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  • Ceux qui se font mal voir

     

     

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    Celui qui dit volontiers ce qui ne se dit pas au moment où ça fâche les amies de Maman / Celle qui trouve idiote la sentence (d'ailleurs hypocrite) d'Aragon selon laquelle la Femme est l'Avenir de l'homme alors qu'elle en est juste son éternel présent de retour dès que la lessive sera suspendue et les enfants couchés/ Ceux qui aiment les femmes sans le vouloir / Celui qui va à contre-courant dans le sens de la marche alors que les rebelles auto-proclamés régressent en rangs serrés/ Celle qui traite l'ado très cultivé (ça existe encore dans les Vosges et les Ardennes bleues) de has been / Ceux qui tirent sur l'ambulance remplie d'armes de la paix / Celui qui respecte certains tabous dont il fait ses tabourets / Celle qui se prénomme Manon et se reconnaît dans ce passage du dernier livre de son frère Philippe limite incestueux ou même plus:"On a toujours aimé se cacher, Manon et moi, et on continue de plus belle. La Nature aime à se cacher, de même que les vices enfantins qui résistent à tous les dressages. Heureux les enfants vicieux, sournois, dérobés, intenses ! Heureux ceux qui préservent leur intelligence de l'insouciance ! Vive leurs caresses poivrées! Le temps les traverse et ne les noie pas. Ils restent frais comme des mouettes rieuses dans l'espace. Ils sont très coupables. Ils connaissent la haine inévitable dont il sont l'objet" / Ceux qui promettent à Maman de ne pas recommencer en se réjouissant de la consoler demain d'être déçue/ Celui qui fait toujours la même chose dont la poétesse chinoise (il en faut) dit que ça "dépayse et libère"/ Ceux qui félicitent les anciens maoïstes d'avoir loué Mao vu que ses crimes l'ont été pour le bien du peuple chinois mal préparé au commerce international / Celui qui met les pieds dans le plat pays genre Hollande rend visite au polder à l'abri de sa digue / Celle qui affirme que les regards des personnages de Hopper (le peintre ricain à la mode) sont vides et provoque aussitôt les regards outrés de ses amies lectrices du tea-room Chez Althusser / Ceux qui se réunissent pour exécuter un quatuor de Beethoven qui pourtant ne leur avait rien fait / Celui qui a enregistré les râles de Virginie Despentes en train de rédiger un paragraphe grave jouissif de son prochain roman dans le studio de Courchevel où elle séjourne depuis hier avec Doc Gynéco mais allez pas l'ébruiter / Celle qui lisant Un petit bout de femme de Franz Kafka se demande comment ce diable d'écrivain judéo-tchèque a fait pour identifier ainsi sa trisaïeule Gerda connue à Vienne pour son caractère inquisitorial de duègne jamais contente à l'instar de Yahweh l'ashkénaze jaloux et tâtillon/ Ceux qui se font du mouron dans le boudoir de Sans-Souci, etc. 

     

  • Au secours série suisse !

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    D'une adaptation crédible du Chien jaune de Simenon, au premier épisode consternant d'une nouvelle série de la télé romande, intitulée Station Horizon et cumulant tous les poncifs ringards... 

     En faisant tout à l’heure mes 30 kilomètres de home-cycle sur place alors que le soleil descendait sur le lac, j’ai regardé Le chien jaune de Simenon, adapté au ciné par Claude Barma, avec Jean Richard dans le rôle de Maigret. Vraiment pas mal, dans un noir-blanc tantôt velouté et tantôt plus dur rendant bien le climat portuaire (à Boulogne-sur-mer) de cet épisode plombé par le portrait de groupe de deux abjects personnages, ratés et salauds. Quant à moi, je préfère Gabin en Maigret, mais l'humanité profonde de Simenon, et son art du détail   révélateur et des arrière-plans, sont ressaisis par le cinéma, les images et les silences de ce film sans prétention.

     

    Ensuite, en prime time, j'aurai bonnement subi les vingt premières minutes d’une nouvelle série de la télé romande, intitulée Station Horizon et se la jouant western bike-movie sur fond de montagnes valaisannes. Or, autant le découpage du Maigret, ses personnages et son dialogue sont reconstruits dans l’esprit du romancier, avec intelligence narrative et sensibilité, autant le feuilleton romand défaille illico par manque de psychologie, accumulant les clichés et les références-poncifs sans  aucun ancrage crédible. 

