Lettres de l'Imagier (2)
Paris, ce 9 janvier 2009.
Vieux frère,
Quel tragique début d'année sur les plages gazaouites de sable rouge et quel carambolage meurtrier au carrefour oriental de nos civilisations. La vie ici se passe en tristesse mâtinée de mélancolie, une tristesse si grise sur ce macadam glacé des boulevards. Un gris glacé de dix degrés celsius en dessous de ce zéro inventé par nos Arabes. Je n'ai jamais grelotté ainsi depuis que je me suis partiellement exilé dans ma mère capitale. Et ça dure...
A part ça le spectacle que donnent nos sociétés ces jours-ci est à la fois tragique et puéril. Puéril avec la guerre du Gaz entre l'Ukraine et la Russie en pleine vague de froid - et les gens meurent de froid en Bulgarie, en Roumanie et en Bosnie. Des millions de foyers pris en otage se retrouvent dans la tourmente. Tragique avec Gaza, bien sûr, en prime time. Gaza t'es dans quel camp ? Tu es sommé de choisir entre le camp de la fermeté stratégique contre les fous de Dieu et leur alliés iraniens et le camp des victimes innocentes de Gaza que certains osent comparer au Ghetto de Varsovie annihilé par les Allemands.
Les comparaisons abusives fusent de toutes parts. Les images des massacres jouent leur rôle classique de catharsis et permettent à quiconque de se prendre pour le justicier du monde. Ce qui me fascine ce sont tous ces gens qui répètent : « Mais que peut-on faire pour arrêter tout cela ? » Comme si l'histoire vivante et cruelle des hommes pouvait s'écrire à la façon d'une recette de cuisine... Alors chacun y va de la sienne et se prend soit pour le maître du monde, soit pour l’Etat major israélien ou le président des Palestiniens. Libé a fermé ses commentaires sur son édition du net tant les insultes racistes, antisémites et islamophobes ont gangrené son site par milliers.
On appelle à la vindicte, à la menace physique, on réduit le peuple juif à son gouvernement actuel, et les Palestiniens à de braves combattants à mains nues. Plus personne n'accepte de voir les terribles logiques à l'oeuvre du côté israëlien comme du côté palestinien. Folie technologique contre folie irrédentiste. Et un peuple pris au milieu dans cet étau mortel qui se referme. Avec le Le Hamas qui le prend comme bouclier et les Israéliens qui tirent sur le bouclier. Le moloch de la guerre réclame sont dû de sang quotidien.
A quand la paix des coeurs et des esprits contre l'armistice des héros va-t-en-guerre sanglants ?
Um beijo à toi, mon frère.
Philip
Images: les photos rassemblées ici ont toutes été prises par des photographes palestiniens.