savent qu'on ne peut faire oeuvre sans "payer" / Celui qui sait que sans le suicide de son ami RWF n'eût pas réalisé L'Année des treize lunes / Celle qui aime trop les gens pour les catégoriser en fonction de leurs goûts culinaires ou sexuels si variables selon les saisons et les climats / Ceux qui savent que l'émouvante beauté des films de Rainer Werner Fassbinder découle de son sens du tragique / Celui qui a foutu sa vie en l'air pour complaire à un trouduc titré dont il espérait devenir le conseiller ministériel et autres babioles / Celle qui rappelle à sa fille rêvant de liberté que le catéchisme c'est le catéchisme / Ceux que RWF a choqués avec sa Troisième génération en donnant des néo-terroristes des années 80 une image de fils de bourgeois énervés / Celui qui sait que les films de RWF vont bien au-delà de la démonstration et de la dénonciation à quoi pas mal de profs de gauche des années 70-80 les ont réduits en hochant gravement du chef / Celle qui interloque tout le monde (sauf Dieu qui en a vu d'autres) en convenant finalement que tout le mal qui lui est arrivé fut aussi de sa faute et que tout est bien puisqu'elle a quand même pas mal aimé son pédant coincé de mari et pas tellement son amant d'un moment et que maintenant il se fait tard et qu'elle a envie de dormir / Ceux qui ne s'étonnent pas autrement (comme le raconte sa maman) que le petit Rainer ait trépigné dans l'église vide au motif que Dieu n'y était pas contrairement à ce que lui avait dit sa grand-maman / Celle que ne gêne pas du tout l'évidence selon laquelle un grand artiste est souvent un elfe et un porc en même temps - un tyran et la première victime de celui-ci comme on l'a vu chez Dostoïesvski et chez Proust notamment / Ceux qui apprécient particulièrement les artistes à constats qui ne soient pas pour autant des prêcheurs ou des sociologues / Celui qui a relancé les constats de RWF dans un petit roman tout imprégné de pleurer-rire transportant les bas-fonds de Munich et Berlin dans les rues chaudes de la Rome calviniste et plus exacement rue de Berne / Celle qui a autant joui qu'elle en a bavé sans bien distinguer la ligne de démarcation entre le pied que tu prends et le coup de pied qu'on t'envoie / Ceux qui conviennent finalement du fait que leur cravate sociale les a étranglés / Celui qui sait d'expérience que l'émouvante beauté de l'amour vrai n'a rien à voir avec les sirupeuses fadaises du sentimentalise de masse / Celle qui se plie à la bonté-malgré-tout du bourgeois qu'elle a épousé pour son prestige et qui la ramène au pardon de sa fille coupable d'avoir vécu le bonheur qu'elle-même s'est refusé / Ceux qui ont de la compassion même pour les bourgeoises coincées et les petites-bourgeoises aspirant à la condition d'épouses de bourgeois coincés / Celui dont les blasphèmes inspirés par l'amour touchent au coeur celui qu'il appelle Dieu sans le crier sur les toits / Celle qui se balance sans s'en balancer tout à fait / Ceux qui liront demain le roman de Theodor Fontane Effi Briest traduit par Antonin Moeri notre ami-de-Facebook , etc.
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    (Cette liste a été inspirée par la "lecture" d' Effi Briest, film de Rainer Werner Fassbinder datant de 1974 et tiré du roman éponyme de Theodor Fontane)


