Quand j’étais môme, déjà, je voyais le monde comme ça : j’avais cassé le vitrail de la chapelle avec ma fronde et j’ai ramassé et recollé les morceaux comme ça, tout à fait comme ça, j’te dis, et c’est comme ça, depuis ce temps-là, que je le vois, le monde.
Le monde est comme un vitrail recollé, c’est pourtant vrai : j’aurai passé des jours et des jours, depuis ces années-là, à genoux devant la chapelle qu’il y a un peu partout, à chercher les morceaux du vitrail dans l’herbe et à les rassembler, le front bas, avant de les recoller, du bon côté de la lumière, les yeux au ciel.
Et voilà le monde, j’te dis pas : faut l’avoir fracassé et recollé pour l’aimer comme ça.
Image: Philip Seelen