     

    À croire que, dans ce pays où il y a tant de matériau  social, ou bonnement humain, à travailler, l’on soit infoutu d’imaginer autre chose que du copié-collé pseudo-amerloque platement nostalgique (la séquence supérieurement idiote où l’ex-taulard biker barbu explique à  une petite-fille que de son temps on voyait des films en plein air sans forcément regarder l’écran tu-comprends-petite-ouais-je-comprends), et que je te colle une affiche de La fureur de vivre en arrière-plan et que je te sorte la musique à bouche pour musique à boucher le trou de tout ce vide…  

     

    Le cher Nicolas Bideau, toujours à la pointe du marketing culturel, disait il y a peu son désir de séries suisses cartonnant dans la foulée de Borgen, et c’est vrai - Jean-Stéphane Bron l’a prouvé avec Le génie helvétique, avant le formidable docu-fiction qu’il a réalisé avec Cleveland contre Wall street – que la Suisse pourrait être le décor de séries aussi crédibles que The Wire, genre docu, ou que Breaking bad, dans l’exploration des zones grises ou crades de notre admirable pays, si tant est que des scénaristes et des dialoguistes (et des producteurs et peut-être même une industrie chocolatière du cinéma suisse ) existassent, ce qui manque un peu même à Zurich où, à ma connaissnace, le mémorable Grounding de Michael Steiner n’a pas eu de suite…

  • Mémoire vive (78)

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    À la Buvette de Jaman, ce dimanche 23 février. – J’avais oublié, vendredi, mon Samsung en ces lieux, donc je m’y suis repointé ce midi avec une dense foule de skieurs montés aux Hauts-de-Caux. Prenant place en face de moi, la femme moderne typique, quadra saine et solide, disant bientôt à sa voisine genre rando qu’elle rêvait de passer un week-end aux Grisons dans un tipi typique, engoncée dans des peaux de bêtes. « Une expérience ultra-forte »,imagine-t-elle tout haut. En outre très remontée contre une Japonaise, dans le compartiment voisin, tardant à débarrasser sa banquette de ses affaires alors que des skieurs suisses se pressaient dans le couloir. Son impatience fébrile à « leur apprendre ».   

     

    M’a rappelé le « petit bout de femme » de Kafka et la Fanny de Sollers. Ma phobie de toute surveillance, qui me rendrait fou dans un téléphérique plein d’imams ou de pasteurs non-fumeurs.

     

    °°°

     Sollers82.jpgLa lecture de L’école du mystère, le nouveau « roman » de Philippe Sollers, m’est à la fois une stimulation tonique, sous l’effet de sa liberté d’esprit et de ses multiples curiosités, de sa vivacité et de son écriture parfaite,  et un sujet d’agacement récurrent chaque fois que le cher homme se félicite ou se console en se flattant de ne pas être assez félicité. Mais bon : passons sur son solipsisme condescendant, pour l’apprécier tel qu’il est, extraordinairement présent et à son affaire de poète. Je l’entends dans un sens profond, rapport à   son rapport à la langue et à la joie, à son bonheur d’être et à la musique verbale qu’il en tire, à ce qu’on pourrait dire chez lui la musique du sens et de la mise en mots. 

     

    Je ne vais pas le clamer sur les toits, vu que ce serait mal vu, mais je n’en pense pas moins qu’aujourd’hui Sollers est l’écrivain français vivant le plus intéressant, moins sympa et moins empathique que Le Clézio mais plus aigu dans son travail sur la langue, moins romancier évidemment que Modiano mais imposant son « roman » à lui, nettement moins Quignard que Quignard mais pourquoi vouloir deux Quignard ?

    Ces comparaisons n’ont d’ailleurs aucun sens, vu que tout écrivain véritable est incomparable, mais je parle pour moi,songeant à ce que j’attends d’un écrivain pour mon usage perso. Or Sollers m’apporte, à chaque fois du neuf, en tout cas depuis ses grands recueils de« lectures du monde », de La Guerre du goût à Fugues en passant par Discours parfait, mais aussi avec ses « romans ». 

    Je me rappelle avoir été très vache, dans mes chroniques littéraires,  avec les premiers avatars du genre, du Portrait du joueur aux Folies françaises ou à L’étoile des amants, qui me semblaient du chiqué, comme j’avais trouvé forcée l’écriture de Paradis ou même de Femmes, mais l’immense lecteur, le vivant heureux, l’amoureux de Venise et de maints écrivains que j’aime aussi (Saint-Simon, Stendhal, Céline, Proust, Morand,Fittzgerald, etc.) m’est devenu un compagnon vivifiant sinon sympathique, et flûte : tout ça fait une œuvre cohérente et prodigieusement variée non moins qu’obstinée, donc géniale au sens où Proust disait que le génie est affaire d’obstination. 

     

    Surtout je trouve, chez cet auteur qui est le moins gay qui se puisse imaginer, une gaieté communicative, à la fois dans la célébration de ses préférences (ici, par exemple, les chanteuses de jazz) et dans la formulation de ce qu’il exècre, dont Fanny fait en l’occurrence les frais.

     

    Kafka.jpgQui est Fanny ? Tout de suite elle m’a fait penser au « petit bout de femme » de la nouvelle éponyme de Kafka, qu’on pourrait dire le parangon de l’emmerderesse insidieuse. C’est Pierre Gripari qui, le premier, a attiré mon attention sur cette nouvelle, affirmant que selon lui ce« petit bout de femme » n’était autre que le Yahweh de l’AncienTestament, figure par excellence de la mauvaise conscience et de l’incessante réquisition d’un amour jaloux. Sur quoi j’ai lu la nouvelle, sans être vraiment convaincu par l’interprétation « théologique » de notre ami. En revanche, le côté rabat-joie, sourdement inquisitorial, moralisant à « reproches muets », le côté cousine Bette du personnage m’a évoqué ce personnage qu’on retrouve aujourd’hui dans la figure de la vertueuse gardienne du politiquement correct que Sollers prénomme Fanny, notre amie à tous, flanquée d’un Fanny garçon comme la Barbie de nos filles a son Barbie Mec.  