  • Ceux qui préféreraient ne pas

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    Celui qui décline poliment quand on l'invite à un déjeuner de presse ou un dîner de décideurs stressés / Celle qui n'accorde des interviews qu'à titre posthume / Ceux que leur indépendance d'esprit et leur liberté de parole font mal voir dans les cercles où il est recommandé de penser du Président que c'est un fils de pute sans le dire évidemment / Celui qui persévère en dépit de ses erreurs de père peu sévère / Celle qui perd ses verres de contact dans le bain maure / Ceux que la chiennerie revigore / Celui qui ose se dire tout haut ce qu’il vit sans cesser de le vivre tout bas / Celle qui entend tout à demi-mot qu'elle répète à double sens/ Ceux qui se préparent à l’aveu retenu / Celle que l’indiscrétion généralisée ramène à la pudeur de ses aïeux / Ceux qui ne se livrent que dans leurs livres à clefs / Celui qui ne sait pas trop qui il est ni qui elle est ni qui ils sont pour ceux qui d'ailleurs n'en ont rien à scier / Celle qui n’ose dire à la télé que son rêve est d'être encore plus connue dans le quartier / Ceux qui ont un plan Q avec des Malaises / Celui qui acquiert un gris du Gabon puis s’en lasse et l’oiseau dépérit mais dans l’émission ça finit bien / Celle qui regrette le temps de 30 millions d’amis qui était aussi celui de sa relation avec Victor-André / Ceux qui aiment les films d’éléphants / Celui qui s’apprête à tout dire à sa mère quand elle lui dit c'est ça mon chéri dis tout à ta mère alors il se tait / Celle qui va TOUT DIRE dans son poème sur le RIEN / Ceux qui pratiquent la confidence du ventre / Celui qui a horreur de la familiarité sauf entre gays irlandais originaires du même bourg orangiste / Celle qui n’a aucun préjugé ce qui ne la rend pas plus attrayante qu’une rivière d’eau canalisée ou quelque chose du même genre/ Ceux qui se servent de vos confidences pour vous scier / Celui qu'on dit le Bartleby de l'Entreprise encore qu'il préférerait plutôt pas / Celle qui ne force jamais l'hésitant à ne pas se forcer d'hésiter / Ceux qui préfèrent coucher avec de belles indécises qu'avec des décideurs qui "en ont", etc.

    Photo JLK: Amoureux à Salonique

  • Chiennerie d'époque

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    À propos de l'Honneur de DSK, des menées torves de Marcela Iacub, de l'autofiction et d'autres choses délicates...

    Le micmac nauséeux lié depuis ses débuts à l'affaire DSK, relancé ces jours par la publication du livre non moins glauque de Marcela Iacub, brasse une matière d'époque qu'on aimerait bien voir ressaisie par un romancier digne de ce nom.

    Sous le titre avenant de L'Enculé, Marc-Edouard Nabe s'y est essayé l'an dernier, sans résultat probant à mes yeux. L'auteur s'est félicité d'avoir fait un vrai roman profond et drôle, composant un personnage de baiseur cynique affligé d'une épouse d'un sionisme hystérique, mais tout ça m'a paru mal fagoté et sans aucune épaisseur réelle, plombé par la recherche de l'effet et surtout sans style. Nabe se voudrait le nouveau Bloy ou le descendant de Céline, mais il n'a ni la profondeur spirituelle et la méchanceté géniale du premier, ni le sens du tragique et la musicalité du second.

    Quant à Belle et bête de cette dame Iacub, que d'aucuns s'efforcent de tirer vers la littérature, comme s'y est employé Laurent Joffrin, directeur du Nouvel Observateur, condamné depuis lors sans que le livre ne soit retiré de la vente (une hypocrisie de plus !), il suffit d'en flairer quelques pages, publiée par le Nouvel Obs, pour s'épargner un examen plus approfondi alors même que toutes les circonstances de sa composition puent la fabrication de circonstances à seul fin de scandale et de fric. On sait d'ailleurs que la dame aurait elle-même regretté, dans un mail adressé à DSK, une machination à laquelle elle se serait prêtée. Tout cela dont je me contrefous, pour ma part, non sans prêter la plus vive attention à un autre micmac éditorial construit dans la dernière livraison de l'Obs lié à la pratique de l'autofiction, à ses "dommages collatéraux" éventuels et à ses retombés judiciaires.

    Dans quelle mesure un auteur a-t-il le droit d'impliquer nommément (ou sous un nom d'emprunt) ses proches ou ses connaissances dès lors qu'il a choisi de brasser la matière de sa vie "réelle". La question touche évidemment ce qu'on appelle aujourd'hui l'autofiction (terme à l'improbable définition et aux équivoques multiples), comme elle a touché le roman et les écrits intimes publiés ?

