De la douce folie. – Et ce matin tu t’abandonnerais une fois de plus à l’étreinte de ton vrai désir qu’annonçait le conditionnel de vos enfances, tu serais tout ce que tu aimerais, tu serais une chambre merveilleuse au milieu de la neige revenue ce matin avec une quantité de téléphones, tu aurais des bottes bleues et un banjo comme à sept ans et tu retomberais amoureux pour la énième fois, elle aurait les yeux bleu pervenche de la fille du shérif de tes dix ans et des poussières et de la femme de ta vie actuelle dont tu reprendrais tout à l’heure le portrait songeur, ce serait la journée incomparable de ce 5 mars 2009, tu jouerais de ta plume verte comme d’une harpe pincée sur les cordes des heures et tout à coup les téléphones frémiraient comme autant de jeunes filles impatientes, autant de douce ondines un peu dingues se dandinant sur leur fil comme autant de choristes de gospel dans la cathédrale de neige irradiant au lever du ciel…
Des recoins. – ce n’est que cela, comprenez-vous, ce n’est que cela qui m’attire chez vous, au milieu des rideaux grenats ou dans vos fauteuils crevés, ce sont les angles brisés à coups de marteau par le vieux Renoir endiablé, et votre lumière est bonne, votre bonne lumière de bar étudiant ou de virée le long de la rivière à quelques-uns qui aimaient Neil Young et Léo Ferré, ce ne serait que cette rêverie retrouvée de nos dix-huit ans adorablement accablés à nous aimer – leurs galas ne sont que ramas de vampires banquiers sur les banquises des médias, nous c’est dans les recoins de vos quartiers bohèmes que nous vivrons encore et encore et après notre mort au milieu de nos enfants silencieux comme des chats baudelairiens…
De l’autre lumière. – Et toujours je reviendrai à l’œil secret de cet étang d’étain sous la lumière silencieuse de ce lever du jour qui pourrait en être le déclin, on ne sait trop, Rembrandt lui-même ne savait trop ce qu’il révélait en mâchant ses cigares - et surtout pas d’effets de théâtre, de clair-obscur ou de faux mystère, laissez venir la beauté des choses qui n’a jamais été séparée de son ombre et diffuse cette aura sans le chercher…
Peinture JLK : Lago delle streghe, au Devero, huile sur toile, 2008.
Commentaires
"...la neige revenue ce matin comme une quantité de téléphones...",
"...tu jouerais de ta plume verte comme d’une harpe pincée sur les cordes des heures...",
"... après notre mort au milieu de nos enfants silencieux comme des chats baudelairiens…",
"...laissez venir la beauté des choses qui n’a jamais été séparée de son ombre et diffuse cette aura sans le chercher…",
c'est pour leur "laisser si doucement se lire" que je viens fidèle visiter tes carrousels de lexies et tout ce qui les lie et relie au fil décousu de nos jours déjà dispersés.
A toi Plume Verte. Philip