Remarques personnelles sur le motif.
Dans une série de notes sur le processus de son travail pictural, Friedrich Dürrenmatt explique que, par rapport à ses œuvres littéraires, ses dessins ne constituent pas un « travail annexe » mais les « champs de bataille » où se jouent, par le trait ou la couleur, ses combats, ses expériences et ses défaites d’écrivain.
Ses propos concernant ses Crucifixions sont particulièrement éclairants en termes de pensée dramaturgique.
« Dans mes Crucifixions je me suis posé la question dramaturgique: comment puis-je représenter aujourd’hui une crucifixion ? La croix est devenue un symbole, on peut s’en servir aussi bien comme d’un bijou d’ornement, par exemple entre les seins d’une femme. La pensée que la croix fut un jour un instrument de torture s’est perdue.
Dans ma première Crucifixion, j’essaie, par la danse autour de la croix, de la retransformer en croix, d’en faire l’objet de scandale qu’elle représenta jadis. Dans la deuxième Crucifixion, la croix est remplacée par un instrument de torture encore plus atroce, la roue, et d’autre part ce n’est pas un homme qui est ainsi roué, mais plusieurs ; un seul personnage est crucifié, c’est une femme décapitée et enceinte; un bébé pend de son ventre ouvert. Des rats trottinent autour des échafauds, Dans la troisième Crucifixion, c’est un gros Juif qui est crucifié, ses bras sont taillés à la hache, il est pris d’assaut par les rats. Ces planches ne sont pas nées d’un « goût pour l’horrible » : d’innombrabes humains sont morts d’une manière incomparablement plus horrible que Jésus de Nazareth. Ce qui devrait être notre scandale, ce n’est pas le Dieu crucifié, mais l’homme crucifié. Car la mort – si horrible soit-elle – ne peut jamais être aussi affreuse pour un Dieu que pour un homme. Le Dieu, lui, s’en relèvera… »
Extrait de Dürrenmatt dessine, pp. 11-12. Editions Buchet-Chastel, 2007.
Crucifixion I (Encre, 1939 ou 1942); Crucifixion II (Encre, 1975); Crucifixion III (Encre, 1976)
Commentaires
Mais en ce lundi de Pâques, essayons de renaître!...
Le carême est terminé pour cette année je l'espère
J'ai enfin fait dire une messe pour ma grand mère... dans une église simple et sympa... à Sainte Rita. J'en ai profité, comme je le faisait enfant, en douce de mes parents, pour allumer quelques cierges et prier Sainte Rita pour quelques âmes en perdition...
J'ai croisé une jolie prière affichée dans l'église et que je vous transmets tant elle est universelle et devrait être laïque:
Prière de Saint François d'Assise
Seigneur, fais de moi un instrument de paix.
Là où est la haine, que je mette l'amour.
Là où est l'offense, que je mette le pardon.
Là où est la discorde, que je mette l'union.
Là où est l'erreur, que je mette la vérité.
Là où est le désespoir, que je mette l'espérance.
Là où sont les ténèbres, que je mette la lumière.
Là où est la tristesse, que je mette la joie.
Ô seigneur, que je ne cherche pas tant,
A être consolé qu'à consoler
A être compris qu'à comprendre,
A être aimé qu'à aimer.
Car c'est en donnant que l'on reçoit,
C'est en s'oubliant que l'on se retrouve,
C'est en pardonnant que l'on obtient le pardon,
C'est en mourant que l'on ressuscite à la vie.
Enjoy!
Oui cette matinée lustrale est de renaissance à tous égards. Merci pour votre message de l'autre soir auquel je ne réponds que dans cette espèce de scriptorium roulant de l'ICN à destination de Bâle, où je vais voir la grand exposition Munch. Je pense bien à vous en écoutant une cantate de Bach sur mon Dell Latitude D600. Vivent les machines fabriquées en Chine et vivent nous ! La résurrection c'est tous les jours ou jamais...
