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  • Et Quentin déboula !

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    Un jeune écrivain se pointe au coin du bois. Et quel ! Retenez ce nom: Quentin Mouron. 

    On entend ces jours des tas de bonnes nouvelles. Comme quoi la Crise. Les effondrements partout. Les indignés en tache d’huile. Misère et colère aux entournures des déserts et des villes polluées. Mais là, ce matin, tout neuf, j’ai du plus joyce qui me réjouit comme jamais et toujours et  encore : la venue au monde d’un écrivain !

    Tout jeunot mais en sachant déjà long sur La Chose, j’dirai : la musique des mots et des choses. Crépitant de talent comme un essaim d’étincelles mais pas que pour l’effet ! Vraiment piqué poignant l’Quentin Mouron ! Déjà ce nom ! Et cette papatte ! Cet instinct sûr presque à tout coup. Je ne dis pas parfait loin de là mais presque. Mieux que parfait : intense et décidé. Fin d’antennes et de lame. Célinien jusqu’au bout des griffes. Parfois un peu trop même dans le phrasé rythmique et les rimes internes. Pêche de jeunesse qui fruitera dans la foulée. Mais cette vieille jeunesse du regard. Pas molle mais grave, vive, incisive, véhémente, charnelle et hypersensitive dès la première page abouchée au réel. Los Angeles en panoramique et ensuite l’Amérique par le détail. Or on sait que dans le détail gît le dieu musicien. Et voilà que dès la première page d’Au point d’effusion des égouts  ce dieu-là pétille de neuve braise et vous incendie.

    J’précise, chose annexe, que Quentin Mouron, Canadien et Suisse d’origine, n’a que vingt-deux ans et sans rien pour autant du chiant «djeune » genre attention j'arrive y a que moi ! Ou presque pas. Déjà rusé comme un bronco de rodéo le poulain piaffant. Déjà vous alignant des sentences à la Ferdine, parfois un peu voyantes, mais ça lui passera avant que ça vous reprenne et ce premier galop est étourdissant en toute lucidité tripale si j'ose dire -  et j'ose;  et j’y reviendrai plus souvent qu’à mon tour…

    Quentin2.jpgQuentin  Mouron. Au point d’effusion des égouts. Olivier Morattel, 137p.

  • Le génie de Gina

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    Eugénie Rebetez vous attend ce soir et demain à L’Echandole. Pour un show à pleurer de rire et de bonheur.

    Elle couine et marmonne, elle danse et se contorsionne, elle joue avec son corps charnel avec autant de rouerie narquoise que de tendre bonhomie, elle est à l’aise dans sa chair généreuse autant que sous tous les masques que prend son visage – c’est une super souris (c’est ce qu’on disait jadis d’une fille craquante ) et une sorte d’éléphante trépignante quand elle l’entend ainsi, elle est ballerine enveloppée à la grâce qu’elle aime casser à volonté, elle aime sa vie et ses couacs, elle nous fait aimer notre vie et nos propres faux pas – c’est en somme une humanité à elle seule que Gina qui nous rappelle à la fois Zouc et Isadora, les Mummenschanz et la clownesse Gardi Hutter, mais avec sa touche à elle, sa patte, sa gouaille de petite fille restée Mimi Cracra ou ses multiples personnages grappillés vite fait à la Comédie sociale, de la star rockeuse d’Aérobic effréné  à la rappeuse, ou de la diva danseuse gorillant divinement  un air d’opéra aux  plus inénarrables facéties oscillant entre pitrerie et poésie.

    Bref, c’est une artiste d’une formidable originalité qu’Eugénie Rebetez, Gina sur la scène, qu’on peut voir ces jours à Yverdon-les-Bains et ce jusqu’à demain soir.
     

    Gina1.jpgYverdon-les-Bains. Théâtre de l'Echandole, jusqu'au 3 décembre.