    Et notre « romancier » de filer le thème en multipliant les chapitres possibles rappelant les séries de Martine aux sports d’hiverMartine à la plage ou Martine se marie :« Fanny s’ennuie avec moi. Elle me reproche de ne pas aller au cinéma, de ne pas lire de romans américains, de ne pas avoir envie de visiter des expositions, d’être insensible à la poésie telle qu’elle la ressent, de rester sourd aux animaux, de pas suivre la vie sentimentale des stars et de leurs enfants. Elle me trouve arrogant, méprisant, désinvolte. Sa mère prend la parole dans sa voix. Mes amis aussi sont bizarres : ils se crispent soudain, maman est là ».

    Oui, la terrible maman : la mère américaine ou juive ou calviniste ou musulmane ou psy new age : pire que Yahweh…   

    °°°

    Il s’agit de se rejoindre. Le roman n’a pas d’autre fonction ce matin : rassembler des mots, et des idées, des sensations et des impressions, des  sentiments et des observations vécus  par les personnages, lesquels sont à la fois réceptacles et diffuseurs.

     

    °°°

    Angetombé.jpgLes personnages de romans sont des truchements ou plus précisément : des messagers. Est-ce à dire qu’ils se définissent par un « message »à délivrer ? Le moins possible, mais il n’y a pas de règle. Tchekhov se défendait de délivrer aucun message, et pourtant ses personnages sont, comme ceux de Simenon, des messagers. 

    On pourrait alors entendre le terme de messager dans son sens angélique, mais là non plus il n’y a pas de règle. 

    Mystère de l’incarnation, qui n’advient pas dans tous les romans. Mais je prononce le nom d’Aliocha, et le voici, ou le nom de Javert, et le voilà, comme le nom de Volodia ou de Meursault ressuscitent en moi la présence de l’ado se suicidant dans une nouvelle de Tchekhov, ou du protagoniste de L’étranger. 

    Tous me reviennent par un nom et sans présence del’auteur. Pareil chez Modiano, Simenon ou Thomas Mann. Mais pas un seul personnage de Sollers qui me revienne avec le même statut autonome. Ce qui me fait penser que ses « romans » sont plutôt des éléments d’une chronique personnelle dont les figures romanesques n’apparaissent jamais en ronde-bosse…

    °°°

    Le personnage de Jonas, dans La vie des gens, est sorti de la cuisse d’un tyran, en la personne de Nemrod,protagoniste d’une première nouvelle que j’entendais consacrer à un littérateur qui se paie de mots, brillant phraseur et représentant à mes yeux de la fausse parole.  Jonas, lui, incarne ma nostalgie de la cabane dans les arbres, en d’autres termes : de ce qui nous protège du Grand Animal.

    Dans la foulée, le projet des nouvelles est devenu un roman dont les personnages se sont pour ainsi dire engendrés les uns les autres. Jonas a 44ans et se trouve à New York quand le roman commence sur l’évocation de son enfance dans l’ombre écrasante de Nemrod, écrivain plutôt méconnu jusque-là, que la publication de Quelques petits riens, recueil évoquant les minimalistes des années 80, propulse soudain au pinacle de la notoriété. 

    D’une extrême et lucide précocité, Jonas voit (et surtout vit) l’imposture de l’écrivain se la jouant vie minuscule alors qu’il ne rêve que pouvoir, au dam de sa compagne Marie. L’agacement que j’ai éprouvé à la lecture de la Lettre au père de Kafka,monument de littérature psy également honni par Henri Michaux, m’a donné l’envie de retourner la situation avec un fils envoyant dinguer son père  jouant les victimes style mai 68. L’idée que les tyrans patriarcaux de naguère sont devenus de fragiles feinteurs m’est chère: à vrai dire je préfère les despotes philistins incarnant le Commandeur, à la gueule duquel on crache. Cracher contre un pervers narcissique cotisant à Amnesty est plus délicat… 

    soutine.jpgMais Jonas a des alliés en les personnes de Sam, père de Marie forgé à l’ancienne (compagnon réfractaire de Teilhard et de ThéodoreMonod dans les déserts) , de Rachel dont toute la famille a disparu, d’un Monsieur belge spécialiste de Confucius et de Théo le peintre dont j’ai bricolé le personnage à partir de Thierry Vernet, de Lucian Freud et de Gulley Jimson (personnage d'un roman de Joyce Cary), de Francis Bacon et de Lovis Corinth ou de Varlin, de Soutine, des écorchés vifs de Goya et de Rembrandt… Le comique étant que pas un seul de ces noms ne fera jamais référence faute d'être cité, car je veux un roman sans aucune référence explicite. 

     

    Et puis il y a les femnmes, surtout elles : Rachel, Marie, Léa,Cécile, Chloé, Clotilde, Lady  Light, toutes venues de la vie…

     

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    Guy Debord en son Panégyrique :« Pour la première fois, les mêmes sont les maîtres de tout ce que l’on fait et de tout ce que l’on dit ». 

