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Grande dame de gai savoir

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Jacqueline de Romilly incarnait l’intelligence du cœur.

C’est une figure lumineuse de la culture française qui s’est éteinte samedi à Paris en la personne de Jacqueline de Romilly, âgée de 97 ans. Spécialiste de la Grèce antique (et plus particulièrement de Thucydide et du Ve siècle avant Jésus-Christ), elle avait été la première femme à entrer au Collège de France où elle enseigna « la Grèce et la formation de la pensée morale et politique », et deuxième femme (après Marguerite Yourcenar) élue à l’Académie française, en 1988.

Née à Chartres en 1913, Jacqueline David perdit son père Maxime (jeune philosophe prometteur) au début de 1914 mais vécut, grâce à sa mère, une jeunesse heureuse, « merveille de tendresse et de bonheur ». Sortie de l’Ecole normale supérieure en 1936, nommée professeure à Bordeaux, elle épousa Michel de Romilly en 1940, année où les lois antijuives l’exclurent de l’enseignement, qu’elle retrouva en 1945.

Dans son livre Pourquoi la Grèce ? (De Fallois, 1992), l’un de ses préférés, Jacqueline de Romilly a expliqué le choix de son premier sujet d’étude, le « miracle grec» marquant la découverte de la liberté, de la douceur, du pardon et de toutes les valeurs « qui rectifient la stricte justice ». Loin de considérer la Grèce «comme un Etat auquel nous devrions revenir» Jacqueline de Romilly s’efforçait de défendre et d’illustrer l’invention de la démocratie et de la liberté vécue à Athènes : « Les Grecs avaient le sens de l’essentiel, autant les philosophes que les poètes ».

«Ce qui me réjouit le plus, c’est d’acquérir une nouvelle tribune !», m'avait-elle confié avec un clin d’œil au lendemain de son élection à l’Académie française, quelque temps après la parution de L’enseignement en détresse, ouvrage de large audience où elle avait dit son inquiétude de voir l’école se cantonner dans l’utilitarisme à court terme. Loin de prôner l’enseignement des langues anciennes pour tous, Jacqueline de Romilly soulignait cependant leur utilité comme école de rigueur et de meilleur accès à toutes les langues.

Pratiquant le gai savoir et la vulgarisation au meilleur sens du terme, Jacqueline de Romilly avait en outre touché au roman et consacré plusieurs livre à ses souvenirs et, plus précisément, médité sur le trésor que représente notre mémoire.

« Certes j’envie les jeunes, me confiait-elle à ce propos ; mais ils n’ont pas tous les privilèges, et ils seront surpris un jour – comme je l’ai été – de découvrir l’amas de richesses qui a mûri secrètement et qui ne se révèle qu’au seuil de la vieillesse »

Généreuse et optimiste jusqu’en son grand âge, Jacqueline de Romilly reconnaissait que « l’homme n’est pas parfait » tout en pariant qu’il ferait un progrès pour peu «qu’on lui montre et qu’on lui fasse aimer ce qui est beau »…

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