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Magicien de la désillusion

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Hommage à Jean Baudrillard

Avec l’auteur de Cool Memories disparaît un observateur aigu, souvent paradoxal, voire incompris, de la société « déréalisée ».

C’est une grande figure de l’intelligentsia française qui vient de disparaître en la personne du sociologue Jean Baudrillard, décédé mardi à Paris à l’âge de 77 ans. Célèbre à la fois pour son travail d’analyste de la société moderne et post-moderne, qui a nourri une cinquantaine d’ouvrages, et pour ses interventions sur la scène médiatique, où ses déclarations rompaient souvent avec le discours convenu, Baudrillard avait déployé ses pensées les plus personnelles et originales dans un monumental journal à facettes et fragments paru, entre 1987 et 2005, sous le titre de Cool Memories.
Né en 1929 à Reims, Jean Baudrillard, germaniste de formation (il avait traduit Marx, Brecht et Peter Weiss), avait participé au groupe de la revue Utopie et publié, en 1968, un premier essai qui fit date intitulé Le Système des objets, où il mettait notamment en évidence le fait que, dans la société de consommation, l’inessentiel de l’objet (sa forme ou son aspect) prime sur sa fonction essentielle. Toute l’œuvre de Baudrillard, par la suite, se développera dans une réflexion multiple sur la « déréalisation » progressive de l’univers social où le simulacre et le virtuel se substituent peu à peu au réel. Proche de Roland Barthes dans son approche des « signes » et autres « mythologies » contemporaines, Jean Baudrillard se plaisait à décrypter des phénomènes selon lui significatifs, tels que les commémorations à n’en plus finir, les grandes actions humanitaires (qu’il n’hésita pas à appeler « tsunactions ») et autres démonstrations lénifiantes ne visant qu’à solidifier un « axe du bien » à caractère « totalitaire ». Jouant souvent sur le paradoxe, jusqu’à la provocation, en poussant la logique propre à l’époque actuelle, jusqu’à l’excès révélateur, il soutenait que la saturation de l’image, dans le monde contemporain, aboutit à un brouillage de la représentation, de même que « notre hystérie autour de la pédophilie est telle que nous ne comprenons plus vraiment ce qu'est l'enfance », avant de conclure que « l’enfant n’existe plus ». De la même façon, il avait soulevé un tollé en affirmant que la guerre du Golfe n’avait pas eu lieu…
Ayant rompu avec le marxisme, comme en témoigne Le miroir de la production (1973), Jean Baudrillard s’était éloigné des analyses fondées sur l’économie pour s’intéresser de plus en plus, dans le sillage du sociologue canadien Marshall MacLuhan, fondateur du concept de « village planétaire», à la détermination des relations sociales par les formes de communication. Ainsi, dans L’échange symbolique et la mort, avait-il développé une réflexion sur la substitution progressive, de l’objet par sa copie et du réel par le virtuel.
Souvent mal compris dans un univers médiatique et politique pratiquant la pensée bipolaire, Jean Baudrillard, bravant les modes (il fustigea l’art contemporain) et le manichéisme intellectuel (il osa célébrer le génie de Joseph de Maistre et affirmait que "la lâcheté intellectuelle » était devenue « la véritable discipline olympique de notre temps"), s’exprimait le plus librement dans les fragments de ses Cool Memories, véritable laboratoire de pensée et d’écriture – ce « satrape » institué du Collège de Pataphysique étant après tout (ou avant) un écrivain…


Commentaires

  • Baudrillard, c'était bien...

    Et ça le demeure, pour longtemps j'en suis sûr...

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