Celui qui a écrit : « Ce vent tout de même est si beau. Quand il traverse mon crâne, je suis tenté de me taire » / Celle qui aime se couler dans certaines phrases / Ceux qui savent où poser le point-virgule / Celui qui vit l’aube sans se laisser distraire / Celle qui a compris pourquoi le vieux chêne contemplait les fleurs de cerisier / Ceux qui savent que ce chemin personne ne le prend que le couchant d’automne / Celui qui regarde son bégonia comme s’il découvrait l’Etre en Tant que Tel / Celle qui compare les gesticulations des platanes à celles des boxeurs / Ceux qui ne font attention à rien / Celui qui estime que son cousin poète est un branleur / Celle qui fréquente les soirées de la revue L’Effacée / Ceux qui flingueraient l’éditeur pour une coquille laissée dans leur recueil à la gomme / Celui qui pense que la Poésie est un Sacerdoce / Celle qui drague les jeunes critiques fascinés par ses Sublimes Poëmes / Ceux qui baisent en écoutant murmurer Delerm junior / Celui qui peaufine son dernier poème minimal tandis que ses fils répètent avec leur groupe de Hard dans l’abri anti-atomique / Celle qui affirme que la poésie de Marc Levy lui a remis le moral au top / Ceux qui savent Verlaine par cœur / Celui qui tient le rôle d’ange aéropostal entre ses amis amoureux / Celui qui affirme que Baudelaire est son copilote / Celle qui se poile en lisant le poème d’amour que lui a écrit son collègue fondé de pouvoir Hervé Brousse de la Motte / Ceux qui connaissent la difficulté d’emploi du passé simple / Celui qui se dit tous les matins en se flattant le sac que rouler sur l’A16 est une ascèse / Celle qui ne porte que des tabliers jaunes / Ceux qui se rappellent l’odeur de chocolat de la gare du Sud à Bruxelles / Celle qui ne m’a jamais rendu le disque des Stones sur lequel figure Ruby Tuesday / Ceux qui voient du train le vieux cheval rongeant la barrière dans la brume automnale / Celui qui rend son salut à la branche de saule à la fenêtre / Celle qui n’aime pas le yucca que lui a offert ce con de Lucas / Ceux qui affirment que le thé les boit, etc.
Commentaires
ADDENDA
Celui qui écrit plus vite quand c’est l'heure du jogging / Celle qui voudrait que sa nouvelle intitulée « Le Coran révélé » égare ceux qui prennent tout à la lettre / Celui qui ne trouve plus ses mots au moment de monter le dossier pour l’ouverture d’un musée de la plume sergent-major / Ceux qui ne savent écrire que les dernières phrases, et le silence qui les prolonge / Ceux qui mettent des points y compris sur les « i » grecs / Celle qui trouve que chez Sollers il y a décidément trop de persiflage / Celui qui a perdu son don d’écriture automatique après son stage de P.N.L. l’été dernier à Montreux / Celle qui lui a écrit mille lettres dans sa tête, mais jamais d’enveloppe / Celui qui voudrait que son « Éloge du chaos » déclenche une tempête au moins sous un crâne / Ceux qui n’écriront jamais que sur le sable / Celle qui commence ses livres par la fin pour ne pas se perdre dit-elle / Celui qui écrit ses Mémoires définitifs sur des tickets de bus poinçonnés / Celle qui brûle son premier manuscrit pour se donner de l’importance / Celui qui bourre les rainures du parquet avec ses secrets d’enfant / Celui qui s’abstient d’écrire ses cauchemars de peur qu’ils ne se réalisent / Celle qui croit qu’en écrivant on tourne la page / Celui qui voudrait que son style glisse incognito / Celle qui entend le papier gémir sous sa pointe de bic / Celui qui adore se mélanger dans ses papelards / Celui qui s’est tragiquement noyé dans le brillant de sa prose / Ceux qui chaussent des Geox pour écrire comme Rimbaud / Celui qui n’écrit que dans les W.C. pour ne pas avoir à se lever pour prendre du papier / Ceux qui écrivent pour sortir de leur corps à moindres frais, etc.
Jubilatoire !
Au pèlerin infatigable, grimpeur du Mont Athos et nautonnier des vastes horizons, et à ses genoux qui - sur la foi de l'étymologie - accueilleront bientôt de nouvelles naissances, salut.
L’être. Qu’est-ce ? La question pour réponse, une réponse qui vaut bégonia. Mille excuses d’avoir si lentement réagi à cette allusion qui, semble-t-il, m’était adressée (sans exclusive). J’espère que le nombrilisme auquel je succombe n’est pas déplacé, sans quoi, promesse en est faite, je reviendrai ici, à chaque publication, plusieurs fois par jour s’il le faut et il n’est pas rare qu’il le faille, implorer pardon en écrivant, chaque fois, cent Ave Dahlia – ou Chrysanthème pour souligner un peu plus combien la propitiation sera sincère. Qu’à trop évoquer le bégonia, on finisse enseveli sous les chrysanthèmes n’est pas sans un certain charme.
Cordialement,
Thomas
Le titre et l'illustration, trois fois rien:quelques mots et à peine une couleur et c'est déjà tout un poème ... (j'ai eu du mal à en décoller pour commencer à lire ce qui suivait)
Cher Fellow,
"Celui qui se dit tous les matins en se flattant le sac que rouler sur l’A16 est une ascèse"... ton maître est fou à lier, et le mien aussi, mort de rire tout seul devant son ordinateur, à la lecture de ces âneries, et puis soudain bêtement triste, lisant
"Ceux qui voient du train le vieux cheval rongeant la barrière dans la brume automnale"
et puis qui repart en éclats avec "ce con de Lucas", et "ceux qui affirment que le thé les boit..."
Je te souhaite beaucoup de courage et beaucoup d'indulgence, tiens bon,
Perroquet Soussou
Blague à part, éminent collègue pstittaciste, je vous recommande la lecture d'un beau roman de science fiction intitulé Demain les chiens. Peut-on imaginer un beau roman de science fiction intitulé Demain les perroquets ? Ceci dit non pour vous vexer mais pour vous inciter à lire ce beau roman de science fiction intitulé Demain les chiens au dam de Louis Aragon qui prétendait que la Femme est l'avenir du caniche.