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De la Révolution du lapin à la foi qui tue, avant Pâques…

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(Le Temps accordé, lectures du monde 2022)
 
(Pour Olivier Morattel, dit le Kangourou)
 
À la Maison bleue, ce samedi 26 mars. – L’ami Quentin me «texte» ce matin que la lecture du catalogue de la firme vestimentaire PKZ «incline» à la Révolution plus que la lecture de Karl Marx (1818-1883), et je lui réponds illico, via Messenger, que j’abonde d’autant plus en son sens matinal que je suis en train de prendre connaissance, par un « tous ménages » reçu l’autre jour, de ce que nous offre telle autre firme d’achats par
correspondance, à l’enseigne de Maison-et-confort, à l’approche de Pâques, en sorte d’enluminer notre quotidien et de nous préparer à la célébration ludique du Lapin.
« Une déco sympa ! » est la première incitation de cette dernière livraison richement illustrée et dont tout poète un peu sérieux devrait assimiler la rhétorique joyeusement positive, par exemple en conseillant l’achat (seulement 29.95 CHF au lieu de 44.95 CHF donc vous économisez 33%) du «Tronc d’arbre illuminé» genre souche évidée dans laquelle se trouve Monsieur et Madame Lapin (Madame Lapin tient un ouvrage sur ses genoux tandis que Monsieur Lapin se tient en position de veille attentive), les deux figurines se trouvant éclairées de l’intérieur par un capteur solaire à recharge naturelle possible vu que cette «décoration inaltérable» peut-être installée dans la jardin et pourra briller encore le soir et créer ainsi « une ambiance chaleureuse ».
Or l’« ambiance chaleureuse » se dispense de multiples façons par la firme Maison-et confort, et sans doute nos compatriotes solidaires y verront-ils un encouragement à penser à leurs soeurs et frères ukrainiens avec « Grand-maman mouton » d’une hauteur de 38 centimètres et disposant d’un détecteur de mouvement, ou, en cas de deuil (fréquent et pas seulement en état de guerre), le « petit ange de miséricorde blanc en résine inaltérable et illuminé, là encore, par l’énergie solaire, etc.
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Le vrai Quentin Mouron. – Quentin pas plus que moi ne nous moquons du kitsch, dont le langage est aujourd’hui omniprésent, y compris chez les «rebelles» de l’intellect se croyant au-dessus de ça, et c’est pourquoi j’apprécie son dernier recueil de poèmes intitulé Pourquoi je suis communiste, dont nous parlions l’autre jour sur le ponton de L’Oasis, sous « éclairage naturel » et en dégustant d’authentiques filets de perches lémaniques débarqués en début de semaine de Pologne via le Japon.
D’aucunes (et d’aucuns, ne les oublions pas), surtout les poétesses exfiltrées du calvinisme et les conseillères en psychologie de crise, se représentent Quentin Mouron, le plus en vue de nos jeunes auteurs - quoique moins mondialement adulé que notre ami Joël D. (nom connu de la rédaction) - comme une sorte de bluffeur cynique se la jouant dandy voire «influenceur» sur les réseaux, mais ni sa regrettée mère-grand Jeannine (1934-2021) ni ses mère et père, ni le Kangourou (son éditeur) ni moi n’avons jamais été dupes de cette image sciemment et lucidement construite par l’auteur d’Au point d’effusion des égouts et de Notre-Dame de la merci, ses premiers écrits immédiatement marqués au sceau d’une rébellion lyrique et affective discrète et signalant (c’est mon analyse) une hypersensibilité à la falsification du rapport liant les mots aux choses, tant qu’à la fragilité des rapports humains et général et amoureux en particulier, etc.
Pourquoi je suis darbyste. – En 1985, mes amis Renaud et David (prénoms fictifs) ont revêtu leurs «habits du dimanche» avant de se perfuser ensemble en laissant une lettre d’adieu à leurs proches, incitant ceux-ci à penser qu’ils avaient librement et sereinement choisi d’«entrer dans la joie» ensemble. Renaud était alors en phase terminale de sida, auquel David avait échappé.
Or, à leur enterrement, le père de David, très digne puritain portant haut la très stricte morale des darbystes (cf wikipédia pour la définition précise de cette secte calviniste), loin de surenchérir à propos du présumé Péché dans lequel vivaient, au jour le jour et au su de tout le monde, les deux boyfriends, nous dit tout haut ce que nous pensions avec moins de noble effort que lui, que « devant tant d’Amour on ne pouvait que s’incliner».
Et c’est pourquoi, l’autre jour, sur le ponton de L’Oasis, moi qui me suis éloigné de la secte communiste dans ma vingtaine, à équidistance ensuite de notre protestantisme familial et d’un catholicisme plutôt littéraire (spirituellement proche d’une Flannery O’Connor ou d’un Bernanos, d’une Annie Dillard ou d’un Charles-Albert Cingria qui se disait catholique évhémériste…), me présentant parfois en chrétien mécréant en pensant à mon ami Tchekhov, et désormais au-delà de toute appartenance comme le fut probalement le rabbi Iéshoua, je me suis dit: va pour ton communisme angélique, mon petit Quentin, moi je me dirai désormais darbyste malicieux en me référant autant à l’Ancien Testament (ma mère-grand Louise, portée sur le « vanité des vanités » de L’Ecclésiaste ) qu’au Nouveau Testament (notre Grossmutter lucernoise Agathe au cœur grand comme celui de son Seigneur), et si Dieu n’accueille pas Snoopy dans son Arche c’est, merde à le fin, qu’il n’existe pas…
 