  • Ceux qui tentent leur chance

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    Celui qui hante les casinos désaffectés / Celle qui fume son Havane de gagnante sur le pont arrière du bateau à aube de retour d’Evian à Minuit sur l’eau à luisances de lingots / Ceux qui ont connu Yvonne Printemps en avril à Divonne / Celui qui tire le gros lolo / Celle qui a mis le feu à la Baraka / Ceux qui se regardent en traversant et qu’un camion renverse en amoureux / Celui qui claque son Euromillion en investissements affectifs / Celle qui a gagné un milliard rien qu’en se faisant concevoir dans l’bon plumard / Ceux qui ont plus d’acné que de chance ah mais c pô juste / Celui qui n’a jamais su qu’il avait une tante à héritage mais ce n’est pas grave vu qu’il est chanoine de l’Ordre des Capucins à pieds nus / Celle qui a tout légué au couvent avant de revenir aux affaires plus légère / Ceux qui ont des yeux en bille de loto qui ne leur valent aucune quine de faveur / Celui que Vladimir Volkoff (l’écrivain, pas le chapelier) appelait son porte-poisse à la chasse / Celle qui a cru enfourcher la Monture de la Fortune mais hélas Ménélas quelle désillusion l’attendait / Ceux qui piègent les héritières belges / Ceux qui se pointent à Pudong en s’exclamant « à nous deux Shangaï ! » / Celle qui pose devant la Shangaï Tower pour le tabloïd The Very Place To Be / Ceux qui se sont connus à l’Expo Universelle de Shangaï 2010 et se sont perdus de vue peu après / Celui auquel le nouveau parfum Terre d’Hermès donne une nouvelle densité existentielle au niveau du Projet / Celle qui a fait en octobre 2011 une gâterie à l’artiste dissident Ai Weiwei qui franchement ne se le rappelle pas / Ceux qui estiment que le potentiel acheteur de la masse chinoise est un océan à maximiser / Celui qui appelle sa conjointe Chance de ma Vie même s’ils sont restés prolos / Celle qui a consacré 13% de sa colossale fortune à faire ériger des statues à son chien Pinky / Ceux qui se sentent bien dans leurs containers de milliardaires retirés des affaires, etc.

    Image : Philip Seelen    

  • Ceux qui se consument

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    Celui qui se plaint pour se sentir exister / Celle qui a si mal aux cheveux qu’ils en tombent / Ceux qui savourent leur déprime / Celui qui se replonge dans Mars de Fritz Zorn « pour l’ambiance » / Celle qui n’arrive plus à sourire à son saladier / Ceux qui s’évitent dans leur deux-pièces sur cour / Celui qui se demande comment ramener le sourire de son Bouddha de plastique acheté à Conforama / Celle qui s’enferre dans une jalousie d’arrière-cuisine de McDo / Ceux qui ne rient pas vu qu’il n’ y a pas de quoi / Celui que tout accable sauf son Bonus de 2 millions / Celle qui se replie dans le tricot / Ceux qui diffusent des ondes froides genre allées de cimetière finnois le soir / Celui qui repique en ouvrant juste la fenêtre / Celle qui estime qu’à côté de la famine dans le monde son sort reste aussi enviable que celui du biscôme vers Noël / Ceux qui ne se plaignent jamais que des malfaçons d’artisans écervelés par la course au Bénef / Celui qui ramène le sourire de sa conjointe en l’appelant mon accorte babouins / Celle qui se voit dans le miroir déformé de l’ophtamologue alsacienne / Ceux qui se contentent même de ce qu’ils n’ont pas / Celui qui mendie un sourire à la mendiante / Celle qui a lu un peu de Saint Thomas à l'époque où elle doutait précise-t-elle / Ceux qui se donnent trois semaines pour se faire une idée sur la Théorie du Chaos / Celui qui se retrouve à la case départ imminent / Celle qui se réjouit quelque part d’avoir sa photo dans la page des avis mortuaires / Ceux qui sont encore pleins de feu dans la chapelle ardente, etc.

    Image : Philip Seelen