Viva Riva, du Congolais Djo Munga, est le film le plus attendu du 7e Festival Cinémas d'Afrique, à Lausanne. La vierge sensitive, la vieille dame candide et l'enfant innocent ne devraient pas y être confrontés. Trés sombre et très violente histoire que celle de ce flambeur flambé...
C’est un film à la fois superbe et terrible que Viva Riva, dont la force expressive des images n’a d’égale que l’efficacité descriptive des situations, à valeur implicite de critique frisant le cynisme. On pense au « bout de la nuit » de Céline, aux films américains les plus noirs (jusqu’à Abel Ferrara ou Tarantino, sans la dérision parodique) en suivant les tribulations de Riva, revenant d’Angola à Kinshasa avec un camion de fuel aussi explosif qu’une bombe. Le chaos local est immédiatement perceptible à l’image . La violence des rapports humains, exacerbés par la convoitise, s’incarne dans les malfrats rivaux qui vont donner la chasse à Riva. Celui-ci ne pense qu’à jouir de son fric, dont il croit qu’il lui donne un droit de cuissage immédiat sur la fascinante Nora. Celle-ci, dans une belle scène, le met en garde contre le pouvoir corrupteur de l’argent. Mais elle-même est corrompue, autant que la commandante trafiquant avec le diabolique homme en blanc qui fait massacrer le maléfique homme en rouge, avant que le prêtre – plus corrompu que tous – ne soit abattu à son tour. Au cœur de ces ténèbres flamboyantes, la sensualité torride des images n’exclut pas des éclaircies de tendresse, mais la machine infernale s’emballera au lieu de se cabrer devant les parents de Riva invoquant leur éducation de gens dignes et honnêtes, avec la même véhémence que la sœur de Riva vitupérant son jules pourri.
Un petit marchand de capotes, seul enfant attaché aux pas de Riva, survit à la fin atroce de celui-ci - transformé en torche vivante -, donnant une touche d’espoir infime à ce tableau désespéré quand il repousse le sac de fric qu’il trouve dans le camion cramé et mime, comme dans un véhicule-jouet, le départ vers quelque ailleurs improbable.
Superbes acteurs, narration vigoureuse mais sans effets factices. On ne « dénonce » pas mais on montre, et cela fait mal à l’humanité – très mal ! Mais l'humanité n'est-elle que cela ?
Djo Munga. Viva Riva. Cinémathèque suisse, Salle des fêtes, le samedi 25 août, à 14h. Et le dimanche 25 août, au Cinématographe, à 13h. Séances en présence de l'acteur principal, Patsha Bay.
Cet article a paru ce matin en complément d'une page consacrée au cinéma congolas en voie de recomposition (?) dans le quotidien 24 Heures.