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Pasolini et les fils

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En lisant Lettere luterane

A en croire Pasolini, l’un des thèmes les plus mystérieux de la tragédie grecque est la prédestination des fils à payer les fautes des pères. Il n’importe pas que ceux-ci soient coupables ou innocents: les fils subiront la fatalité des crimes de leurs pères. La chose lui a longtemps paru absurde, puis il y a trouvé lui-même un fondement de vérité à l’observation de la société actuelle, dont la jeunesse lui paraît, à l’opposé des images conventionnelles, une sorte de vaste secte se reconnaissant aux mêmes postures et aux mêmes vêtements, au même jargon vague et au même regard terni, comme vidé de toute flamme personnelle.
            “Après avoir élevé des barrières tendant à reléguer les pères dans un ghetto, écrit Pasolini, ils se sont trouvés enfermés dans le ghetto opposé”, Grégaires comme on ne le fut jamais, parce que s’identifiant à des modèles standardisé, les jeunes seraient selon lui à la merci de leurs pulsions autant que des abstractions de l’idéologie, déracinés, trop impatients ou trop soumis, trop conformistes ou trop arrogants. Surtout, écrit Pasolini: “Ils sont l’ambiguïté faite chair”. Pour eux, l’intégration ne serait plus un problème d’éthique mais un simple “arrangement”.  Leur révolte tendrait à se codifier jusqu’à la normalisation, et leur refus de toute forme aboutirait à la dissolution de toute individualité affirmée...
           

Commentaires

  • Bonsoir JLK,
    Je ne connaissais même pas l'existence de "Lettere luterane", c'est vous dire... Et là, ce que vous pointez me saisit. Alors je pense que j'enrichirai ma prochaine visite des terres pasoliniennes de cette lecture...

  • Ces chroniques ont été traduites, je crois, sous le titre de Lettres luthériennes. Elles en disent long sur le courage intellectuel, les tourments, les contradictions aussi de cet artiste souvent mal entendu et mal compris - souvent confus, aussi, mais toujours hanté par une sainte révolte. Ce qu'il a dit aux Italiens ne me semble pas avoir eu, en littérature, de suite sérieuse; pas plus que ce qu'a dit Fassbinder aux Allemands. Tous deux restent d'ailleurs des fils, irrémédiablement. Ce fait est également éclairant pour nuancer leurs invectives...

  • dans les mythes grecs, les fils succèdent aux pères, mais généralement cela se passe dans une seule et même personne, cela symbolise les différentes strates "d'évolution" (au sens neutre du terme, pas positif comme le veut l'usage contemporain). par exemple, si ulysse atteint ithaque et déjoue les prétendants, il devient télémaque. tous les personnages, y compris les dieux, sont des archétypes présents dans la psyché. (notons le travail méchamment réducteur de freud - ceci est une opinion hautement subjective^^ - qui passe d'un mythe universel nommé oedipe à un syndrôme excessivement marginal)
    sur la "fatalité des crimes", restons zen ausssi: que prométhée se retrouve enchaîné à un gros rocher avec un aigle qui lui dévore le foie tous les matins n'a rien de négatif (alors que c'est perçu de manière négative maintenant^^), surtout s'il on veut bien considérer que le foie chez les grecs désignait (de mémoire) le siège du sentiment de culpabilité.

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