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Pensées de l'aube (7)

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De la survie. – J’ai mal au monde, se dit le dormeur éveillé, sans savoir à qui il le dit, mais la pensée se répand et suscite des échos, des mains se trouvent dans la nuit, les médias parlent de trêve et déjà s’inquiètent de savoir qui a battu qui dans l’odieux combat, les morts ne sont pas encore arrachés aux gravats, les morts ne sont pas encore pleurés et rendus à la terre que les analystes analysent qui a gagné dans l’odieux combat, et le froid s’ajoute au froid, mais le dormeur éveillé dit à la nuit que les morts survivent…

De la vile lucidité. – Ils dénoncent ce qu'ils disent des alibis, toute pensée émue, tout geste ému, toute action émue ils les dénoncent comme nuls et non avenus, car ils voient plus loin, la Raison voit toujours plus loin que le cœur, jamais ils ne seront dupes, jamais on ne la leur fera, disent-ils en dénonçant les pleureuses, comme ils les appellent pour mieux les démasquer - mais ce ne sont pas des masques qu’ils arrachent : ce sont des visages...

De nos pauvres mots. – Mais aussi tu te dis: de ta pitié, qu’en ont-ils à faire ? Les chars se retirent des décombres en écrasant un peu plus ceux qui y sont ensevelis et tu devrais faire ton sac, départ immédiat pour là-bas, mais qui s’occupera du chien et des oiseaux ? Et que fera-t-elle sans toi ? Et toi qui ne sait même pas construire un mur, juste bon à aligner quelques mots - juste ces quelques mots pour ne pas désespérer: courage aux survivants…

Commentaires

  • Le silence des shrapnels couve le silence des deuils.

    Tous ces deuils gazaouis. Les deuils de ce peuple dont le nom évoque le chant d'oiseau que les hommes d'armes soumettent sans cesse au silence.

    Les armées d'indécence de tous bords crient victoire.

    Mais quelle victoire pour ces lâches priant leur idole confortablement embarqués dans leurs destriers acier tuant à hue et à dia.

    Mais quelle victoire pour ces guerriers qui se disent de Dieu qui engrangent la mort pour décorer leur petite boutique de portraits de pères, de fils, de frères qui ne seront plus jamais des pères, des fils et des frères.

    Mais pour moi Défaite Noire au goût de suie acide,
    pour moi toujours amoureux transi de toutes ces vies tues à jamais.

    Mon deuil est un cri.

    Je t'embrasse. Philip

  • Je finis à l'instant la lecture d'Un Juif pour l'exemple. Nous en avions parlé, cher Philip, puisque tu l'as lu sous notre toit. J'en suis resté scié. A l'heure de Gaza, penser à la mort atroce d'Arthur Bloch, assassiné le 16 avril 1942 dans un paisible bourg vaudois par une bande de nazis suisses, n'est pas effacer la mort des Gazaouis mais associer les boucs émissaires de toutes nations et de toutes religions dans la même déploration...

  • Je suis en pleine lecture de "Des femmes, des hommes et la guerre" d'Evelyne Accad.
    J'ai rencontré cette femme, au cours de l'un de mes nombreux voyages au Liban en 1991, juste après les Accords de Taëf mettant fin à la Guerre du Liban qui dura vingt longues années et qui saccagea, de manière inimaginable, la terre, les villes et les êtres de ce petit pays appelé jusqu'alors par les Arabes eux-mêmes la Suisse du Moyen Orient.
    De Mère suisse, de père libanais né en Egypte, ayant passé enfance et adolescence au Liban, arabophone, francophone, anglophone à la fois, Evelyne Accad eut une éducation protestante au milieu du climat méditerranéen. Cette universitaire, écrivain, poète et musicienne porte un regard singulier sur les profondeurs humaines qui sous-tendent la nature des guerres qui ne cessent de secouer ce petit bout de terre.

    Dans ce livre, elle analyse la sensibilité littéraire différente des hommes et des femmes dans leur manière d'appréhender la guerre, de la décrire, et de la mettre en scène dans l'écriture romanesque. Et elle nous raconte cette courte histoire édifiante qui symbolise bien la folie de ces terres de guerres.

    Nous sommes le 6 mai 1984. En pleine guerre civile à Beyrouth. Iman Khalifeh, étudiante et jardinière d'enfants, s'était réveillée un jour en disant : "Assez ! Assez de cette boucherie inutile !" Elle travaillait avec les populations des deux côtés ennemis de la ville, Beyrouth Est pour le camp chrétien, Beyrouth Ouest pour le camp musulman. Elle décida avec des femmes des deux camps d'organiser une Marche Pour la Paix. La Marche devait avoir pour seul slogan "Non à la guerre ! Non à la 10ème année de guerre ! Oui à la Vie !"

    Les deux parties de la ville devaient se rejoindre au seul point de passage autorisé par les deux camps, appelé Passage du Musée ou Ligne de Démarcation. Des milliers de gens devaient y participer, l'initiative ayant reçu un accueil formidable dans l'opinion publique dont presse et tv se firent le relais. Cela s'annonçait comme l'événement symbolisant enfin l'espoir.

    Mais la Marche fut arrêtée, agressée par un bombardement "aveugle". Le mot "aveugle" désignait alors au Liban tout bombardement qui ne semblait pas avoir de cible ou de but précis mais qui, selon les commentateurs avisés, sait ce qu'il frappe, qui il frappe et pourquoi. Il y eu plusieurs centaines de victimes, morts et blessé, essentiellement des femmes et des enfants, de l'un et l'autre côtés.

    Iman Khalifeh, la jardinière d'enfant a dit : Je ne proposais pas une idée originale, ce n'était pas une idée nouvelle. C'était le cri de la majorité silencieuse, dit tout haut par un peuple qui souffrait, qui endurait ces terribles combats depuis 9 ans, qui ne portait pas d'armes pour se défendre mais essayait d'échapper à la mort, à la violence et à la ruine pour vivre, construire, continuer à exister."

    Jean-Louis je me pose la question : Combien y a t' il d'Iman Khalifeh jardinière d'enfants, aujourd'hui à Gaza ?

  • J'aime le " Et que fera t-elle sans toi ? "

  • Et que ferons-nous sans vous...

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