Ce sacré JLK se la fait belle: il m'a enfermé ce matin dans la Très Très Grande Bibliothèque de La Désirade en ne me laissant que les Oeuvres complètes de Joseph de Maistre à grignoter. Il y a de quoi faire, la vieille reliure de 1833 est al dente, mais quand même: j'enrage à l'idée que le lascar se royaume de par les monts et les vaux avec son air insouciant de coureur des bois et des villes...
Mon pauvre Fellow... Quand il fait si beau dehors!
Ici, j'ai pour deux semaines échangé deux enfants contre un chat et un canari... Le canari a le balcon et la chatte la terrasse. Il y avait déjà les piafs de la ville et les poissons...
Nous jouons Titi et Gros Minet... Les poissons restent stoïques quand les moineaux et le chat boivent dans la fontaine, le merle nargue la chatte du haut du treillage, les boutons de rose combattent les pucerons et la guerre végétale fait rage dans certains bacs... Mais j'ai dormi au soleil sur le transat et à mon réveil il n'y avait pas de catastrophe à l'horizon...
Carpe Diem!
Savez vous pourquoi Au jardin et Le cour de l'eau avec ce magnifique Turner disparaissent si vite de la toile? et pourquoi ne peut on pas y faire de commentaires? Une coquéterie de JLK?
Non non, la boîte à commentaires s'ouvre et se referme sans qu'on ne sache pourquoi ni comment, et comme nous sommes un peu négligents ou occupés, à La Désirade, voilà voilà... Quant au sieur Matzneff, notre ami JLK a lui aussi des a priori sur l'opprobre des bien pensants, mais il n'en pense pas moins, et je crois que c'est d'ailleurs clair...
Décidément le voyage dans votre blog n'en finit pas de dérouler son étrangeté. Je ne connaissais pas ces dessins vertigineux. Je m'étais juste enfouie dans un livre qui ne m'a jamais quittée, édité à "L'âge d'homme" / Editions de Fallois, imprimé en 1989, 4 ans donc, avant sa mort..... C'est ma mythologie, mon tendre Minotaure, celui qui meurt en dansant la danse de l'amitié, la danse de l'amour, la danse de la chaleur, celle du bonheur et de la délivrance et " lorsque le Minotaure se précipita dans les bras ouverts de l'autre, assuré d'avoir trouvé un ami, une créature pareille à lui...le frappa...d'une main si sûre que le Minotaure était déjà mort lorsqu'il tomba..."
Plus tard, je lus la première nouvelle "La mort de la Pythie" qui précédait le "Minotaure".
J'y lu ces lignes, presque prophétiques, qui teintent certains de vos textes. Je les copie avant de quitter votre blog, pour aujourd'hui.
"Et ainsi en ira-t-il pour tous les temps à venir ; deux camps adverses se feront face. Les uns verront dans le monde un système, un ordre, alors qu'aux autres, il apparaîtra comme un monstre. Les premiers diront qu'il faut remettre le monde en cause et affirmeront qu'il est possible de le modeler comme une pierre en la taillant. Quant aux seconds, convaincus que le monde se modifie de lui-même dans toute son opacité, tel un monstre changeant sans cesse d'allure, ils l'accepteront tel quel... Alors que le camp des uns se verra reprocher son pessimisme par les autres, ceux-là passeront pour se nourrir d'utopies aux yeux de ceux-ci."
Tiens, je n'avais pas entendu parler de ce livre. Dürrenmatt me rappellera toujours mon année à Bâle, où je l'avais choisi comme sujet pour mon travail de maturité, sur tes bons conseils, si tu t'en souviens. J'avais parcouru la Suisse, de Bâle à Genève, en passant par Berne, Neuchâtel et Zürich, sur les traces de ce cher Düdü. Mais je m'intéressais à ce qu'il faisait de la mythologie grecque, plus qu'à ses autres travaux - même si j'ai lu beaucoup plus et en brassant beaucoup plus large que ce qu'il fallait pour un simple travail de maturité...
Quoi qu'il en soit, je réalise que ça commence à faire lurette, et je me replongerais bien dans quelques-uns de ses textes, dont ses Stoffe et sa Promesse, entre bien d'autres...