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L'Odyssée Zéro de l'espace

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À propos de Gravity, vertige d'ennui...

 

On annonçait un film hollywoodien hors norme, pour ainsi dire d'avant-garde et métaphysique de portée. D'une seule voix dithyrambique, les médias ont claironné que Gravity était le film à voir absolument ces jours, positivement renversant. Comme je suis curieux de nature et  point encore blasé en ce qui concerne les deux infinis pascaliens, j'ai couru ce soir voir la chose. Et pour voir quoi ? Strictement RIEN.

De fait, Gravity représente à mes yeux le vide absolu en matière d'idées, de psychologie et de narration, de contenu et d'invention formelle. Sur un scénario indigne même d'une bande dessinée, réunissant des personnages abyssalement creux, développant une action sans le moindre intérêt pour qui s'est un tant soit peu intéressé à la science fiction littéraire ou cinématographique, ce film n'existe que par son appareillage technique performant et ses images, c'est à savoir exactement: RIEN. N'importe quel débile, par les temps qui courent, moyennant quelques millions de dollars, une Barbie noiraude et un Barbie mec aux yeux bleus, peut fabriquer un tel objet. Comme il y a pas mal de temps que l'usine à rêve d'Hollywood n'a plus pour visée que de faire pisser le dollar, on ne s'en étonnera guère. En revanche, plus étonnant est l'empressement de la critique à se pâmer, à croire qu'elle na' plus d'autre vocation que publicitaire !

Mais je suis injuste ! Il y a quand même un soupçon de  contenu là-dedans. Même qu''un confrère futé a entrevu, dans la conclusion de Gravity, non seulement une dimension philosophique mais un message subliminal de type darwinien. Les créationnistes n'ont qu'à bien se tenir: Gravity roule pour l'Evolution ! De fait, non point sortie d'une côte d'Adam mais chue de l'espace, l'Eve du film (Sandra Bullock en tenue de fitness spatial) se retrouve dans une manière de soupe originelle au fond de laquelle elle ondule, telle la sirène ou l'anguille, avant de toucher le sable du rivage quelle remonte comme la salamandre, notre soeur ancienne, avenir de l'homme qui lui souffle en l'occurrence à l'oreille: allez maintenant, on rentre à la maison...          

Commentaires

  • Cher Jean-Louis,

    Je ne sais pas s'il est utile ou même possible de défendre un film, tant je crois que, de plus en plus, la critique littéraire ou cinématographique est, dans sa pratique journalistique (pour la distinguer de la critique universitaire), la justification rationnelle a posteriori d'un goût ou d'un dégoût pour un objet particulier, livre ou film, avec tout ce que cela comporte comme contingence première.
    Mais je m'essayer à poser ici quelques arguments en faveur de Gravity.
    En premier lieu, il ne s'agit pas d'un film de science-fiction, il ne faut pas se tromper de genre. Je ne sais pas exactement à quel genre il faut rattacher ce film qui joue sur plusieurs registres, mais pas celui de la science-fiction. Le film joue aussi à décevoir nos attentes narratives stéréotypées (modelées par 50 ans de pop culture et de séries Z): par exemple, à deux reprises, le retour du personnage interprété par Clooney semble imminent, annoncé par des indices, mais ce ne sera pas le cas. Ce film est aussi celui de la perte des signes, pour parler un langage barthésien, on passe d'une navette américaine, aux interfaces balisées et pleinement maîtrisées, à une capsule russe dont le personnage comprend plus ou moins le fonctionnement (moyennant l'usage du mode d'emploi), pour finir dans une capsule chinoise dont les signes sont incompréhensibles et dont la maîtrise passe par un processus essai/erreur purement empirique (sans balisage sémiotique préalable). Au fond, cela revient à partir d'un univers sémiotique maîtrisé par l'intériorisation des procédures connues par coeur, pour passer à un monde plus ou moins compréhensible grâce à un mode d'emploi, pour aboutir à un monde aux signes incompréhensibles.
    Pour conclure, je crois que l'argument de l'absence supposée de scénario n'est pas un argument en faveur ou en défaveur de la qualité d'un film. Des scénarios baroques et alambiqués mènent parfois à de mauvais films. Il faut reconnaître que Gravity repose sur une histoire très linéaire, racontée de façon elle aussi très linéaire. Mais je crois qu'il s'agit d'un parti pris très conscient et non d'une absence de volonté narrative.

  • clooney la double... déjà lui dans le remake de solaris

  • Cher Jean-Louis,

    Ceci me fait penser à l'histoire (que vous connaissez sans doute) et dont j'ai oublié la source: un astronaute incroyant discute avec un neurologue croyant. Le premier dit au second que jamais lors de ses incursions dans l'espace il n'a vu Dieu. Et le second lui répond qu'il a opéré de nombreux cerveaux et qu'il n'y a jamais vu de pensées.

    Vous attendiez un film sur l'espace en espérant y trouver une métaphysique ou une pensée transcendante, or rien. Je suis allé voir un film sur l'espace, dans la ligne de Moon (le film de Duncan Jones), voire (sous certaines réserves) d'Apollo 13, et je crois y avoir vu bien plus que rien. Une divergence sur pas grand-chose, n'est-ce pas?

  • Cher Robert,

    Pour ma part j'y ai quand même retrouvé les sensations éprouvées sur le Gand Huit interstellaire d'Europa Park où les cris de radieux effroi de notre fille de 8 ans se sont mêlés aux miens, donc passons pour le Grand Noeuf...

  • Et comme chacun sait, qui vole un noeuf vole un boeuf...
    Pardonnez mon humour facile et attendons donc les prochains méfaits en grand huit ou grand neuf pour juger de l'oeuvre du cinéaste Cuarón, voulez-vous?
    Ce fut un plaisir de discuter avec vous,
    Amicalement.

  • Bonjour,
    J'ai beau avoir de plus en plus de difficultés à supporter les blockbusters, j'ai du mal à voir comment on peut ne remarquer en "rien" que celui-ci s'en distingue franchement, même s'il n'est pas un "chef d'oeuvre".
    M'interroge d'ailleurs comme bien des films labellisés en France "art et essai" ont des scénarios aussi squelettiques qu'ici et comme dans un cas on peut spontanément parler d'épure et d'un autre de pauvreté...

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