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Femme de coeur et de mémoire

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Veuve est honorée à la Jacqueline Veuve est honorée par la Cinémathèque suisse, à Lausanne, avec une rétrospective et la projection de son dernier film, « C’était hier ».

 

On voit d’abord le beau château de Lucens, au second plan d’un magnifique champ de fleurs jaunes, tandis qu’une voix féminine égrène Le Temps des cerises. Puis arrivent une quinzaine de vieillards débonnaires, derniers représentants d’une classe de « primaire supérieure» photographiée il y a plus de septante ans de ça et qui se retrouvent, plus ou moins fringants. 

Tel est le décor et tels seront les acteurs  d’une remémoration qui va faire alterner deux récits : d’une part, la vie à Lucens durant sept décennies, fortement marquée par le développement puis le déclin de l’industrie locale des pierres taillées pour l‘horlogerie et la joaillerie, et, d’autre part, le leitmotiv des passages du Tour de Suisse cycliste dans la bourgade vaudoise, dès 1937 où brillait le nom du fringant Léo Amberg, vainqueur de l’année en question. Or, mêlant documents d’archives (photos ou films) et témoignages filmés aujourd’hui, au fil d’un montage vif et jamais pesant, Jacqueline Veuve ajoute, à son palmarès déjà impressionnant, un film à la fois très personnel et très intéressant par son approche d’une communauté contrastée (riches et pauvres cohabitant parfois durement) et en butte à l’évolution économique et sociale.

À l’écoute

La double force de Jacqueline Veuve, entre autres qualités de grand artisanat cinématographique, a toujours été son objectivité, du point de vue social, et son empathie humaine. Issue de la bourgeoisie locale (son grand-père est capitaine d’industrie, qui dirige la fabrique Reymond et caracole fièrement à cheval), elle documente la vie des ouvriers dont le témoignage de certains n’est pas tendre. Dureté de conditions de travail, sévérité de la redoutable Mademoiselle Emma dont le mot d’ordre est « travail, travail, travail », salaires précaires, mobbing occasionnel : les faits sont là, sans donner lieu pour autant à un réquisitoire.

Car Jules Reymond, comme le fameux industriel Louis-Edouard Junod  chez lequel il s’est formé, fait de son mieux à la tête d’une entreprise de type « familial ». Des logements sociaux, diverses associations d’intérêt public et l’attention occasionnelle de Madame Reymond (une bûche pour le Noël des plus pauvres) complètent un tableau nuancé. Telle dame  dira qu’elle a vécu « au paradis » chez les Reymond. D’autres durciront le trait. Résultat pour tout le monde aujourd’hui : de la taille de quatre  pierres à l’heure par ouvrier, on est passé à 10.000 pièces au laser. Et le « cimetière industriel » des Reymond est à vendre sur Internet…

Et c’est demain… 

Pas plus que dans ses autres films, Jacqueline Veuve ne distille de nostalgie sucrée. Le contraste de la couleur actuelle et du noir/blanc capte les charmes de chaque époque, ici avec une évocation de la bicyclette passant de l’objet de luxe au véhicule « popu », là en commentant l’évolution du Tour de suisse par la voix d’un vieux passionné de la petite reine. Et l’attention portée sur la désaffection progressive d’une grande fête de naguère, à l’Ascension, va de pair avec l’apparition finale, sur un balcon de la gare, d’une famille de jeunes Noirs. Nulle aigreur au demeurant, mais voilà, semble dire Jacqueline Veuve : c’est comme ça. Or c’est ce type de constats qu’on retrouve, en aval, chez plusieurs jeunes cinéastes romands, tel le Lionel Baier de Celui au pasteur ou tel le Jean-Stéphane Bron de Connu de nos services. Est-ce à dire que la doyenne du cinéma romand ait fait école ? Disons plutôt qu’elle a montré l’exemple d’un regard non partisan, laissant les faits parler par eux-mêmes…  

 À la Cinémathèque

• C'était hier (2010)

 Avant-première romande: Mardi 3 octobre, 17h
à la Cinémathèque suisse, Lausanne
dans le cadre d'une Rétrospective Jacqueline Veuve
(toutes les projections en présence de la cinéaste)

La mort du grand-père (5 octobre 18h30 )
Jour de marché (10 octobre, 18h30)
La nébuleuse du cœur (12 octobre, 18h30)
La petite dame du Capitole (en avant-programme:
Irène Reymond, artiste peintre; 17 octobre, 18h30)
Un petit coin de paradis (19 octobre, 18h30)

Sortie en Suisse romande : 6 octobre 2010
Sortie en Suisse allemande : 10 février 2011

 

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