    Comme il m'est arrivé, personnellement, de publier plus de mille pages de mes carnets, incluant le plus souvent le nom de personnes vivantes sans la précaution des initiales (je laisse à d'autres la prudence cauteleuse et un peu tartuffe consistant à désigner "cet imbécile de N." ou cette peste de B."), je me suis souvent posé la question: de quel droit t jusqu'où ? Un ami, le cinéaste Richard Dindo, qui a lu mes carnets avec passion, m'a reproché un jour d'être trop explicite "par honnêteté", trop cruel par franchise, trop humiliant en exposant ainsi autrui, et je l'ai écouté. Après la publication de mon dernier livre, Chemins de traverse, je me suis reproché cependant de n'en avoir pas tiré assez de conséquence, en parlant trop durement de tel ou tel de mes proches avec lequel, à un moment donné, j'étais en conflit. En écrivant, je me disais que toute l'affection que je manifestais ailleurs au même personnage pouvait "supporter" ces réserves, en oubliant l'exposition que représente la publication. De drames privés très pénible que nous avons vécus, et que j'évoquais longuement dans mes carnets, j'ai tout retiré de ce livre, et cette réflexion vaudra plus encore pour la longue chronique sur laquelle je suis en train de travailler - on apprend...

    Cela pour dire que je me sens assez bien placé pour apprécier les dangers de toute interférence entre vie ordinaire et transposition littéraire, auxquels se mêlent aujourd'hui toute une spéculation, parfois sordide, sur les profits pécuniers que peut alimenter le recours à la justice, nouveau micmac.

    Le dossier de l'Obs sur les séquelles judiciaires de certains livres récemment parus, sous les signatures de Lionel Duroy ou de Christine Angot, nous apprend que les éditeurs font examiner certains ouvrages par des avocats avant de les mettre en circulation. Mais jusqu'où cela ira-t-il ? À vrai dire le serpent se mord la queue, qui n'a plus rien à voir avec la littérature. Au lendemain de la publication de L'enculé, Marc-Edouard Nabe déclarait à un journaliste qu'il espérait vivement qu'on le traîne en justice. Hélas on ne lui fit même pas cette fleur: son livre passa quasiment inaperçu. Or cette recherche de la publicité, via l'opprobre, est-elle plus défendable que les poursuites entamées par DSK contre Marcela Iacub, sous prétexte que sa "vie privée" se trouvait pour ainsi dire violée ?
    Reste qu'une bonne partie de la littérature et souvent de haute volée, se nourrit des "secrets" de la vie privée, qu'il serait vain ou absurde de censurer. Un Proust compose un personnage (disons Robert de Saint-Loup) en mêlant les "modèles" de dix de ses amis, mais rien n'interdirait aujourd'hui qu'un de ceux-là ne l'attaque en justice. On dira que l'autofiction ou les écrits intimes sont plus exposés à celle-ci, mais le passage à la fiction n'a jamais exclu les susceptibilités ou le goût du lucre de ceux qui croyaient se reconnaître dans un roman, et légiférer en la matière paraît difficile.

    Je préfère, pour ma part, interroger la sensibilité et le respect humain de chacun, qu'il soit auteur ou lecteur. Mais le climat général d'indiscrétion et de clabaudage, la curiosité vulgaire et l'exhibitionnisme relayés par les médias ne facilitent pas la juste appréciation des choses. La seule apparition de DSK triomphant, pour ainsi dire, au sortir du palais de justice où il a "fait la peau" de Marcela Iacub et du Nouvel Obs en invoquant son "honneur", achève de donner, à tout ça, son tour abject et néanmoins intéressant, par delà toute morale, pour un romancier...