     

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    La lecture m’est vitale, et les livres aussi m’arrivent comme des messagers. Pas un hasard ainsi que je trouve, dans les entretiens de Kenzaburo Oé, intitulés L’écrivain par lui-même, ce que je cherchais précisément à ce moment-là.

    Le grand écrivain japonais  raconte ainsi comment le souci d’attention lui est venu, dès son enfance, et cela rejoint aussitôt ma réflexion actuelle sur l’attention défaillante de la plupart de nos contemporains, éparpillés et distraits par un peu tout et n’importe quoi. 

     

    Peu avant sa mort le vieux Maurice Chappaz, allongé sur une espèce de divan russe et couvert d’une capote miliaire, me disait avec son accent valaisan à couper au couteau: « Voyez-vous, ce qui manque vraiment de nos jours, que c’est un péché : c’est l’attention ! »  

     

    Au début de ses entretiens avec Oé Kenzaburo, Ozaki Mariko lui cite un de ses poèmes, fameux au Japon, datant de ses dix ans:

     

    Sur les gouttes de pluie

    Le paysage se reflète

    Dans les gouttes

    Un autre monde se retrouve.

     

    Puis elle dit au vieux Maître : «Le Oé Kenzaburô qui observe attentivement le monde existait donc déjà alors que vous alliez avoir une dizaine d’années ».

     

    Unknown-5.jpegEt lui : « Oui. D’une certaine manière, c’est grâce aux réprimandes des professeurs que « si on ne regarde pas avec attention,c’est comme si on ne regardait pas ». C’est ce que j’ai découvert par moi-même, c’était la sagesse de de mes jeunes années. Et j’ai ensuite réalisé que que regarder, mais aussi penser, c’était mettre en mots »

     

    °°°

    C’est en m’attardant le long des ruelles du quartier de Kanda, à Tôkyo, où voisinent des milliers d’échoppes de livres essentiellement japonais, que je me suis dit qu’il était merveilleux d’écrire et tout aussi légitime en somme de n’en rien faire, comme je l’ai éprouvé une autre fois dans l ‘Hyper U de Cap d’Agde devant les piles de best-sellers du monde entier, où j’eusse en vain cherché un roman de Oé Kenzaburô en dépit de son prix Nobel… 

     

    Ainsi est-ce à partir du moment où l’on entrevoit la totale inanité de l’acte d’écrire, au regard des galaxies ou des multitudes humaines, que la chose devient réellement intéressante et se recharge de sens comme, à Kanda ce même jour, en découvrant, dans telle immense librairie internationale,  les milliers d’ouvrages du monde entier accessibles dans toutes les langues, tout Proust en japonais ou tout Kawabata en français…   

     

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  • Mémoire vive (77)

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    À La Désirade, ce dimanche 1er février.– Nous brassons ces jours la neige, tombée en abondance et proche d’atteindre bientôt le mètre d’épaisseur. Mais c’est une autre matière que je m’impatiente de brasser ces prochains temps en reprenant sans tarder mes travaux d’écriture et, demain, de peinture, portraits de paysages et paysages de personnes. 

    °°°

    Le mérite de Michel Houellebecq est de voir les choses autrement, comme sous une loupe « sociale » ou « psychologique », sans faire pour autant de la sociologie ou de la psychologie, et de l’exprimer franchement et même fraîchement, sans crainte de déplaire. Il peut passer pour un mufle arrogant, mais il a des choses à dire, bien plus de choses que nombre de ses contradicteurs trop pressés d’évacuer le gêneur, ceux-là même qui voudraient que l’écrivain dérange, si possible sans être dérangés eux-mêmes. 

     

    images-2.jpegCe lundi 2 février. – Je suis arrivé la nuit dernière, après deux heures du matin, au bout de la cinquième et dernière saison de Breaking bad, très remarquable série américaine constituant une espèce d’exorcisme du Mal, incarné (entre autres) par le protagoniste Walter White, figure démoniaque du savant-ingénieur-chimiste génial et maléfique, imbu de son savoir-pouvoir et qui a trouvé, dans la fabrication de la drogue la plus pure, une façon de se venger d’une humiliation subie en ses jeunes années et, tout en affrontant un cancer en phase terminale, une manière de se poser en protecteur farouche de la famille… Autant dire que tout y est !

    Tout cela donne une sorte de thriller à rallonge magistralement ficelé, ponctué d’épisodes dramatiques, relancé par de surprenantes trouvailles narratives et développant une vraie réflexion sur le consentement avec, en arrière-fond, l’Amérique schizophrène, entre conformisme doucereux et violence extrême. 

    La chose tient plus du film d’auteur que du feuilleton divertissant, sous-tendue par une pensée et une vision critique réellement intéressantes. Il s’y trouve aussi de bons moments de cinéma – ce qui ne signifie plus grand’chose à vrai dire par les temps qui courent -, et tous les acteurs sont formidables. Par comparaison, regardant l’autre soir une ou deux séquences d’une série française à policière en uniforme bien repassé et aux yeux trop bleus, je me disais que ces sous-produits français (on aura la charité de ne pas parler des premiers essais de séries suisses) puent l’artifice à plein naseau et pèchent autant par la faiblesse de leur scénarios que par l’indigence tantôt guindée et tantôt outrée de leurs dialogues, alors que les Américains (ou les Anglais) ne forcent jamais le ton.    

