UA-71569690-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Belles du lac

    Panopticon666.jpg

    …Bon, tu me diras Godard, Godard, ça lui arrive aussi de déconner, Godard, mais là, quand il dit, je crois que c’est dans Pierrot le fou, que les plus belles filles du monde se trouvent  au bord du lac Léman, là t’es d’accord, Marie, qu’il déconne pas, Godard, c’est clair que toi et moi on est dans le casting, regarde-nous choubidou…

     

    Image : Philip Seelen

  • Malentendu

    Panopticon7456.jpg

    …Elle fait quoi, celle-là, elle entre ou elle sort ? Mais c’est sûr, Khaled, que je respecte ta mère, je m’Xcuse je l’avais pas reconnue avec sa gurka, hein quoi ? c’est burka qu’on dit ? alors Xcuse encore Khaled, je l’ai pas fait exprès - mais non je ne critique pas : si ta mère est en deuil c’est okay qu’elle soit toute en noir... Comment que ça n’a rien à voir ? Elle est pas en deuil ta mère ?  Et finalement ce n’est même pas ta mère – mais tu vois ça à quoi ?   

    Image : Philip Seelen

  • Pas de truffe au ramadan !

    23316704_10214808731958729_4941466125311377164_n-1.jpg
    Chemin faisant (164)
     
    Paola et Paolo. - Je suis Romain je suis humain, disait je ne sais plus quel idéologue droit dans ses bottes, et c’est avec malice que je détournerai cette crâne sentence au crédit des deux Romains - elle d’une délicate finesse d’esprit au visage de madone profane, et lui grandgousier barbu - tenant maison d’hôtes en ces hauteurs forestières de la Toscane , combien humains en leur façon de vous recevoir comme un ami de longue date mais impatients de refaire connaissance sans une once d’indiscrétion pour autant...
    La belle Paola me rappelle les douces personnes des films de Comencini, tandis que le géant Paolo m’évoque illico les cuisiniers premiers couteaux de Fellini, très avisé des finesses de la poésie culinaires. Ainsi, lorsque je lui demande, au coin du grand âtre de l’ancienne ferme, s’il fait aussi sa pâtisserie in casa, comme son pain et les tagliatelle au ragù dont nounous régalons, me répond-il que non: que la pâtisserie est un art en soi relevant de l’alchimie apprise la plus précise: si la recette t’impose 13 grammes de blanc d’œuf tu n’en mettras ni 14 ni 18 même si c’est la guerre !
     
    Palimpseste du Bien Vivre. - L’art de vivre s’apprend entre l’enfance et l’exercice actif du métier de vivre, mais il découle, dans toutes les cultures et civilisations, de siècles de savoir transmis et mémorisé dont j’aime déchiffrer le palimpseste partout où je vais, et à cet égard le grand livre toscan est un trésor. Je n’irai pas au Festival de la truffe annoncé sur les affiches de Montepulciano, mais à San Quirico d’Orcia où la mémoire remonte aux Étrusques, un modeste primo piatto de ravioli al tartufo (la truffe en italien) me fait sourire à l’évocation d’un Tartufe qui invoque le ramadan pour les autres sans cesser de s’en mettre plein la truffe...
    23473186_10214812820060929_4829394852084293260_n.jpg
     
     
    Pour ma part je trouve autant de saveur à trois morceaux de fromage de brebis servis avec trois lamelles de poire qu’à un grand festin, mais chacun son goût et nul hasard si je tombe, au coin de la prochaine rue, sur un tout petit livre du Maestro Ceronetti que je retrouverai demain Cetona, intitulé Per non dimenticare la memoria...
    23376266_10214813083347511_4025577316747102170_n.jpg
     
     
     
    Au bord du ciel. - « S’il est des paysages qui sont des états d’âme, ce sont les plus vulgaires », écrivait sentencieusement le cher Albert Camus dans son évocation de la Toscane de Noces, si je ne fais erreur, mais Camus pour une fois s’est montré obtus dans sa perception d’une haute terre et de ses gens.
    En Toscane les états d’âme sont évidemment des sous-produits, comme un peu partout, mais ce jugement réduisant une émotion devant tel ou tel paysage me semble bien académique au moment où importe surtout la première sensation et la joie très pure qui en découle.
    23316614_10214808732038731_3948201076872999475_n.jpg
    Les collines de Toscane et plus particulièrement les lunaires crêtes siennoises, n’ont point de mer pour horizon, au contraire de Tipasa ou de Djemila, mais leur mélange de beauté naturelle roulant à l’infini, et d’ordonnance ajoutée à main humaine ne me font pas me demander s’il n’y a là que de l’état d’âme suspect de vulgarité vu que je n’aspire qu’à une muette reconnaissance...

