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Contre le style TipTop

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Ce qui menace l’Europe

On croit que la vieille Europe est menacée par le plombier polonais ou par le Turc à relents mahométans, mais on a tort : on ne voit pas le vrai danger découlant d’une progressive acclimatation mondiale de la propension suisse au TipTop propre-en-ordre qui indique que l’Opel/Honda/Toyota/Peugeot est lavée et polie à la peau de chamois, que la vaisselle et la lessive et les vitres et toutes les surfaces visibles d’alentour sont propres et nettes, enfin que tout est nickel et sous contrôle.
Il y a là quelque chose de terrible qu’on aurait tort de prendre pour une seule tare suisse, dont on se débarrassera en confinant ce pays hors de l’Europe. Non : la situation est plus grave. Preuve en est que je l’ai observée d’abord en Allemagne, à Rothenburg ob der Taube, sur la route dite romantique. J’entrai alors dans un hôtel et qu’y vis-je : l’abomination propre-en-ordre, sans qu’on pût imaginer une collusion entre la Suisse et la Souabe active. Le TipTop au stade terminal.
Mais qui alors a contaminé l’Allemagne ? Hélas la conjoncture devient alarmante, puisque l’Europe entière, de Malmö à Agrigente et de Zagreb à Albufeira, se trouve enivrée par le désir d’encaustique et de karaoké… A savoir, après le TipTop: sa conclusion festive.
Je prends ces notes pessimistes au bord d’une admirable rivière suisse, la Kander, qui n’est en rien contaminée par ce nouveau conformisme européen de l’ordre et de la propreté. Je suis descendu tout à l’heure dans un Lodge de Kandersteg, ancien palace réaménagé selon la simple éthique et la frugale esthétique de l’homme des bois, dérogeant évidemment aux normes débilitantes du tourisme conventionnel et donc européen, mais réalisant le summum du confort : un seul employé jamais là y règle l’organisation de 33 chambres donnant toutes sur la nature et le ciel, et la piscine intérieure est accessible à toute heure. Le prix est dérisoire. La qualité du savon incomparable. On croit que la civilisation se perd. On se goure. Je fournis les renseignements sur l'établissement aux gens qui en sont dignes... 

Commentaires

  • Rassurée, je suis. Je vis sur une île civilisée et non contaminée:):)
    Je ne sais pas si j'en suis digne, mais ils m''intéresseraient, ces renseignements!

    PS 1) Très belle photo! Prise dans ce lodge?
    2) J'ai rêvé, ou vous aviez parlé d'un livre dont je viens de sortir avec regret, "Train de nuit pour Lisbonne"? Je ne trouve pas!

  • Chère Marie, il est trois heures du matin et je songe à ce qui nous tient ensemble, ce qui nous tient debout, ce qui nous fait résister à l'avachissement et au consentement à l'intolérable. Il est certaines nuits où le jour se fait en nous soudain. Mettons que cela se passe dans cette cabane à tous vents de la photo. Elle n'a pas d'adresse, puisqu'elle est en vous.

  • Je n'ai pas eu l'impression, à vous lire , que la lumière ait jamais beaucoup baissé en vous....:)
    En tout cas, moi, ce qui me fait résister, ce sont justement ces lumières que je perçois ça et là, par exemple dans un texte aussi lumineux que celui de Pascal Mercier, ou dans la si brillante analyse de quelqu'un qui a aimé ce texte.
    Merci.

  • N'appréciez-vous pas l'ordre et la propreté que représentent par excellence les meubles Pfister et les vêtements PKZ ?

  • Soeur Verena, vous mettez votre doigt gracile sur la double plaie qui menace la Suisse, et l'Europe par voie de contamination. Les meubles Pfister, comme les meubles Ikea ou Segalo, doivent être éradiqués de Suisse et d'Europe. Quant à la firme PKZ, productrice de tenues d'automates de bureaux, qu'on en brûle tout ce qui en sort comme tout ce qui sort des firmes H&M et Benetton !

  • Je suis désappointée par le critique que vous fais de Rothenburg ob der Tauber qui ne trouve se pas en Souabe mais en Moyenne Franconie bavarois. Pech !

  • Mea Maxima Culpa Gundula. C'est vrai que votre ville est une splendeur en apparence, mais que voit-on dès qu'on en passe les portes: la joliesse épouvantable du joli. La quintessence de l'esprit petit-bourgeois néo-européen gît d'ailleurs là: que ce qui est beau est dit joli et que ce qui est joli est déclaré beau. Schrecklich reizend !

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