Chemins de Traverse ; lectures du monde 2000-2005
Le vingtième livre de JLK vient de paraître chez Olivier Morattel.
Postface de Jean Ziegler.
Vivre, lire et écrire : cela peut être tout un. Ce triple mouvement fonde en tout cas le projet, la démarche et la forme kaléidoscopique de ces Lectures du monde, dont voici le quatrième volume publié après L’Ambassade du papillon, Les passions partagées et Riches Heures.
Sous la forme d’une vaste chronique étoilée touchant aux divers genres du carnet de bord et du reportage littéraire, de l’aphorisme et du trait satirique, du récit de voyage et du journal d’écrivain au travail, ce livre tient d’un roman « dicté par la vie », reflet vivant de la réalité telle que nous la percevons par les temps qui courent, profuse et chatoyante, contradictoire, voire chaotique.
Sous le regard de l’écrivain en quête de plus de clarté et de cohérence, cette réalité participe tantôt du poids du monde et tantôt du chant du monde. La fin de vie d’un enfant malade, l’agonie muette d’une mère, les nouvelles quotidiennes d’un monde en proie à la violence et à l’injustice constituent la face sombre du tableau, qui devient vitrail en gloire sous la lumière de la création, à tous les sens du terme.
D’un séjour en Egypte à d’innombrables escales parisiennes à la rencontre des écrivains de partout (tels Albert Cossery, Ahmadou Kourouma, Jean d’Ormesson, Carlos Fuentes, Amos Oz, Nancy Huston et tant d’autres), de Salamanque à Amsterdam, d’Algarve à Toronto, le lecteur suit un parcours zigzaguant qui ramène à tout coup au lieu privilégié de La Désirade, sur les hauts du lac Léman, au bord du ciel et dans l’intimité lumineuse de la « bonne amie ».
Grandes lectures (Balzac, Dostoïevski, Proust, Céline), passions partagées de la peinture et du cinéma, pensées de l’aube au fil des saisons, effusion devant la nature, fusées poétiques, aperçus de la vie littéraire et de ses tumultes (Jacques Chessex entre insultes et retours amicaux), tribulations de l’amitié (la présence indomptablede Marius Daniel Popescu), clairières de la tendresse (la bonne présence des filles de l’auteur), coups de gueule contre l’avachissement au goût du jour ou la perte du sens dans un monde voué au culte de l’argent : il ya de tout ça, à fines touches douces ou dures, dans Chemins de traverse.
Extrait de la Postface de Jean Ziegler à Chemins de traverse
« Mon cher Jean-Louis,
Je passe mes journées au Conseil des Droits de l’homme – les nouvelles de l’horreur commise sur des hommes, femmes et enfants syriens par des forces dites de « sécurité », dirigées par des fous sanguinaires, défilent… L’indifférence des ambassadeurs occidentaux est abyssale.
La nuit je te lis. Tes Chemins de traverse sont une traînée de lumière dans l’obscurité opaque. « Le plus de choses dites avec le moins de mots ». Tu as réussi magnifiquement à satisfaire l’exigence que tu t’es adressée à toi-même. Ta langue brille de mille feux. Ces carnets, ces notes, ces portraits, ces fulgurances philosophiques respirent la liberté.
(…)
J’ai aimé, j’aime tes portraits, l’exactitude de ton trait. Et aussi la profonde sympathie qui porte ta parole. J’ai connu l’élégant et à moitié ermite de L’Hôtel La Louisiane, Albert Cossery, qui portait l’Egypte en soi partout où, dans son exil, il allait. Et Kourouma, le géant ivoirien. Michel Polac, l’amer reclus… je les ai connus. Et les retrouve dans leur vérité, celle que tu fais surgir – somptueusement -, de ton interlocuteur.
Ton sous-titre est « Lectures du monde ». Anodin en apparence. Mais quelle lectures ! Tu écris : « Le vent dans l’herbe ou sur le sable est une chose et les mots pour l’évoquer participent d’autre chose ». Cette autre chose, bien sûr, est la littérature que tu habites, qui t’habite merveilleusement.
« Capter le souffle de la vie », cette ambition que tu évoques tout au début de ton livre, est pleinement réalisée, réussie par la force de ton imaginaire, de ton éblouissant talent.
Tes carnets se nourrissent de la mémoire, de la mémoire ressuscitée bien sûr. Je me souviens d’un passage des Mémoires d’Hadrien de Yourcenar : « La mémoire change et vit. Du bois mort s’enflamme tout à coup et la mémoire devient un lumineux autodafé ».
Toi, dans ton livre, tu creuses plus profondément, plus énergiquement l’humus de nos pensées, nos angoisses, nos espérances. Jusqu’à déterrer l’évidence que voici et que je trouve superbe : « La mémoire est une personne et plus encore : la chaîne des personnes et la somme des vivants ».
Jean-Louis Kuffer. Chemins de traverse; Lectures du monde 2000-2005. Olivier Morattel éditeur, 420p.
Commentaires
Ah, vieux briscard, lecteur assidu du monde, félicitations !
Me tarde de te lire !
Amitiés
Félicitations, JLK. C'est tout simplement magnifique, et je ne manquerai pas de lire ce livre. Sinon, ravie de cette soirée de présentation d'un beau projet de film, je te prie de bien vouloir saluer un certain Chat ;-)
Merci Myriam. Oui c'était bien, et je te remercie de ta présence. Figure-toi que Jacob a retiré la scène du Juif pour l'exemple qui m'a chiffonné, seule allusion m'a-t-il dit à la Suisse de 1942. Donc je lui ai recommandé de la réintroduire autrement, plus crédible en tout cas. Le refoulement des Juifs à la frontière est bel et bien une réalité, mais c'est son récit qui m'a paru téléphoné et sonnant faux. Du coup il va m'envoyer son script. Je te raconterai...
Warm congratulations and happy celebration Juan-Luis
Amazing literary journey
With gratitude
Clavecine