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  • Yves Bonnefoy en nos murs

     

     

    Bonnefoy.jpgYves Bonnefoy reçoit, demain à Lausanne, le Grand Prix de Poésie Pierrette Micheloud 2011.

    C’est l’un des plus grands poètes de langue française, cité parmi les papables du Nobel de littérature, qui se trouve honoré à Lausanne pour l’ensemble de son œuvre. Auteur de plus de cent ouvrages incluant des recueils de poésie et de proses poétiques, des essais sur des écrivains et des artistes (de Rimbaud à Giacometti en passant par le peintre valaisan Palézieux, Goya ou Masaccio), et de nombreuses traductions de Shakespeare, Yeats, Pétrarque et Leopardi, Yves Bonnefoy pourrait être qualifié de maître veilleur du langage. Poète exemplaire de la présence au monde vécue à tous les degrés de l’intuition sensible, de la connaissance et de la méditation sur la dégradation du lien verbal,  Bonnefoy oppose ainsi la parole du  poète au discours unidimensionnel de l’idéologue, déclarant « que la poésie est, de ce fait, le complément naturel du projet de démocratie – ce droit de chacun à sa parole – et la condition nécessaire à son véritable plein exercice ».

    Pour mémoire, rappelons que l’auteur de L’Heure présente, mélange de poèmes et de proses qui vient de paraître au Mercure de France, est né à Tours en 1923 et qu’il fut un compagnon de routes des surréalistes avant de tracer sa propre voie singulière, marquée par un premier recueil paru en 1953 sous le titre Du mouvement et de l’immobilité de Douve. Un autre livre significatif doit être signalé, intitulé L’Arrière-pays et constituant une réflexion poétique de haut vol à caractère autobiographique.

    Au point de rencontre de la littérature et des arts, Yves Bonnefoy a noué des amitiés tous azimuts avec des écrivains et des artistes  de notre temps, de Philippe Jaccottet à Pierre Alechinsky, Jean Starobinski, Bram Van Welde ou Zao-Wou-ki. Très présent dans l’édition littéraire française et souvent invité par les universités de nombreux pays, le poète-essayiste tint une chaire au Collège de France dès 1981. Déjà lauréat du grand prix de poésie de l’Académie française et du prix Balzan, notamment, il recevra aujourd’hui, à Lausanne, le Grand Prix de poésie Pierrette Micheloud, d’un montant de 30.000 francs, à l’initiative de la Fondation Pierrette-Micheloud que dirige Jean-Pierre Vallotton. C’est avec celui-ci, président du jury, que s’entretiendra ce soir Yves Bonnefoy.

    Lausanne, Café-théâtre Le Bourg, rue de Bourg 51, le 18 octobre à 19h. Entrée libre.

     

  • Le coup de foudre de Jimmy

     Parramore4.jpgJimmy Parramore chante un coup de foudre qui a duré trente ans

    « Nous avons eu beaucoup de chance », aime à dire et répéter James Parramore, alias Jimmy, au soir de son (grand) âge qui fleure la  jeunesse à rallonge. Il y a, chez cet octogénaire à dégaine d’éternel  bohème, du viveur à la Henry Miller et, par mimétisme de navigateur, du Zorba méditerranéen, aussi à l’aise à Ibiza que dans tel petit port d’Anatolie  où il se fit un ami, un soir, du tenancier du troquet du coin, rien qu’à identifier tel morceau de Stéphane Grappelli et tel autre d’un jazzman aimé des deux compères. Cinq étés durant, il a fait le tour de la Grande Bleue à bord d’un voilier baptisé Robe de Chine, avec l’amour de sa vie, prénom Françoise. Et c’est pour Françoise, aujourd’hui, quatre ans après qu’elle lui a été arraché par la maladie, que Jimmy sort un CD au doux murmure mélodieux, pas loin de  Gainsbourg, entouré des meilleurs musiciens qu’on puisse trouver dans nos contrées, tels Antoine Auberson (saxo), Pierre-François Massy (contrebasse) ou Lee Maddeford (piano), notamment.

    Dans l’appartement sédunois où ils s’étaient retrouvés après maints périples, Françoise est partout, ici varappant aux Ecandies, là tous cheveux au vent sur le voilier, toute nue plus souvent qu’à son tour et même à son chevalet d’accro de peinture. « Une belle nature », a-t-on envie de dire rien qu’à la voir en photos ou à la retrouver dans la profusion de couleurs de ses rêves éveillés où la mer, les chats, les corps semblent danser entre la vie et la nuit. On en oublierait presque son absence, et d’autant plus que Jimmy la ressuscite à tout moment, fût-ce les larmes aux yeux et la gorge serrée, quand il évoque les lendemains de la vente du voilier, quand Françoise sanglota : « Ce bateau, c’était nous… » Ou, deux mois après sa mort, lorsque, terrassé par le blues, il jeta sur le papier les paroles et la musique de son Coup de cœur

    Quand il évoque la chance qui lui a souri, Jimmy Parramore ne parle pas que de son coup de cœur. Parce que la chance, il l’a connu dès ses premières années de petit Ricain fils de médecins, dont la profession l’a protégé des rigueurs de la Crise de 1929 avant de relancer sa seconde vocation, la première étant celle de pilote. Or la chance était, aussi, au rendez-vous du chasseur de la guerre de Corée accomplissant ses cent missions réglementaires sans être touché par la DCA. Ensuite, autre coup de pot : que la mère de James, rejoignant son aviateur de fils  stationné en France avec son unité, l’emmène un jour en Suisse pour voir de plus près le Cervin, lui offrant du même coup un autre coup de cœur de longue durée pour Lausanne.

    C’est en pensant, malin, à Paris et aux mythiques caves de Saint Germain-des-Prés, qu'il était parti pour la guerre de Corée, sachant que sa prochaine affectation serait la France. Mais en lieu et place du Tabou de Boris Vian, ce fut sur le Barbare lausannois qu’il tomba, immédiatement séduit par notre bonne ville autant que  par les filles du pays célébrées par Godard, au point de s’établir en nos murs pour y faire sa médecine. Anesthésiste en retraite, il remarque à présent que sa spécialité était proche de celle du pilote de chasse : « Tu dois faire bien gaffe, au départ et à l’arrivée !»…

    Le visage buriné de Jimmy Parramore, ses petits yeux clairs et vifs, sa douceur sans rien d’onctueux, ses gestes restés souplement décontractés malgré ses putains de genoux qui grincent, sont d’un homme qui « a vécu », comme on dit. Et ce n’est pas fini !

    Sa chance est, aussi, d’être resté proche de ses deux filles d’un premier mariage, Estelle et Wendy. Chance aussi d’avoir des tas d’amis « au rendez-vous des artistes », pour reprendre le titre d’une de ses chansons. Chance d’avoir plein de beaux souvenirs d’amour, autour du feu central de son coup de cœur, ou d’amitiés sous tous les soleils. Chance enfin de pouvoir chanter sa chance, avec les mots et les mélodies qu’il a lui-même arrangées avant de les confier à ses potes musiciens – chance de pouvoir dire si bien enfin : merci la vie !        

     

    Jimmy07.jpgJimmy Parramore, Un coup de foudre, Pour Françoise.CD. JP Productions.

    Site de Jimmy Parramore : http://www.jimmyparramore.com


    Photo de Jimmy Parramore: Sedrik Nemeth. Ici, avec un autoportrait de Françoise Parramore.