Hommage à Daniel Schmid
Succombant à son cancer à l’âge de 66 ans, le réalisateur d’origine grisonne était l’un des créateurs les plus raffinés du cinéma suisse.
Freddy Buache son ami nous avait parlé de lui comme d’un « ange » à la sortie de Violanta, en 1977, et c’est vrai que Daniel Schmid, dans le monde du cinéma suisse, et de l’art en général, occupait la place des « purs », à propos desquels il semble un peu obscène de se demander si leur travail est « populaire » ou « de qualité »…
Comme un Fellini, toutes proportions gardées, Daniel Schmid avait son univers, sa musique et son imagerie, son baroquisme pictural et sa rêverie nostalgique, dont la première illustration éclatante s’était déployée dans Heute Nacht oder nie, en 1972, évocation du rite d’inversion des rôles, entre maîtres et serviteurs, lors de la nuit de la Saint-Jean. Cette première merveille, de tournure « rétro » évoquant un peu l’esthétisme d’un Visconti, allait être suivie, en 1974, par La Paloma, et, en 1977, par une adaptation somptueuse d’un roman de Conrad-Ferdinand Meyer, sous le titre de Violanta. Tourné à Soglio, dans le pays natal du réalisateur, ce film lyrique et lesté de mélancolie, habité par les présences inoubliables de Lucia Bosè ou de François Simon, illustre parfaitement la poésie de Daniel Schmid, relancée ensuite dans Le baiser de Tosca, en 1984, évoquant la Casa Verdi de Milan où se retrouvent de vieilles divas, comme dans La fin du jour de Duvivier, ou encore dans Hors saison, en 1992, remémoration émouvante des ses souvenirs d’enfant d’hôteliers grisons.
Rappelons alors que Daniel Schmid, né en 1941 à Flims, s’était établi à Berlin à l’âge de 19 ans pour y étudier l’art et la littérature avant de s’inscrire à l’Académie allemande du cinéma. Lié (notamment) à l’actrice Ingrid Caven, proche du groupe effervescent de Rainer Werner Fassbinder, il apparut à plusieurs reprises dans les films de celui-ci tout en traçant son propre sillon, dans une veine moins radicale.
Atteint depuis des années dans sa santé, Daniel Schmid avait également réalisé des mises en scène d’opéra, dont Les puritains de Bellini à Genève, en 1995, et un Trouvère de Verdi à Zurich, en 1996. En collaboration avec l’écrivain Martin Suter, il était enfin l’auteur de Beresina ou les derniers jours de la Suisse, dans une tonalité plus caustique et grinçante détonant quelque peu dans son œuvre. Celle-ci reste essentiellement celle d’un poète du cinéma suisse, sans doute moins « populaire » que « de qualité »…
Commentaires
C'est vous qui m'apprenez la mort de Daniel Schmid, un cinéaste que j'admirais. La Paloma (et le magnifique personnage d'Ingrid Caven) est un très beau souvenir, troublant, que j'ai vu lorsqu'il est sorti ; et puis L'Ombre des Anges qui a provoqué tant de remous à l'époque (un cinéma du quartier latin est évacué pour alerte à la bombe).
Je ne sais pas si l'on peut trouver facilement ces films en DVD.