    À La Désirade, ce mardi 3 février.– En ville ce matin où j’ai rejoint Julie, avec laquelle nous sommes allés voir Durak – L’Idiot de Yuri Bykov, que j’avais déjà vu à Locarno l’été dernier. Je me demandais si cette fable sociale et morale éminemment russe, dans l’esprit de Gorki, tiendrait une seconde vision et plairait à ma juriste internationale préférée ; et de fait,Julie semble avoir éprouvé autant d’intérêt, par delà la première scène très violente en milieu trash, à découvrir ce film, que j’en ai trouvé à le revoir, tout en distinguant, mieux que la première fois, ce qu’il a de forcé dans certains traits accusés des personnages, notamment les miséreux de l’HLM promis à l’effondrement et les « confessions » et autres« dénonciations » auxquelles se livrent les autorités pourries de la ville.

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    Comme nous descendions à Lausanne, avec Lady L. qui avait un autre rendez-vous,  j’aicommencé de nous lire La Fabrique d’absolu de Karel Capek, qui m’a aussitôt séduit par son bon air de conte conjectural, me rappelant mon séjour auprès de Pierre Versins, en 1972 ou 1973.

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    Ce que j’observe sur Facebook, et un peu partout, c’est le manque d’attention généralisé et la courses aux opinions et aux postures. On se connecte d’un clic, on zyeute et on zappe, on switche et on tague. On s’envoie un poke ou un cœur et ça jacasse à tout-va. Dans ce magma pourtant, ça et là, quelques échanges comme au café ou sur une place de village, quelques voix personnelle dans le désert en surnombre. 

     

    Philippe-Sollers-photo-Sophie-Zhang-artpress-fevrier14.jpgAu début j’étais plutôt sceptique à l’approche de Littérature et politique de Philippe Sollers, mais voilà pourtant la meilleure réponse du moment à la dispersion vague, aux opinions péremptoires non fondées et aux postures voyantes. Une écriture et une pensée sont bel et bien, ici, à l’œuvre dans la continuité têtue. Le prétendu dilettante travaille bien plus que ses détracteurs – dont j’ai été parfois -, en tout casil ne cesse de donner du grain à moudre et de filer de bonnes phrases heureuses.

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    images-3.jpegCe plot de Zola ne voyait pas ce que voyait son ami Cézanne, ainsi L’œuvre est-il le roman d’un philistin, assez cuistre en outre dans sa posture de parvenu parisien jugeant de haut son ancien pote de branloires  bronzéees dans le ruisseau de leur commune jeunesse. Mais on lui pardonne pour mille autres bonnes raisons.

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     À Zola qui essaie de lui démontrer la vanité de sa recherche des volumes (« Tu es doué. Situ voulais seulement soigner l’expression. Tes personnages n’expriment rien ! ») Cézanne répond fâché : « Et mes fesses, est-ce qu’elles expriment quelque chose? ».

    Le reproche de Zola revenant, en somme, à déplorer que Cézanne ne fasse pas de « littérature », constituant précisément son « progrès »sur l’époque.

     

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    Gare à l’intoxication. Entre les médias, les réseaux sociaux, les sollicitations incessantes de toutes parts, le risque de se disperser est pire que jamais aujourd’hui. S’en tenir ainsi à des points fixes dans le tumulte et le chaos.Pour ma pomme : l’Objet, ou plus exactement : les objets. UN, le roman ; DEUX, mes lectures et autres expériences ou rencontres et les notes qui en découlent ; TROIS, mes diverses relances quotidiennes sous forme de listes, de dialogues, de formes courtes ; QUATRE, la peinturlure.  Riches Heures toujours.

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    La notion d’exercice, de  sain et saint exercice, base de gymnasique physique et spirituelle quotidienne, stretching et tout le toutim, fonde la nouvelle somme de Tu dois changer ta vie de Peter Sloterdijk, possible coach d’un fitness philosophique en phase avec tous les aspects de la vie contemporaine, y compris la folie de Dieu et la méditation sur l’impôt. Avec quelques délirants de plus, dont un Michaux est le plus vif, la poésie au pied-léger va de pair avec une philosophie revitalisée « pour notre temps ».

    Unknown-11.jpegÀ La Désirade, ce jeudi 12 février.– Mort d’Anne Cuneo. Chère vieille emmerdeuse. Me restent surtout ses premiers livres, où elle parlait avec sincérité et précision de sa vie rugueuse, comme dans Le Temps des loups blancs, Gravé au diamant, Mortelle maladie ou encore Une cuillerée de bleu. 

    Respect à la bosseuse poursuivie par le guignon et à la self made writer-woman. Mais je donne tous ses livres à succès, pavés documentés mais dénués de la moindre grâce, pour une nouvelle d’Alice Munro ou une page d’Annie Dillard. 

