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La France que nous aimons

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Chemin faisant (153)

Lumière de Vendôme. – Nos jeunes camarades de Nuit debout disposent, paraît-il, d’un « pôle médiation » et d’un « pôle sérénité », entre autres instances  d’apaisement relationnel au niveau de la communication. Il paraît que c’est une nouvelle façon d’acclimater le « vivre ensemble », et nous leur présentons nos sincères condoléances, vu que la nuit finira par se coucher quand nous serons debout dans le plein jour de la douce France qui est, parfois, si jolie, comme disait le poète à propos de notre mère la terre.

BABEUF.jpgVendôme en fin de matinée est un paradis de présence douce où tous les temps de l’Histoire se conjuguent, avec une forte empreinte de roman et de gothique, le souvenir du Bourdon de l’abbatiale qui a perdu sa voix en 1994, celui du jour où Gracchus Babeuf s’est fait tirer de son ergastule et traîner jusqu’à l’échafaud, les reflets pensifs dans les eaux lentes d’un bras du Loir, un pêcheur qui n’a cure d’aucun « pôle de sérénité », et le buste deBalzac qui nous rappelle que le grand queutard a fait ses écoles ici même.

Unknown.jpegLe corps du gros. – Si j’évoque la puissance sexuelle de l’énorme romancier, c’est dans la foulée d’EmmanuelCarrère qui s’y arrête, au fil de superbes pages de son journal reprises dans Il est avantageux d’avoir où aller intitulées Deux mois à lire Balzac, à propos d’un retour qu’il a fait à la Comédie humaine, découverte avec passion en son adolescence, abandonnée et reprise avec un accent porté sur la présence physique de l’écrivain lui-même, trônant comme au cabinet au milieu de ses personnages et ne cessant de nous suggérer entre les lignes, inquiet autant qu'insistant, qu’il a « la plus grosse »...

 

DSCN1975.jpgJe nous ai lu ces pages extrêmement intéressantes, qui impliquent les fluctuations de nos rapports avec une œuvre à travers le temps et notre relation plus ou moins intime avec un auteur (Oscar Wilde a pleuré après le suicide de Lucien de Rubempré comme s’il avait perdu un amant…), entre Vendôme et Nevers.

Or cette région sublime de France plate, entre Beauce et Sologne, Chartres et Cluny (grosso modo, n’est-ce pas), est sillonnée par tous les chemins d’allers et de retours des romans de Balzac, via Paris et la vallée du Lys, que la vieille douceur de Vendôme, au bord du Loir, concentre autant que celle de Nevers, au bord de la Loire.

DSCN1861.jpgDe pierre blanche et d’ardoise. - Franchement, sans vouloir vexer nos amis Bretons, nous préférons, Lady L. et moi, la pierre blanche douce au derme de l’Anjou, à celle, presque noire, des bourgs de la rive atlantique septentrionale, du côté de Roscoff. Les église bretonnes sont émouvantes et nimbées de mystères celtiques, mais la France de Ronsard et du flamboyant gothique irradie bonnement, de Blois à Amiens  ou en ces alentours de Vendôme et de Nevers, avec quelque chose de plus central, de plus fruité et de plus flûté. 

 

Cela étant, comme Emmanuel Carrère le dit de son goût changeant pour Balzac, nous pourrions affirmer le contraire tout à l’heure, mais « tout à l’heure est tout à l’heure et ce n’est pas maintenant », claironnait déjà Charles-Albert Cingria...

Bref, nous aimons ces vestiges d’une France remontant à la plus haute Antiquité (de la roche de Solutré se trouvaient précipités des chevaux vivants comme dans les feu les sacrificiels fils d’Aztèques) et dont on retrouve maintes traces  un peu partout tandis que la loutre éternelle, au bord de la Loire, le soir, guette le poisson et que l’hirondelle, infoutue de passer la nuit debout, tournique au ciel du printemps revenu…  

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