UA-71569690-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • La Femme du vent

     littérature,poésie

    En mémoire de Katia.

    La très vieille dame au masque d’Inuk me rejoint sur la terrasse de bois de la pension Bella Vista, et voici qu’elle me parle sans me regarder.

    - Je n’aspire plus maintenant qu’à me dessécher. Je viens ici la nuit où seul le vent me caresse encore, mais c’est à la lumière que j’aimerais que les dieux vivants me purgent de mes dernières humeurs. Bientôt je n’aurai plus de bile. Mes larmes sécheront. Toute mon eau sera bue par le ciel incandesent mais je continuerai de vivre comme en transparence, je serai comme ces arbres centenaires  dont il ne reste plus que le réseau de veines durcies sur lequel s’est tannée une espèce d’ultime membrane de vieux cuir de momie. C’est le mot. Cependant je serai, moi, d’avant l’Egypte et l’écriture.

    Tandis qu’elle parle, le vent de Midi s’est levé; et parce qu’elle ferme les yeux je ne suis plus là que pour pour lui faire écho par delà les eaux sombres. Elle gémit encore un peu sous la caresse, puis sa plainte devient chant.

     

    (Extrait de La Fée Valse)

  • La fée sort du bois

     

    16864891_10212227559311026_3597400430900070615_n.jpg

    La Fée Valse, son éditeur et son auteur, l’équipe du Café littéraire et le crooner d’enfer Michael Frei vous attendent, vendredi soir 31 mars 2017 dès 18h. 30 pour un vernissage assorti de lectures et de petits plats dans les grands bien arrosés, sous le signe de la belle humeur et de la fantaisie.


    Dès 18h. 30. Signature de l’opuscule immortel et début de l’apéro.
    Vers 20h. Première séquence de lectures des fragments de La Fée Valse et autres listes proférées à plusieurs voix.


    Vers 20h.30. Début des agapes et conversations privées.

    hqdefault.jpg
    Vers 21h. Psalmodie de la Story of Captain Death, par Michael Frei. Durée : 7 minutes chrono. Suite des lectures.


    Vers 21h.30. Suite des agapes et conversations effrénées. Lecture finale.


    Café littéraire de Vevey : https://lecafelitteraire.ch/

    zaech-oct.16460 2.jpg


    Frontispice de La Fée Valse, dessin original de Stéphane Zaech.

     

    17629930_10212576063223406_8574086746519859432_n.jpg

  • Sérénité

    cafe_einleitung.jpg 

     

    Tout cela va de soi :

    nous sommes confiés

    l’un à l’autre, je crois.

    Le matin revenu,

    Schubert à l’impromptu,

    nos regards accordés,

    la chambre, la journée,

    les arbres, tout ce bleu,

    nos secrets et nos vœux,

    nos silences et nos voix.

     

    Je me sens si léger,

    de me savoir à toi.

     

    (13 mars 1989)

     

     

     

  • Le sacre des instants


    Rencontre avec Alain Cavalier.Cette année, le Sesterce d'or Prix Raiffeisen Maître du Réel sera décerné au réalisateur français Alain Cavalier, en hommage à l'ensemble de sa carrière. Y seront présentés, en première mondiale ses Six Portraits XL durant le Festival Cinéma du réel, du 21 au 29 avril 2017!

    L’homme est la seule créature, consciente de ses fins, qui éprouve le besoin de noter ce qui lui arrive au jour le jour, comme pour conjurer sa disparition. La démarche d’Alain Cavalier dans Le filmeur évoque d’ailleurs, à tout moment, ces sentiments élémentaires que sont la peur de la nuit, l’angoisse face à la maladie ou la mort, autant que l’émerveillement devant la nature ou la simple joie d’être au monde, tels que l’homme de Lascaux les a probablement ressentis.
    C’est chez les Cavalier, à Paris, dans une pièce tapissée de masques d’animaux et d’affiches de films, que Françoise Widhoff, épouse du réalisateur et collaboratrice de l’ouvrage, dont elle est en outre une figure omniprésente, nous a projeté Le filmeur, qui se déroule en partie en ce lieu même.