  • Retour en Toscane

     Unknown.jpeg

    Chemin faisant ( 163 )

     

    Rallonge d’automne. – Les ors et la pourpre moirée de la fin de l’été indien venaient de tourner au gris cendré sous la première neige, ce matin de novembre sur nos hauteurs, mais l’automne flamboyait encore au sud des Alpes, se reflétant dans l’azur des lacs entrevus des fenêtres du Pendolino, ensuite il n’y avait plus rien à voir que la plaine étale traversée de Milan à Florence par la Freccia rossa dont le nom m’a rappelé la mythique Flèche rouge de nos enfances, et remontant ensuite la val d’Arno l’automne des couleurs a relancé ses éclats sur fond de bleu sombre scandé par les flammes noires des cyprès typiquement toscan alternant avec les campaniles et les pins non moins typiquement toscane que les murs vieux rose ou safran des pans de murs de fermes ou de palais ou de chapelles ou de ruines à l’abandon, et l’on a passé Montevarchi, et Arezzo, et le nom de Camucia m’a fait lever les yeux vers les hauts de Cortone me rappelant tant de souvenirs d’il y a des anneés, et la lumière a décliné tandis qu’une dernière trouée pervenche éclairait les lointaines crêtes siennoises –et des lettres blanches sur fond bleu dur annonçaient CHIUSI –CHIANCIANO TERME…  

     23316383_10214799614010786_3168564900267992562_n.jpg

    Douce folie. - La monotonie des lectures ferroviaires peut se rompre par la pratique du contrepoint, et c’est ainsi que j’aurai fait alterner, tout au long de la descente vers la lumière du sud maintes fois évoquée par Philippe Jaccottet, les pages des brèves chroniques de celui-ci réunies dans Tout n’est pas dit (Le Temps qu’il fait, 2005), où précisément il parle des jours assourdis de novembre dont il dit préférer la douceur recueillie aux splendeurs bigarrées, et celle d’un autre tout petit recueil mais combien plus incisif, celui-là, et parfois traversé de fulgurances inouïes, au titre de Couilles de velours (éditions d’autre part, 2017) et signé Corinne Desarzens.

    ob_52e81a_couilles-desarzens.jpg

    La sentence suivante annonce une lestesse de parole que le vénérable poète de Grignan ne se permettra jamais en dépit de son âge, au contraire de la sexa en veine un peu ostentatoire de lyrisme sexy : « Le grand âge assure l’illusion de pouvoir tout dire. Sur le b’atiment qu’est le corps. Sur la fusée qu’est le destin. Sur la moutarde après dîner qu’il faut éviter parce qu’elle veut dire trop tard. Qu’est-ce qu’on risque ? »

    Les voies de la vraie poésie sont infiniment variées et pas plus que lesoleil ne se souillent, de Villon à Jean Genet ou William Cliff, à traverser les mauvais lieux ; et la douce folie de la Fantaisie a ses propres détours hors-la-loi. Ainsi se gardera-t-on d’opposer le très sage Jaccottet de trente ou quarante ans (ses chroniques datent de 1956 à 1964) et Corinne la foldingue quand elle écrit : « Elle avait des cils gris noir comme ceux d’un nègre et, au doux mitan des fesses, un pouls qui palpitait comme un violon », ou ceci : «Tonitruant, ravigotant, pétaradant, oubliant son nom, le véritable orgasme donne des fourmis dans la mâchoire », ou cela encore : « Ne jamais faire l’amour en gardant sa culotte. La peur a le goût de la rouille, ne la laisse jamais s’installer chez toi. Le courage a le goût du sang. Redresse-toi, admire le monde »…

     MichaelSowa-sheepwithlaptops-S.JPG

    Pasticcio pazzo. – La cuisine du soir, à la trattoria traditionnelle toscane Al Punto de Chiusi, et les vins de la Nobilità régionale dont les noms chantent velouté, tel le Brunello de Montalcino qui me souhaite le bonsoir, n’ont rien perdu du meilleur de ce pays où Nature et Culture se fondent depuis la nuit des siècles, et pourtant que se passe-t-il ce soir aux tables m’entourant en cette soirée hors-saison sans le moindre touriste où, par groupes de garçons et grappes de filles, toute une jeune population populaire s’est répartie, tout entière braquée, scotchée, le regard vissé, le front penché, chacune et chacun sur son smartphone ?!

    La chose pourrait sembler banale évidemment, signe des temps, nouvelles mœurs, comme au temps où la première télé se pointait dans les bourgs provençaux, suscitant la perplexité d’un Philippe Jaccottet, et cette même posture ne s’observe-t-elle pas désormais partout, propre à tous les âges ?

    Or, jamais elle ne m’aurait surpris dans n’importe quel autre lieu, snack à l’américaine ou bar de « djeunes », devanture de disco ou cour de lycée, mais en l’occurrence il me semblait observer un spectacle à nul autre pareil, dans cet excellent restau à la très bonne chère peu chère où ce parterre de frétillants jeunes gens se régalait de bonnes choses après avoir cliqué et twitté à tout berzingue, et du coup je me suis rappelé Fellini et sa façon , à l’italienne, de décrire le délire de la télé italienne, et peut-être alors, me suis-je dit en optimiste à tout crin, que le génie populaire à l’italienne finirait de la même façon à nous faire claper en twittant sans claquer sous les clics…  

    23316383_10214799614010786_3168564900267992562_n.jpg