  • Ceux qui voient clair

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    Celui qui fuit les hyènes de la haine collective / Celle qui se dit agoraphobe pour éviter de se frotter à trop d'abrutis sur une surface trop étroite genre Salon du Livre / Ceux qui évitent de dépendre socialement de trop de pesants philistins et autres cadres bipolaires / Celui qu'intéresse la perception de la méchanceté de classe que ressaisit Le Droit du plus fort de Rainer Werner Fassbinder / Celle qui repère les éléments de la tragédie contemporaine même noyée dans les anecdotes de tabloïds / Ceux qui noient le poison dans le sirop frelaté de la pensée positive / Celui qui sait que la seule nouveauté réside dans la perception contemporaine d'un Sens et d'une Forme fondus en unité et dégagés des fioritures postmodernes ou pseudonéo d'une simili-culture tournant à vide / Celle dont les livres politiquement corrects dorlotent tout un public avide d'être "dérangé" dans le sens du poil / Ceux qui trouvent du réconfort à se rappeler qu'eux aussi ont lancé quelques pavés "à la grande époque" / Celui qui vit la projection de L'Année des treize lunes de Rainer Werner Fassbinder comme une séance d'électrochocs irradiant sa lucidité / Celle que tous ont rejetée avant d'en faire une martyre volontiers évoquée en fin de party / Ceux qui prennent tout sur eux et signent des films sous les noms de John Cassavetes ou Pier Paolo Pasolini ou Rainer Werner Fassbinder / Celui qui constate qu'il n'est point de tragédie contemporaine sans éléments humoristiques genre Deschiens / Celle qui lit Schopenhauer entre deux oraisons dans le jardin silencieux du couvent / Ceux qui entendent la voix d'un ange dans le chaos infernal de la Love Parade / Celui qui tire du tohu-bohu démoniaque de sa vie un poème cinématographique d'une vérité divine / Celle qui sait très exactement ce qui distingue le kitsch de la poésie qui se veut poétique de la vraie poésie surgie de son manque / Ceux qui parlent culture ou littérature ou musique ou peinture ou cinéma sans rien sentir du jazz qu'il y a là-dedans - ou du rap ou du plain-chant ou du cri ou des larmes ou du mort-de-rire qu'il y a là-dedans / Celui qui sait, comme Flaubert jugeant de Premier amour de Tourguéniev, devant quels plans ou quelles séquences de L'Années des treize lunes de Rainer Werner Fassbinder on peut murmurer "voilà du sublime !" / Celle qui convient ce matin vert clair comme ses yeux que le 97% de la littérature actuelle, le 98% de la musique et de la peinture actuels, et le 99% du cinéma actuel se réduisent à un entassement d'objets de divertissement ou d'abrutissement relevant à brève échéance des déchets encombrants / Ceux qui préfèrent les conteurs paniques genre Cassavetes et Fassbinder aux poètes puritains genre Godard au motif que ceux-là sont des tendres qui racontent des histoires aux enfants qu'ils bordent / Celui qui a aimé dans la vie ce qu'elle avait de vivant /Celle qui savait que son fils se donnerait à mort avant de mourir jeune / Ceux qui disent à ceux qu'ils aiment qu'on n'aime jamais assez mais qu'on peut mourir d'aimer trop ou de ne l'être pas assez, etc.

    Fassbinder12.jpg (Cette liste a été inspirée par L'Année des treize lunes de Rainer Werner Fassbinder, film-exorcisme d'une beauté convulsive et d'une insondable vérité émotionnelle sur fond de glaciation sociale, que Werner Schroeter a probablement raison de dire le plus personnel et le plus librement inspiré de son ami l'ange noir)

  • La pièce la plus nulle !

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    René Zahnd et Thierry Tordjman "remerciés" à Vidy. Belle gratitude de nos responsables de la culture et d'une Fondation se la jouant "franchement en coulisses". Est-ce la fin de l'esprit de Vidy ? C'est en tout cas la pièce la plus nulle programmée depuis la fondation du théâtre au bord de l'eau...