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Fous de Dieu ? – Sans nous concerter plus que ça, malgré deux ou trois échanges à ce propos, Quentin et moi avons lu, ces dernières années, les écrits du penseur et vélocipédiste allemand Peter Sloterdijk, à mes yeux le philosophe-artiste-érudit européen le plus intéressant de ce temps, avec feu René Girard, dont les écrits touchant à la religion, dans La Folie de Dieu et, plus récemment, dans Faire parler le ciel, inaugurent ce qu’il appelle une «théopoésie», à l’écart des théologies dogmatiques.
Aujourd’hui encore, notre jeune femme de ménage érythréenne déplace régulièrement deux gros livres en briquant notre salle de bain par ailleurs fort exiguë, respectivement l’Histoire générale de Dieu de Gérald Messadié et le deuxième volume des Oeuvres complète de Balzac.
Mais ceci relevé ce n’est pas d’hier que je m’intéresse aux occurrences du besoin humain de divinité, puisque mes lectures d’adolescent et de jeune grappilleur (Camus à 14 ans, Bernanos et Mauriac, à 15 ans, Dostoïevski et Chestov à 16 ans, Berdiaev à 17 ans, Chestov et Simone Weil à 18 ans, Chesterton et Cingria à 20 ans, Annie Dillard et tous les autres, etc.) ont marqué mon sentiment du monde «à vie», qui me sensibilise particulièrement quand j’apprends que le patriarche de Moscou bénit les bombes du néo-communiste social-fasciste Vladimir Poutine ou qu’une famille se jette du septième étage d’un balcon au motif subodoré mais à confirmer de «complotisme» survivaliste, des monceaux de vivres étant entassés dans «l’appartement maudit» – et comment ne pas penser à une folie d’ordre «divin» devant cette immolation absolument absurde ?
Enfin, passant tout à l’heure au pied de «l’immeuble maudit», après avoir longé avec Snoopy les quais irradiant l'insouciance et la fraîcheur printanière, j’ai constaté, non sans stupeur, que le balcon du septième d’où les malheureux se sont jetés jeudi matin est très précisément celui de l’appartement que nous avons visité en 2019, avec Lady L., auquel nous avons renoncé pour motif de cherté excessive et de premier plan (les toits du casino) plombant la vue sublime du plan élargi sur le lac, les montagnes et le ciel qu’on hésite à «faire parler» en de tels cas…

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