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Tous prêcheurs

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À la Maison bleue, ce mardi 24 janvier, entre sept et huit heures du matin.- Je ne sais pourquoi me revient, à l’instant, le souvenir physique, et donc métaphysique (ces deux instances étant liées dans ma complexion psychique depuis que j’ai pris conscience que j’étais seul à être moi et pas un autre, vers l’âge de raison de dix ans et des poussières) du ravissement éprouvé lors de la projection du premier film vu en nos enfances au cinéma Le Colisée , à savoir La Loi du Seigneur, où je m’identifiai aussitôt à l’affreux petit morveux à mèche folle en guerre ouverte avec l’oie punitive impatiente de lui pincer le cul,et qui tire la langue à sa jolie voisine pendant le culte bien grave des Quakers - à cette réminiscence s’associant ce matin ma réticence récurrente à m’associer à la paroisse bêlante, au lendemain du 11 septembre, qui voulait que nous fussions tous Américains, comme nous fûmes injonctés d’être tous Charlie en 2015 et tous en sainte guerre sanitaire ce matin, tous mieux informés qu’hier et mieux confortés dans le plus jamais ça et dans le peut mieux faire.

À mes dix ans et des bricoles, j’étais dans l’innocence sauvage ignorant plus ou moins sciemment les oies morales et les règles paroissiales, et c’était ma façon d’être Américain dans les largeurs du totalcolor cinémascopique; j’étais DANS la nature amorale et sympathique pleine d’oies virales, et d’apprendre plus tard que mon grand frère Anthony Perkins en pinçait pour les fistons ne me fit pas l’aimer moins que la guerre atroce.

Bien entendu les vainqueurs seuls ont écrit la vérité sur celle-ci, de Sécession prétendue tout antiraciste et nordique comme un sermon, et l’on y revient et je me sens , aujourd’hui plus qu’hier, en impatience de tirer la langue et de bouffer de l’oie prêchi-prêcheuse stigmatisant, à gauche de la gauche, la droite de la droite, et l’inverse à l’avenant, tous imbus de la même rage médiatiquement correcte, tous jurant que seuls les autres sont sectaires et répétant les TU DOIS et les IL FAUT le doigt levé prêt à punir faute d’avoir surveillé, et l’emballement des foules en houles décrit par Dante en ses girons infernaux de se déchaîner une fois de plus - mais sans moi s’exclame une fois de plus en moi le morveux.

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À mes côtés la douce Lady L. prend des nouvelles des tout petits qu’elle ne peut voir ces jours que sur le quai de plein air, la journée, au dam du confinement moral prôné par les nouveaux Quakers mondiaux, et pour ma part je ne vais pas dessiner un mouton à mes petits princes mais une oie drolatique menaçant de les pincer, au zygomatique, jusqu’à ce que mort de rire s’ensuive, ah, ah...

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