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Orlando ou le sexe d'un ange

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Au Théâtre de Vidy, la magie de Virgina Woolf opère en finesse.

Orlando fut un homme jusqu’à trente ans, puis il s’endormit et se réveilla femme. Orlando fut un jeune homme entreprenant à la prestigieuse époque élisabéthaine, puis, jeune femme, il quitta le monde entre les deux guerres mondiales du XXe siècle. Orlando est l’impossible fait Anglais, ou plus précisément : poésie anglaise, entre magie shakespearienne, baroque pré-romantique à la Tristram Shandy (protagoniste du chef-d’œuvre de Laurence Sterne) et lyrisme à la fois intime et cosmique de Virginia Woolf. Orlando est à la fois une farce et une traversée émouvante du temps des siècles et des cœurs. Paru en 1928, ce roman-poème génial (lire encadré) ne semble pas a priori un objet littéraire fait pour le théâtre, tant il foisonne. Et pourtant, après une adaptation de Bob Wilson, avec Isabelle Huppert, qui n’a pas laissé un immortel souvenir à Vidy, une jeune troupe israélienne, emmenée par le metteur en scène Amit Drori, relève à son tour le défi pour en tirer une représentation à la fois originale et fidèle à l’esprit autant qu’à la lettre du texte, heureusement donné en anglais avec un surtitrage français intelligible. La représentation qui en résulte, tenant de la «performance» plasticienne plus que du théâtre ordinaire, en impose autant par l’orchestration de ses beautés que par sa « musique » intérieure en crescendo, après un début quelque peu maniéré et flageolant.
Rien de « magique » là-dedans au demeurant, mais un impressionnant artisanat collectif , réglé par une équipe de «techniciens» maîtrisant les apports combinés de la scénographie et des appareils (Noam Dover et Amit Drori), autant que de la lumière et des images vidéo très évocatrices (Jackie Shemesh). Dans cet environnement visuel et sonore figurant alternativement les fastes orientaux de Constantinople ou les brouillards de Londres, Orlando, qui est à la fois son propre biographe et le personnage de cette épopée lyrique, est incarné à fleur de sensibilité par la comédienne androgyne Sylwia Trzesniowska-Drori, qui se coule gracieusement dans les avatars successifs de son personnage. « Tout » Orlando n’est certes pas là, mais ce qui y est filtre bel et bien l’essentiel…

Lausanne. Théâtre de Vidy, Salle de répétition, jusqu’au 1er février. Lu—sa, à 19h.30. Di 18 janvier et lu, relâche. Di 25 janvier et 1er février, 18h.30. Réservations : 021 619 45 45, www.vidy.ch et librairie Payot.


Un charme shakespearien

Virginia Woolf doutait un peu, à la fin de la composition d’Orlando, liée à son amoureuse amitié avec Vita Sackwille West, du bien-fondé d’un texte « trop long pour une farce et trop frivole pour un livre sérieux », pronostiquant un désastre éditorial à l’époque même où elle prononçait des conférences sur le concept d’androgynie. « Peut-être, disait-elle alors, un esprit exclusivement masculin est-il aussi incapable de créer qu’un esprit exclusivement féminin ». Le public la rassura aussitôt, qui fit fête à ce récit pénétrant et débridé, qui garde aujourd’hui toute sa poésie et tout son mordant satirique, notamment à propos de ce vieux radoteur annonçant, à l’époque de Shakespeare, la fin de toute littérature…

Virginia Woolf. Orlando. Livre de poche Biblio, 317p.

Commentaires

  • Bonjour JLK,
    Je garde un souvenir émerveillé de l'adaptation et de la mise en scène qu'en avait proposé Bob Wilson avec Isabelle Huppert, il y a bien dix ans déjà... Votre billet est une belle invitation à voir cette nouvelle approche... Ce sera un peu loin pour moi... Mais ce ne serait sans doute pas mal de relire le texte, pour commencer...

  • A bientot en commentaire, merci pour cet article

  • Merci pour cet article

  • Excellent, merci

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