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Le test Houellebecq

 

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À propos de Soumission et de son interprétation.

Soumission n’est pas plus un pamphlet contre l’islam qu’une apologie de celui-ci. Comme l’ont bien vu et écrit Laurent Nunez et Jacques Julliard, dans leurs analyses de Marianne, ce roman est bien plutôt le portrait d’un intellectuel un peu flagada, « collabo » par veulerie, idiot utile comme il en prolifère…

 

Lire Houellebecq comme il faut ne va pas de soi. C’est en tout cas ce que je me répète en annotant un petit essai admirable de Bernard Maris, assassiné la semaine passée avec ses camarades de Charlie-Hebdo, intitulé Houellebecq économiste. J’y reviendrai car il me semble indispensable  de recentrer notre lecture du plus pénétrant des observateurs de notre monde, parmi les écrivains français actuels, dont Bernard Maris illustre l’originalité de la réflexion en revenant sur les thèmes essentiels de son œuvre et leur modulation.

 

Dans l’immédiat, le texte de Jacques Julliard intitulé Figures du collabo, paru cette semaine dans Marianne, est à lire et à méditer.

 

Jacques Julliard situe le protagoniste de Soumission dans le droit fil des intellectuels séduits par telle ou telle idéologie, des gens de lettres plus ou moins « collabos » (tels  Céline ou Rebatet, mais aussi Chardonne ou Jouhandeau) aux « compagnons de route » du communisme, d’Aragon à Sartre, entre tant d’autres de moindre format.

 

Houellebecq écrit :«  Tant d’intellectuels au cours du XXe siècle avaient soutenu Staline, Mao ou Pol Pot, sans que cela leur soit jamais vraiment reproché. L’intellectuel en France n’avait pas à être responsable, ce n’était pas dans sa nature ». 

 

De fait,si vous reprochez à un Philippe Sollers de parler aujourd’hui de Mao comme d’un des plus grands criminels de tous les temps, après l’avoir encensé, vous commettrez une faute de goût, n’est-ce pas ? 

 

Mais où se situe Michel Houellebecq par rapport à son personnage ? La question se pose évidemment, dans la mesure où jamais le romancier ne « dénonce » le protagoniste de Soumission.

 

Jacques Julliard : « Cette question n’a strictement aucun intérêt, sauf pour les vigilants à l’âme de flics, à l’affût d’un éventuel « dérapage ». Il m’importe peu de savoir ce que l’individu Houellebecq pense ou ne pense pas de notre société. Il me suffit qu’il m’aide à la décrire et même à la décrypter ». 

 

Avant de conclure en des termes auxquels je souscris absolument : « Le roman de Houellebecq est un puissant discriminant : il se pourrait que, dans le futur immédiat, il contribue à remodeler la géographie des passions intellectuelles dans la société française. Les réactions de chacun à la lecture de ce livre en disent long sur sa sensibilité propre : il y a désormais, en matière politique, un test Houellebecq ».

 

Et j'ajouterai pour ma part: pas qu'en matière politique, car Michel Houellebecq, comme le rappelle Bernard Maris, est  essentiellement un écrivain et que la Littérature, avec une grande aile, est interpellée au premier chef par le test Soumission...  

Commentaires

  • Il n'empêche, sans avoir l'âme "flic", on voudrait savoir si Houellebecq se confond avec son personnage ou non. Question certes futile sur un plan strictement littéraire (là, seuls nous importent les personnages de papier), mais qui n'est pas dénuée de fondement.

  • Il me semble que ce n'est pas percevoir son humour, assez peu français à vrai dire, que de le confondre avec son personnage, qu'il a sans doute nourri d'une part de lui, comme Dostoïevski a nourri, d'une part de lui, tant Stavroguine qu'Aliocha Karamazov. Du moins le Russe n'avait-il pas à se justifier sur les plateaux de télé. En Allemagne, MH a déclaré que Soumission n'était pas un roman islamophobe, ce qui est vrai, tout en soutenant crânement qu'on pouvait très bien publier un roman islamophobe. Après Sade, Nietzsche ou Rebatet conchiant les chrétiens, entre cent autres exemples, on ne va pas se gêner n'est-ce pas...

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