    Après cette immersion dans une vie entièrement dévoilée, quoique toujours pudique, Alain Cavalier nous a rejoints, qui passe toutes ses matinées du côté d’Aubervilliers à filmer, à présent, un homme de cheval en la personne de Bartabas. A nos pieds se dandinait la petite poule de soie noire qu’on voit dans Le filmeur, comme si la vie captée par les images poursuivait son cours «hors champ» alors que, dans un reportage photographique qu’elle tenait en mains, Françoise Widhoff (qui découvre au cours du film son ascendance ukrainienne et juive) nous montrait un petit cheval à sept pattes victime de la contamination de Tchernobyl…
    Or Alain Cavalier détaillait maintenant l’origine de sa démarche: «J’ai toujours été porté à noter ce qui me semble le propre de la vie qui va, détail émouvant ou cocasse, qu’il me semblait intolérable de laisser se perdre, et que j’ai longtemps capté par l’écriture. Ensuite, avec l’usage de la caméra numérique, cette ressaisie s’est inscrite dans ma pratique de cinéaste, dès l’époque de Thérèse».
    C’est en effet au cours des essais préparatoires de Thérèse, qui a marqué un tournant dans sa carrière, qu’Alain Cavalier a découvert un type de relation, entre filmeur et filmé, qui devait l’amener à sa nouvelle méthode, telle qu’elle se développe dans René ou la magnifique série de ses portraits de femmes au travail. Ainsi a-t-il passé, sans le moindre regret insiste-t-il, et sans retour envisagé, d’un cinéma traditionnel, avec acteurs et équipe de tournage, à une pratique radicalement simplifiée, du point de vue logistique, mais qui lui permet d’aller à la pointe extrême de son expression poétique.
    «La seule loi absolue que je m’impose, dans ma façon de faire, est le son direct. Je ne suis pas encore tout à fait satisfait de ma façon de parler en même temps que je filme, mais le collage ou la retouche sont exclus».
    La grande beauté, jamais esthétisante, et les surprises constantes, l’humour irrésistible aussi du Filmeur tiennent d’ailleurs à cela: que l’image et la parole «dialoguent» en vivant contrepoint. Diverses séquences, à commencer par la scène de la mendiante voilée de noir se tenant littéralement à plat ventre sur les Champs-Elysées, puis fonçant sur le filmeur, semblent construites, alors qu’il n’en est rien.

    «Ma seule ruse, en l’occurrence, a été de filmer cette mendiante, que je soupçonne d’être une lépreuse, en la cadrant de profil. Ensuite, quand elle m’a repéré, je me suis éloigné pour la recadrer de face, au téléobjectif…»
    De telles «prouesses» sont pourtant rares dans Le filmeur, alors qu’y foisonnent les tableaux en mouvement, au fil d’une véritable mélodie de plans. «Le cinéma est cela même à mes yeux: c’est le passage d’un plan à l’autre. En outre, par rapport à l’écrit et donc aux mots, je crois que cet art est qualifié pour dire le réel de l’instant et le magnifier à sa façon. Si vous dites le mot pluie, vous imaginez un phénomène général. Tandis que la pluie du film, fusillant le bambou que vous voyez là, est une pluie unique, si j’ose dire…»
    Uniques aussi: le visage de son père mort; la voix de sa mère hors champ dans la lumière belle, qui chantonne le prénom de son fils ou se rappelle ses moments de bonheur; le sourire de sa femme revenant d’endoscopie dans un bistrot plein d’animation; son propre visage défiguré par la troisième opération d’un cancer de la peau; l’ oraison funèbre qu’il improvise dans les toilettes d’un café à son ami Claude Sautet; ce que nous vivions lorsque tous nous avons appris l’attentat du 11 septembre; enfin la «petite aube aux doigts de rose» de certains éveils, et tant d’autres  «uniques» instants que Le filmeur sacralise…


    La série des Portraits de femmes réalisés par Alain Cavalier est disponible en DVD.

  • Celles qu'on shoote

    Panopticon208.jpg

     

    Celui qui booste la crooneuse / Celle qui a un string genre cordon sanitaire / Celles qui ont laissé leur carte à Pierre Bergé au cas où / Celui qui fait chanter celles qu'il a shootées dans une vie antérieure / Celle qui dit qu'une Miss Zurich kosovare dévalorise le titre / Ceux qui se refont au poker menteur / Celui qui investit dans le physique de rêve de sa belle-fille chimiste / Celle qui a lu Proust sur Twitter ou tout au moins le prétend / Celles qui sont dépassées par leurs followers par la voie d'urgence / Celui qui égare son iPhone en shootant les basketteuses bi / Celle qui exige que son furet soit dans le casting / Ceux qui restent clean dans le cloud / Celui qui se prend une claque en oubliant les codes de la promotion canapé / Celle qui lustre les Paul Smith de son futur ex / Ceux qui ne désirent plus celles qu'ils possèdent encore / Celui qui perd au jeu celle qui ne lui appartient pas vraiment / Celle qui fait des lesboshows virtuels avec sa prof d'ukrainien / Ceux qui tombent en mains dangereuses / Celles qu'on a marquées à l'épaule comme au temps du Cardinal / Celui qui cesse d'être objectif quand il shoote des anorexiques kantiennes / Celle qui en jette tellement qu'elle n'a plus que le satin de sa peau sur ses os moelleux / Celles qui ne se shootent qu'aux pixels / Ceux qui ramassent la mise et tirent l'eau, etc.
    (Cette liste a été jetée pendant l'abattage de trois grands arbres innocents dans les marges de papier du nouveau roman à paraître d'Antoine Jaquier qui fera sous peu le buzz entre fourrés et clairières...)