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Evviva La Commedia !


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Retour au livre total. Premières notes.

De L'Enfer et du chemin. (1)

Je reprends une fois de plus, ce 10 août 2023,  la lecture suivie et e commentaire de La Divine comédie de Dante, initialement fondée sur le coffret contenant les trois volumes de la traduction de Jacqueline Risset en édition bilingue - la plus recommandable il m'a semblé, pour notre langue, même si de nouvelles traductions de L'Enfer ont paru ces dernières années, sous les plumes de Danièle Robert (2016) et de Michel Orcel (2019) alors que René de Ceccaty publiait (en 2017) une nouvelle version de l'intégrale Commedia en octosyllabes...  
J’y reviens aussi, mais avec un regard de plus en plus sceptique,  dans la foulée de Philippe Sollers en son dialogue avec Benoît Chantre, intéressant quand Sollers oublie de tout ramener à lui, et, aussi, en compagnie du bon François Mégroz, qui nous y a introduit vers 1966-67 au Gymnase de la Cité de Lausanne et dont la traduction très littérale, et le commentaire benoît, sans nulle prétention littéraire, sont pourtant appréciables et souvent éclairants.

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C’est notre cher prof, d'ailleurs,  qui nous a parlé le premier, à propos de La Divine Comédie, d’un « livre total », comme il n’y en a que quelques-uns dans l’histoire de la littérature. 

Or ce qui m’intéresse plus précisément, à présent, c’est que ce livre-somme soit, comme le note Jacqueline Risset, encore «en avant» de nous. Du dehors, et notamment à travers la perception qu’il nous en reste du XIXe siècle, l’œuvre peut sembler anachronique et relevant en somme du musée. Du dedans, en revanche, et dès qu’on y pénètre, dès qu’on se plonge dans ce fleuve verbal, dès qu’on est pris dans le mouvement irrépressible des vers, un nouveau présent s’instaure bonnement, que la traductrice a raison de comparer avec le présent en marche du Temps retrouvé de Proust.

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C’est en outre la base, pour moi, d’une nouvelle réflexion sur la vision panoptique. Tout part de l’enfer mais tout porte à en sortir, dès le début. Dès le début on sait d’ailleurs que Dante en est sorti. Dès le début l’œuvre est donnée pour travail de mémoire. D’emblée on sait que l’Aventure, contenant la matière d’une vie entière, a duré peu de temps. Plus précisément : un rêve de trois jours, entre le jeudi saint et Pâques 1300. Ainsi tout le poème apparaît-il comme un fantastique compactage. Or, on pourrait dire que ce condensé est à la fois celui du Moyen Âge et de notre temps, et que le chemin de l’Enfer passe par Auschwitz. Question d’Organisation.

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« La grande réserve du mal dans l’univers : L’Enfer de Dante joue dans notre culture un rôle de référence absolue, et curieusement ambiguë », note encore Jacqueline Risset. Au titre de l’ambiguïté, ou plus précisément de l’équivoque à son plus bas niveau, on peut citer évidemment le jeu vidéo lancé sur le marché où L’Enfer est prétexte au déchaînement de toutes les violences. Mais il va de soi que cette réduction n’est qu’une récupération débile de la dramaturgie superficielle de l’ouvrage, excluant sa compréhension par sa conclusion pavlovienne que ce sont les violents qui l’emportent – pure négation du Chemin.

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« Nel mezzo del cammin di nostra vita », lisons-nous au premier vers du premier chant, et le quatrième vers du deuxième chant dira : «Je m’apprêtais à soutenir la guerre du long parcours et de la compassion »…
Et tout est là: le chemin, le parcours, et c’est un travail de chaque jour, et quelle lecture engageante aussi. Andiamo...


Dante. La Divine comédie. Présentation et traduction de Jacqueline Risset. Garnier Flammarion.

 

Philippe Sollers. La Divine comédie. Entretiens avec Benoît Chantre. Gallimard. Folio.

 

François Mégroz. La Divine comédie. Traduction commentaire littéral. L’Age d’homme, en trois volumes.

 

Dante. Enfer, traduit de l'italien, préfacé et annoté par Danièle Robert, édition bilingue, Actes Sud, 2016.

 

Dante, La Divine Comédie, nouvelle traduction de René de Ceccaty. Points/Poésie, 2017.

 

Dante, L'Enfer, traduction nouvelle de Michel Orcel. La Dogana, 2019.

 

Commentaires

  • Bonjour,
    Je me souviens avec toi de François Mégroz qui nous a initiés à la Divine comédie. Et aussi au Guépard. Lire des oeuvres dites difficiles dans le texte, sans encore connaître la langue, quelle gageure ! J'en lis quelques pages au hasard, mais j'ai bien envie de me procurer cette nouvelle édition bilingue.
    Bonne journée.
    SB

  • Bonjour Jean-Louis Kuffer,
    La version de La Divine comédie que j'ai, est une traduction de Jacqueline Risset, avec préface et notes. Cette édition comporte des illustrations de Botticelli.
    Bien que je ne connaisse pas l'italien, j'ai moi aussi envie de me procurer cette version bilingue dont vous parlez ; une belle façon de fréquenter cette langue magnifique.
    Un Chant par jour. Magnifique idée. Que je vous vole. Seule la discipline...
    Les livres que vous citez, de Sollers et de François Mégroz seront aussi les bienvenus.
    Merci d'ouvrir ainsi notre journée...
    Très belle journée à vous.

  • Dame, j'avais laissé une longue réponse à Sylvie et Michèle à propos de nos souvenirs du Gymnase de la Cité, pour Sylvie, avec l'excellent Mégroz, et de ce qu'on peut découvrir aujourd'hui de toujours neuf dans la lecture si possible bilingue de la Divine Comédie, mais le Système n'en a pas voulu. Je reprends donc...
    Même si l'on ne maîtrise pas complètement l'italien, ce qui est mon cas, le retour constant à la musique de la langue, à chantonner, et plus encore à son rythme, qui nous tire littéralement en avant, est essentiel pour que le texte prenne littéralement corps et donc âme - car c'est évidemment tout un. D'où la reconnaissance due à Jacqueline Risset, dont l'introduction, sur le texte et sur sa traduction, est également lumineuse.

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