UA-71569690-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Les fruits amers de la liberté

0159e0c72d52d721581d11ae509ffb3f.jpg
Le Nouveau film de Ken Loach: It's a free World 

On se trouve, dans le dernier film de Ken Loach, sarcastiquement intitulé It's a free World, pris au piège de cette prétendue liberté dans une espèce de frénétique course du rat – plus exactement de la ratte, laquelle se débat comme une belle diablesse dans le cercle infernal du nouveau marché aux esclaves des migrants plus ou moins clandestins de l’Europe de l’Est et de partout qui débarquent en Angleterre. Angie après s’être fait virer d’une agence de recrutement pour ne s’être pas soumise à la règle machiste de ses supérieurs, se retrouve sur le carreau et lance alors, avec sa colocataire Rose, une agence indépendante de placement assortie d’une cafétéria. Malgré les mises en garde réitérées d’un de ses copains-collègues, Angie développe bel et bien un début de réseau sans se rendre compte qu’elle empiète sur le terrain de négriers sans scrupules beaucoup plus puissants qu’elle. Comme elle-même, toujours un peu « borderline » depuis qu’elle doit assumer la charge de son fils Jamie (le père de celui-ci a décroché depuis longtemps et passe son temps devant la télé) avec l’aide de ses parents dépassés par les événements, recourt à des procédés de plus en plus proches de l’illégalité, Angie va se trouver acculée à une situation dont elle se sortira de la façon la plus abjecte, dénonçant un groupe de clandestins au Service de l’immigration, pour caser à leur place une quarantaine d'autres malheureux qu’elle rançonne pour ainsi dire, avant que tout ne se retourne contre elle.
Si le scénario du film (primé à Venise) est solidement construit, qui nous confronte à une imbrication de situations aussi scandaleuses que réelles, avec de brusques aperçus de détresses personnelles insoutenables, It's a free World, dans sa violence amère, a quelque chose de frustrant pour d'aucuns dans la mesure où Ken Loach se contente, de manière frontale, de montrer les choses telles qu’elles sont, sans béquilles critiques ni trace d’évolution rassurante chez la protagoniste, puisque Angie, à la toute fin du film, se retrouve quasiment à la case départ, à recruter de nouveaux Ukrainiens à Kiev…
Ceux qui ont besoin d’une « morale » ou d'un espoir lui reprocheront ce parti pris, que je trouve pour ma part d’une honnêteté conséquente. Le portrait d’Angie, dont la rage de s’en sortir va de pair avec une espèce de santé sensuelle et sauvage, est remarquable (et magnifiquement servi par Kierston Wareing, tout à fait saisissante en sa beauté sexy et râpeuse à la fois, l’énergie véhémente et l’ambiguïté dérangeante de son personnage), autant que celui de Rose (Juliet Ellis, incarnant une femme plus lucide et sensible à la fois que son amie), et le rôle central de ces deux femmes ajoute à la critique implicite du film, signifiant en somme que cette liberté de merde est aussi merdique pour les uns que pour les autres dès lors qu’on obéit aux mêmes codes que ceux du système qui aboutit à ce merdier… A nous, en effet, de remplir les vides de ce film plein d’humanité mais qui se refuse aux faux-fuyants politiquement corrects ou aux conclusions lénifiantes….

Commentaires

  • La liberté, qu'est ce pour nous ?

  • Oui, c’est ce qui fait qu’en sortant de ce film prenant, que j’ai vu hier, on reste avec une arête dans la gorge. Il n’y a pas de happy end, pas de transformation finale, pas de punition ni de récompense non plus d’ailleurs pour Angie. Seulement la lutte toujours recommencée. Constat d’autant plus amer que cet immobilisme est confronté, dans la dernière scène du film, à l’espoir tendre, humain et joyeux de l’Ukrainienne qui s’inscrit pour travailler en Angleterre, et dont on imagine évidemment les déceptions ultérieures.

  • L'élan de compassion envers la famille iranienne excepté, j'ai trouvé que le personnage d'Angie se comportait d'un bout à l'autre comme le pire des salauds (tri des bestiaux humains qu'elle bourre dans les fourgon sans sentiment, etc. Last but not least,la scène où elle "siffle" par sms dans son cheptel deux mâles pour la nuit est édifiante!) Bah..pas convaincue que ce soit pour assumer l'éducation de son enfant qu'elle embrasse la carrière de négrière, non, comme elle le dit à son père, elle ne veut pas être pauvre comme lui et elle ne recule devant(preqsque) rien. Son abattage mi-Marylin/mi Kim Wilde et surtout sa belle énergie, sa détermination incroyable positivent à nos yeux le pire: on lui pardonne tout, enfin elle nous mène par le bout du nez ;-)
    Un excellent Ken Loach une fois de plus, sans manichéisme, plein d'humanité et avec de "vrais gens"! .

Les commentaires sont fermés.