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Salzbourg sous les bombes

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Une page de L’Origine, de Thomas Bernhard
En relisant L’Origine de Thomas Bernhard, et plus précisément l’évocation des bombardements de Salzbourg en 1944, on voit mieux comment l’exagération, chez cet écrivain de l’outrance, tend à une sorte de vérité poétique d’épopée, un peu comme chez Céline – et je pense plus précisément à la fuite de celui-ci à travers l’Allemagne et au fabuleux épisode de la traversée des ruines de Hanovre dans la chronique de Nord.
Quant à TB, sa remémoration des foules se pressant dans les galeries souterraines n’est pas moins saisissante, avec le même genre de montées en crescendo aboutissant à des visions faites pour s’imprimer dans la mémoire du lecteur : «Dans les galeries elles-mêmes, où la plupart avaient déjà leurs places par droit héréditaire, c’était toujours les mêmes qui étaient ensemble, les gens avaient formé des groupes, ces centaines de groupes étaient assis tant bien que mal sur le sol pierreux durant des heures et maintes fois, quand l’air manquait et quand les gens s’évanouissaient par rangées entières tous se mettaient à crier puis il se refaisait souvent aussi un tel silence que l’on croyait que ces milliers de gens dans les galeries étaient déjà morts. Sur de longues tables de bois disposées pour cet usage on étendait les gens évanouis avant qu’on les traîne hors des galeries et il me souvient encore des nombreux corps de femmes entièrement nus sur ces tables que les secouristes, hommes et femmes, massaient et que trps souvent nous-mêmes massions sous leur direction pour les maintenir en vie. Toute cette société des galeries, pâle, affamée et promise à la mort était de jour en jour et de nuit en nuit plus fantomatique. Accroupie dans les galeries, dans une obscurité uniquement remplie d’angoisse et sans aucun espoir, cette société promise à la mort parlait par surcroît toujours de la mort et de rien d’autre. Toutes les terreurs de la guerre dont ils avaient eu connaissances et qu’ils avaient personnellement vécues, des milliers de messages de mort arrivés de toutes les directions, de toute l’Allemagne et de toute l’Europe étaient discutés par tous dans ces galeries avec une grande insistance. Pendant qu’ils étaient assis dans ces galeries, ils répandaient librement dans l’obscurité qui régnait ici leur conviction de la ruine de l’Allemagne, de l’évolution toujours plus marquée du présent vers la catastrophe mondiale la plus grande qu’il y avait jamais eu et ils ne s’interrompaient que totalement épuisés… »

Commentaires

  • Cher JLK

    Je lis depuis de nombreux mois les notes de votre blog et me réjouis, ce jour, de celle consacrée à Thomas Bernhard, dont je suis un inconditionnel.

    Une telle diversité sur un blog et, surtout, une telle pertinence, ne peut que satisfaire vos lecteurs ! J'en suis !

    Bien cordialement,

    F.L.

    http://dadaparis.blogspot.com/

  • Merci Fabrice. Danke schön. Et salutations du quartier de Zurich où Dada a laissé quelques traces...

  • Tout rapprochement avec notre époque serait-il à bannir ? A part cela, à quand un article sur W.G.Sebald ? Ou encore Imre Kertész ?
    Cordialement.

  • Vous avez mal regardé, cher Rodrigue, parce que des articles sur W.G. Sebald et Imre Kertesz ont passé et repassé sur ce blog. Je vais les ressortir rien que pour vous, mais d'abord faut que je pelle la neige. Bien à vous.

  • Fellow qui sniffait à plein naseau et la clarté d'avant l'aube qui ramène au pays d'enfance, c'est donc la neige à La Désirade !

  • Eh oui c'est la neige à La Désirade et donc l'ouverture du McDo des oiseaux des monts, avis aux dames-oiselles...

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