    Je me rappelle l’ignoble comportement de Jacques Chessex à son égard, jaloux de sa popularité et me serinant qu’elle n’était pas ce qu’on peut dire un écrivain, ce qui me paraissait injuste. Mais quel acharnement chez elle à vouloir être tout, dans tous les genres, du rompol (moins que moyen) à la poésie (n’en parlons pas) en passant par le théâtre (très plat à ce que j’en ai vu) et le cinéma (non moins planplan), sans se donner le temps de respirer plus amplement de ressentir plus personnellement. 

    Ses Objets de splendeur, « autour » de Shakespeare, ou son Trajet d’unerivière, « autour » de Francis Tregian, sont des sortes de randos instructives mais dénuées de réelle épaisseur humaine. Bref, je respecte mais ne me joindrai pas aux hymnes locaux plus ou moins convenus et me demande ce qu’il « restera » de cette œuvre prolixe en songeant aux quelques nouvelles que je « sauve » de l’œuvre archi-célébrée naguère de Corinna Bille, aux romans d’Alice Rivaz qui s’imposent en revanche tranquillement avec le temps, à la prose toujours sidérante de Catherine Colomb, ou à Monique Saint-Hélier, entre autres « écrivaines » de nos régions toutes plus ou moins méconnues dans le VIe Arrondissement de Paris et à la cafétéria de l’Académie française, Ramuz et Cuneo compris…

    À La Désirade,ce vendredi 13 février. – Les salamalecs médiatiques accompagnant la disparition d’Anne Cuneo vont essentiellement à l’auteur « qui cartonne », selon l’expression hideuse qui nous a valu pas mal de titres accrocheurs ces dernières années, entre autres sornettes débitées sur« l’après-Chessex ». 

    Le « phénomène Dicker » en est la dernière cristallisation, dont le livre a commencé d’intéresser nos chers confrères à proportion de ses tirages et traductions. Rien de neuf en la matière, sauf en nos cantons coincés jusque-là dans le puritanisme de la paroisse littéraire romande louant de préférence le livre qui ne se vend pas après avoir été composé dans les « affres de la création », mais l’ennui est que  cette publicité tapageuse va de pair avec le rétrécissement proportionnel des vraies chroniques littéraires et, plus généralement, de l’attention portée à la littérature dont la télévision romande est plus que jamais championne du déni à moins de 50.000 exemplaires… 

     

    À La Désirade, ce samedi 14 février. – Passant à mon atelier de Vevey, où, chaque fois, dix ou cent titres des 7000 livres qui y sont entreposés  me font signe en s’exclamant « et moi !? », je tombe sur les Contre-censures de Jean-François Revel, dont j’avais oublié quel esprit vif était le beau-fils de Nathalie Sarraute et non moins paternel de Matthieu Ricard ( !), indépendant comme pas deux et passant si agilement entre réflexion politique et jugement esthétique, critique finement caustique (sa façon de déculotter Roger Peyrefitte pour ses Juifs est piquante à souhait) et grand lecteur de la société autant que des écrivains (Proust) ou des philosophes (Merleau-Ponty avec un gros bémol). 

    Après la disparition de Simon Leys et de Philippe Muray, qui laisse un tel vide dans le rang des essayistes non alignées, le retour à un Revel est une bonne façon, aussi, de se rappeler que l’intelligence et la sensibilité perdurent après la mort de leurs hérauts…   

     

    images-3 2.jpegÀ La Désirade,ce dimanche 15 février. -  Achevé la lecture de Meursault, contre-enquête de Kamel Daoud. Vraiment de premier rang, et me donnant envie de revenir à L’étranger, lu pour la première fois il y a… cinquante ans ! et auquel j’ai préféré, les années passant, La Chute ou Le premier homme. Mais le roman de Kamel Daoud nous ramène, je crois, à un Camus à la fois clair et complexe, ardent et déchiré, mille fois plus humain que l’écrivain assez ignoblement taxé d’ « auteur pour les classes terminales » et dont je suis ému de me rappeler que j’ai récité,en 1964, devant trois cents ados, les Noces à Djemila apprises par coeur dans la cave de la maison de mes parents... 

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    Maxou10.jpgSoirée avec Max, que je trouve de plus en plus intéressant en dépit des petits conformismes de son âge qui me font le traiter de « coiffeuse camerounaise ». Mais combien il évolue et progresse ! Au retour de son récent séjour au Cameroun, il s’est lancé dans un nouveau roman où il me dit aborder, non sans inquiéter sa chère mère, le thème tabou du colonialisme français et, plus largement, les composantes individualisées de l’Indépendance, par la voix d’une vieille femme qu’il a rencontrée là-bas au fil de son périple. 

    Je me réjouis de constater que mon poulain piaffant, plus gay pinson que jamais et tortillant de la croupe comme une gazelle subsaharienne, est en réalité bien plus virilement engagé dans son travail d’écrivain que nombre de mecs « qui en ont » et  ne fichent rien, sans parler de tant de jeunes lettreux qui tournent en rond dans leur petit manège bien chauffé.

