Plus tard je me suis demandé
si les autres là-bas
n'étaient pas nés trop tôt ?
Je ne retrouvais plus
le lieu du portulan
où l'on se retrouvait
dans les années-lumière,
où tout semblait aller
de rimes en ruisseaux...
Alors on se parlait
toujours à demi-mot,
et le silence se faisait
à l'entour des clairières.
Mais hélas tout cela
est encore trop écrit.
Revenir aux vrais mots.
Ne plus édulcorer,
je dirai même: ne plus
poétiser.
Le temps nous pèse moins
ce matin de printemps
où tout s'efface sous nos yeux
du secret révélé des dieux -
sans autre grâce que le présent.
(La Désirade, ce 10 juin 2017)
Peinture: Vassily Kandinsky
Commentaires
Heureuse de lire à nouveau (en-dessous) votre partage du beau livre de Max Dorra ("Quelle petite phrase bouleversante au coeur d'un être ? ") avec votre compagne de toute la vie. Et ce jour, ce poème écrit à La Désirade.
Page 240, Max Dorra est à l'amble de votre pensée quand il évoque le "risque de quitter une communauté rassurante pour retourner dans sa propre solitude (...) Mémoire dont la blessure fait perdre à un être quelque chose de sa substance. un peu de cette identité qui s'était constituée à partir d'une succession de rencontres et qui fait vaciller..."
"Sans autre grâce que le présent."
Oui....
Vous souhaite la grâce d'un dimanche aussi beau qu'à nos fenêtres...
Merci, Jean-Louis. Je sors du ciné (agréable fraîcheur dans Paris torride) où j'ai vu un film géorgien d'une grande profondeur, émouvant, subtil et doux : "Une famille heureuse",de Nana Ekvtimishvili et Simon Gross.
Manana, un femme géorgienne de 52 ans, professeur et qui, au soir de son 52e anniversaire, décide de quitter le domicile conjugal pour s'installer dans un petit appartement où elle veut vivre seule. Une infinie pudeur, des non dits, une grande justesse de ton. Et beaucoup de liens forts entre les uns et les autres.