    Zahnd.png"D'une incroyable brutalité !". Tel est le SMS que j'ai reçu l'autre soir de mon compère René Zahnd, compagnon de route de plus trente ans qui m'annonçait dans quelles circonstances lamentables lui et Thierry Tordjman venaient d'être "virés" de Vidy dès août prochain. L'esprit de Vidy, insufflé au théâtre au bord de l'eau par René Gonzalez, l'autre René et une belle équipe, mais aussi par un public exceptionnellement fidèle et fervent, survivra-t-il à ce nouvel épisode d'une vilain feuilleton amorcé avec la succession "jouée d'avance" de Gonzalo ? N'en jugeons pas avant l'arrivée du nouveau directeur, Vincent Baudriller, mais le moins qu'on puisse dire est que ce prélude inélégant au possible, manigancé de concert avec la Fondation pour le théâtre, confirme la mauvaise impression laissée par les circonstances de sa nomination. Passons sur le détail d'une politique culturelle à très courte vue...
    Pourtant il faut rappeler que le Théâtre de Vidy, sous la direction de René Gonzalez , était devenu en vingt ans l'un des foyers de création les plus actifs en Europe. En Suisse, c'était la maison qui "tournait" le plus dans le monde. Economiquement solide et plus encore féconde culturellement, à l'ère de l'esbroufe et de la starisation, Vidy restait une maison à figure humaine comme l'ont appréciée les plus grands créateurs qui y ont passé, de Lars Norèn à Thomas Ostermeier, entre tant d'autres. Surtout, l'institution, au même titre que le théâtre Kléber-Méleau de Philippe Mentha, entretenait un climat d'émulation et de découverte largement partagé par les passionnés de théâtre au sens large.
    Comme on a pu le constater en dehors de tout "copinage", les proches de René Gonzalez avaient très bien pris la relève et assuré l'interim. Qui plus est, ils continuaient d'entretenir des rapports de confiance avec de nombreux directeurs de théâtre européens avec lesquels, par ailleurs, divers projets restaient en cours. Bien entendu, Thierry Tordjmann et René Zahnd n'avaient pas un droit automatique à la prolongation de leur mandat. Mais la muflerie torve, la façon cauteleuse avec laquelle ils viennent d'être virés, plongeant toute l'équipe de Vidy dans la stupeur, n'augure de rien de bon...

  • Ceux qui procrastinent

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    Celui qui a mis ses petits pas dans les grands / Celle qui a une touche avec le wattman / Ceux qui en pincent pour Omar / Celui qui a mangé tous ses coupons / Celle qui stocke les exos / Ceux qui ont un ticket d’enfer pour le Paradis /Celui qui se garde pour plus tard / Celle qui se dit qu’après ce sera trop tard / Ceux qui découvrent soudain l’énormité du présent / Celui qui voit enfin le ciel entre les barreaux de sa cellule virtuelle / Celle qui comprend le silence du père / Ceux qui se taisent devant l’arbre / Celui que tant de clabaudage insupporte / Celle qui anticipe le fatal bilan provisoire / Ceux que la vie à Anchorage n’encourage pas tant que ça ma foi / Celui qui nettoie ses pinceaux / Celle qui se décide enfin à passer à l’Acte / Ceux qui ne disent rien ni ne consentent qu’on le sente / Celui qui travaille du chameau / Celle qui préfère ne rien faire et plutôt demain / Ceux qui ont peur d’arriver trop tôt / Celui qui défie toute curiosité / Celle qui voudrait en savoir plus sur le célibataire maltais / Ceux qui échappent au piapia à renfort d’airs mauvais / Celui qui dit présent en s’esquivant / Celle qui s’y met sans crier gare / Ceux que la diversion ne distrait plus / Celui qui ne fait plus que défaire / Celle qui ne fait plus que différer les défaites / Ceux qui renoncent à ne rien faire faute de mieux / Celui qui voit tout sans voir / Celle qui contemple sans regarder / Ceux qui ne trouvent pas les mots pour exprimer ce qu’ils voient et qui se mettent donc à la peinture sur le tard / Celui qui sait que son heure ne viendra pas sans lui / Celle qui déjoue les vertiges de l’Aporie / Ceux qui feront tout leur possible demain si bien qu’aujourd’hui c’est impossible et d'ailleurs pas français / Celui qui répond à la question de l’Ici et du Maintenant par une réponse qu’il donnera là-bas une autre fois / Celle qui se met fissa à son job de dactylo manchote / Ceux qui ont chanté Dactylo Rock avec Erik Orsenna mais c’était avant l’Académie, etc. Peinture: Zdravko Mandic.