     

    À La Désirade,ce lundi 16 février. -  Cet après-midi au cinéma avec Sophie, après un repas sous le Cervin mandarine du Buffet de la Gare, pour L’Enquête, thriller médiatico-économique assez captivant et salutaire, consacré aux magouilles politico-financières de Clearstream &Co. Or sans révéler beaucoup de faits nouveaux sur ce scandale à épisodes déjà largement documenté,  ce film a le mérite d’illustrer, par le truchement de Gilles Lellouch dont le moins qu’on puisse dire est qu’il « assure », le courage intraitable d’un homme « contre tous », y compris ses chers confrères, en la personne de ce Denis Robert dont l’acharnement m'évoque  sur d’autres territoires, celui de mon ami Jean Ziegler. 

    On objectera peut-être qu’un tel film ne va « rien changer » à la corruption des plus hautes autorités de la République, mais le fait que la France n’ait pas accordé un sou au réalisateur, qui a trouvé meilleur soutien au Luxembourg ( !) en dit long sur la mauvaise conscience d’une certaine élite continuant, par ailleurs, à faire la leçon aux autres…

     

    À la Désirade,ce mardi 17 février. – Je reçois à l’instant, des éditions Albin Michel, un petit Plaidoyer pour la fraternité,amorcé dans l’urgence le 12 janvier 2015 par Abdennour Bidar, et que j’ai lu en une heure. 

    J’en retiens,notamment, trois citations importantes :

     

    « Tout ce qui monte converge, disait Teilhard de Chardin. Cette invitation supérieure à rendre le mal par le bien est le point de convergence de toutes les sagesses de l’humanité, qu’elles soient religieuse ou profanes.On l’appelle communément la règle d’or humaniste, présente sous des formes diverses aussi bien dans le bouddhisme, l’hindouisme, le confucianisme, que dans les monothéismes et les philosophies ou les morales athées. Ce n’est pas seulement « : Ne fais pas à autrui le mal que tu ne voudrais pas qu’il tefasse. » Ce serait trop peu ! C’est : « Fais à autrui toutle bien que tu voudrais qu’il te fasse. »

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    « La France doit donner aux musulmans des lieux de savoir, des lieux de culture…au lieu de chercher encore et toujours à leur donner des chefs religieux comme ceux du Conseil français du culte musulman ! Quand donc arrêtera-t-on de considérer les musulmans de Frabce comme un troupeau gardé par des bergers – des gardiens du culte ! Même si l’urgence est de s’assurer de la formation des imams à nos valeurs, de marginaliser voire de réprimer ceux qui racontent n’importe quoi dans leurs prêches du vendredi en contradiction avec ces valeurs, le problème de fond est au-delà. Beaucoup de nos concitoyens de culture musulmane cherchent à élaborer un rapport libre à leur culture, à leur religion – et non pas à être sempiternellement encadrés par des clercs, même éclairés. Ils en ont assez des prêchi-prêcha ! »

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    « Je suis croyant. Mais je ne crois pas plus ni moins en un Dieu qui serait celui des musulmans que celui des juifs, des chrétiens ou des hindous. Je crois que tous les chemins mênent à l’homme – c’est-à-dire au divin en l’homme,en tout être humain, et là on n’est pas très loin de la fraternité. Je crois en philosophe et en mystique, c’est-à-dire en étant critique à l’égard de la religion au nom d’une expérience intérieure. Une expérience spirituelle à la profondeur de laquelle la religion conduit rarement, et dont trop souvent elle prétend pourtant détenir le monopole. Je n’ai rien contre l’athéisme parce que j’ai rencontrée des athées plus mystiques que bien des croyants.

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    Le roman pour sortir de la dialectique binaire énervée (et plus énervante que jamais ces derniers temps) des médias.

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    On demande de vrais comiques pour détendre la situation au lieu del ’exacerber : non de ces démagos de droite ou de gauche à la Dieudonné, comme naguère un Guy Bedos, mais de vrais comiques irrécupérables à la Desproges ou à la Devos ou mieux, tant qu’on y est : à la Molière.

    Philippe Muray, dans une de ses chroniques d’Après l’Histoire, distingue précisément ce qui sépare fondamentalement l’humour de Dieudonné et celui de Desproges. De fait, Desproges peut balancer les pires énormités, sans y croire. Sa mauvaise foi est garantie de santé et de liberté. Tandis que Dieudonné croit, hélas, en ce qu’il dit à des rieurs qui le croient aussi. De même Guy Bedos a-t-il toujours été, à sa façon, un bien-pensant.

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    Achevé la lecture du Plaidoyer pour la fraternité d’Abdennour Bidar. Très bien. Après le plaidoyer « côté Français » d’Edwy Plenel, rappelant les tenants républicains de la laïcité et ne s’attardant guère, à vrai dire, sur le changement de mentalité qu’on est en droit d’attendre des musulmans crispés sur leurs seules réquisitions, on entre ici en matière sur une réalité musulmane vécue de l’intérieur par un esprit à la fois libre et responsable. Quant aux dix propositions constructives finales proposées par l’auteur, elles sentent par trop la passion institutionnelle à mon goût, mais le fond du message est d’un homme de bonne volonté.

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    Unknown-4 2.jpegMon ami Richard Dindo parle des critiques de cinéma comme de perroquets. L’un d’eux sévit cette semaine dans un hebdo de nos régions, taxant Homo faber de film « cérébral » et qualifiant le texte de Max Frisch de « dissertation ». On croit rêver, mais non : dès qu’un film rompt avec les poncifs du spectacle et les standards formatés - chez Godard à l’enseigne d’une pensée-en-images éclatée, et chez Dindo à l’écoute d’un verbe modulé dans les temps des âges divers, des sentiments et des expériences -, la conclusion paresseuse pointe la « prise de tête ». 

    Les mêmes perroquets dont la semi-culture entrevoit de la métaphysique dans le dernier gadget interstellaire genre Gravity, répétant ce qui a été dit dans Libé qui répète ce qui a été écrit aux States, ne voient pas la chose la plus simple : à savoir la réflexion d’un homme dont les convictions positivistes un peu raides se trouvent déjouées par le passage de trois femmes dans sa vie.  

    Mais bon : l’ami Dindo n’est pas tendance, au contraire des perroquets qui, demain, ne verront pas en American Sniper ni une « dissertation » ni un « film cérébral », moins encore un film démagogique et patriotard vu que ni L’Obs ni Libé ne l’ont dit…

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    Unknown-9.jpegAprès le déferlement de saletés non fondées  qu’on a pu lire ces temps, sur le site de droite plus ou moins extrême Boulevard Voltaire, à propos  des musulmans et de l’islam, j’ai très touché  de lire Blasphémateur ! de Waleed El-Husseini, jeune Palestinien persécuté, dans son pays, au motif qu’il refuse de « penser musulman » comme il l’a affirmé haut et fort sur Internet. 

     

    D’aucuns diront que l’auteur, réfugié à Paris, fait le jeu des sionistes. Ses compatriotes ont d’ailleurs amplement relayé la calomnie selon laquelle il était payé. D’autres, fidèles à un islam modéré, lui reprocheront de dénigrer leur religion. Ils auront raison, comme on peut reprocher au biologiste Richard Dawkins (cité par Waleed) de dénigrer le christianisme et toute croyance non fondée scientifiquement, dans son illustrissime Pour en finir avec Dieu. 

    Mais a-t-on foutu Dawkins en prison ? Et comment ne pas compatir avec un jeune homme dont (presque) tous les amis de son âge se détournent au motif qu’il ose dire tout haut ce qu’eux se contentent de penser tout bas ? 

     

    Notre ami Rafik nous a déjà raconté cette horreur, consistant à voir des gens éduqués tels que son oncle médecin comptabilisant ses houris, ou les profs de la fac de lettres de Tunis, plier l’échine devant la religion proclamée essence d’Etat. 

    Traître alors que Waleed ? Exactement le contraire : fierté de la nation palestinienne, au même titre que le grand poète mécréant Mahmoud Darwich, vrai croyant à sa façon, comme se dit croyant Abdennour Bidar. 

    Mais je n’ai pas dit l’essentiel, qui est que le témoignage du jeune Palestininen  dégage cette chaleur humaine, cette fraternité dont Abdennour Bidar déplore la raréfaction dans nos sociétés. 

     

    Et cela juge définitivement, à mes yeux, l’idéologie intégriste, qu’elle soit d’inspiration coranique, sioniste ou souverainiste à la française, qui stigmatise tout ce qui n’est pas d’origine et propre à sa seule secte : ce terrible froid du cœur. 

  • Celles qui ont des filles au pair

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    Celui qui est resté vieille fille après l’opération / Celle qui a quitté la brousse pour la jungle urbaine/ Ceux qui assistent au défilé en pères tranquilles / Celles qui se les échangent à l’essai / Celui qui ramasse le pain sec que la Valdôtaine laisse traîner sur l’armoire bressane / Celle qui a intégré HEC grâce au coup de pouce de la cousine de Ségolène Royal l’amie du peuple /  Ceux qui ont même confié leurs fils à une Ougandaise il est vrai fille de prince / Celui qui en a compté sept dans la famille recomposée genre élevage de hamsters / Celle qui fait des permanentes à ses patronnes au titre d’ancienne hair-stylist à Yaoundé / Ceux qui les ont toujours prises par paires pour le prix d’une avec accès au jardin mais interdiction de fumer dans le hamac / Celles qui se sont liées d’amitié avec certaines au déplaisir de leurs concierges / Celui qui se dit homme de ménage de direction / Celle qui chipe un bibelot dès que Madame trompe Monsieur/ Ceux qui ont appris diverses langues à leur contact au demeurant platonique quoique pas toujours / Celui qui a constaté que la Moldave laissait des traces sur son vélo d’appartement / Celle qui a parlé du Coran au fils de la thérapeute belge / Ceux qu’interloquait Jessica (nom d’emprunt) quand elle leur annonçait d’autorité qu’ensemble ils allaient faire de grandes choses / Celles qui ont reconnu un véritable instinct maternel à Ruedi l’Appenzellois par ailleurs lutteur à la culotte / Celui qui en a connu qui étaient à la fois hallal et pas chères / Celle qui a initié sa carrière en management de proximité au service de Bernard-Henri Lévy resté à l’écoute du prolétariat de couleur / Ceux qui ont laissé Aïcha-la-perle choisir entre Madame et Monsieur après leur divorce entre gens civilisés, etc.