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Cendrars au bout du monde

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Pour le 50e anniversaire de la mort du génial bourlingueur, le 21 janvier 1961, l’édition fait florès. À découvrir: le nouveau Quarto qui lui est consacré, intitulé Partir
La vie mortelle de Frédéric Louis Sauser, alias Freddie, alias Blaise Cendrars, s’acheva en apparence le 21 janvier 1961 à Paris. On imagine le vieux boucanier confiant une dernière fois sa « main amie » à deux fées, Raymone sa compagne et Miriam sa fille. Scène sûrement bouleversante, comme tous les adieux, mais on passera pudiquement sur cette mort survenant trois jours après la solennité tardive d’un Grand Prix de la Ville de Paris qui faisait une belle jambe à l’auteur de L’Homme foudroyé. Déjà frappé à Lausanne, cinq ans plus tôt, par une première attaque paralysant son flanc gauche et donc sa main travailleuse, Cendrars avait consacré ses dernières années à la composition, physiquement héroïque, de deux bouquins de jeune homme : l’extravagant récit « érotique » d’  Emmène moi au bout du monde, suivi de Trop c’est trop. Le premier, curieusement, prenait l’exact contrepied de celui que Cendrars rêvait alors de consacrer à celle qu’il appelait la « Carissima », plus connue sous le nom de Marie-Madeleine, « sœur » du Christ. Or tout le paradoxe de Cendrars est là, que sa légende réduit parfois au personnage du bourlingueur extraverti, alors que c’était aussi un contemplatif et un grand spirituel à tourments et vertiges.

Mais Cendrars mort ? Pourquoi pas au Panthéon pendant qu'on y est ? Tout au contraire : Cendrars supervivant, jamais entré au purgatoire où tant d’auteurs sont relégués, Cendrars enflammant les cœurs et les esprits d’une génération après l’autre. Ainsi, après ceux qui ont défendu et illustré son œuvre de son vivant, tels un Pierre-Olivier Walzer ou un Hughes Richard, de nouveaux hérauts sont-ils apparus, tels Anne-Marie Jaton, dont une magnifique étude a fait date, et Claude Leroy, qui a conçu le volume paru ces jours dans la très référentielle collection Quarto, formidable « multipack » poétique et romanesque avec tout ce qu’il faut savoir sur le bonhomme et ses ouvrages.

De feu, de braise, de cendre et d’art

Revisiter Cendrars aujourd’hui, c’est en somme refaire le parcours du terrible XXe siècle, du Big Bazar de l’Exposition Universelle à la Grande Guerre où il perdra sa main droite (son extraordinaire récit de J’ai tué devrait être lu par tout écolier de ce temps), ou des espoirs fous de la Révolution russe (que Freddie voit éclore à seize ans à Saint-Pétersbourg), ou des avant-garde artistiques auxquelles il participe à la fois comme poète, éditeur, acteur et metteur en scène de cinéma, reporter et romancier, à toutes les curiosités et tous les voyages brassés par le maelstom de son œuvre.

« J’ai le sens de la réalité, moi poète. J’ai agi. J’ai tué. Comme celui qui veut vivre ».


Aujourd’hui encore, un jeune lecteur qui découvre Vol à voile ne peut que rêver de s’embarquer, avant que Bourlinguer lui fasse découvrir que le voyage réduit au tourisme est un sous-produit, et que lire Moravagine nous fait sonder les abîmes de l’être humain, mélange de saint et de terroriste, de fou et de génie.


Cendrars au boulevard des allongés ? Foutaise : ouvrez n’importe lequel de ses livres et laissez vous emmener au bout du monde !

Blaise Cendrars. Partir. Poèmes, romans, nouvelles, mémoires. Sous la direction de Claude Leroy. Gallimard, coll. Quarto. En librairie le 26 janvier.

Cendrars77.JPGMiriam Cendrars. Cendrars, L'or d'un poète. Découvertes Gallimard, nouvelle édition.

Blaise Cendrars. Dan Yack, Folio; Le Lotissement du ciel, Folio.

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Commentaires

  • Cendrars prendra donc la place de Céline dans l'épisode des commémorations . Qu'importe qu'il soit moins bon écrivain, puisqu'il n'est pas antisémite. J'aime beaucoup Cendrars. C'est même le nom que j'ai donné à mon chat (gris cendré). Mais comme Henri Godard, dont j'ai suivi il y a longtemps un cours sur les techniques narratives comparées entre Proust, Joyce et Céline, je tombe des nues.
    Ce pays file un très mauvais coton.
    Bien à vous.

  • Qu'est-ce que je déteste ces classements même pour les écrivains !!! Cendrars, "moins bon". Cendrars est magnifique.
    Que l'hôte de ce blog me pardonne d'intervenir pour râler, mais... Et merci pour ce bel éloge, la nouvelle du Quarto (plus accessible que les Denoël !), et pour la belle image, la déclaration pour Jeanne illuminée/enluminée par Sonia Delaunay.

  • Cher Solko, Cendrars ne prend aucune place, puisqu'il n'est pas question de commémorations officielles, ni en Suisse ni en France, et c'est tant mieux. Le comparer à Céline me semble en effet malvenu, chère Agnès O, même si Céline est avec Proust le plus grand musicien de la langue française au XXe siècle, en dépit de ses errances d'hygiéniste racial. Et faut-il déplorer qu'on ne lui fasse pas de place au Panthéon, au propre ou au figuré ? Pour ma part, je trouve mieux qu'on foute la paix à ses mânes et qu'on lise ses livres, y compris les horreurs pamphlétaires, tout de même bien instructives sur les délires occasionnels d'un prodigieux écrivain et d'un grand parano...

  • Mais ma remarque était au second degré et se gaussait du discours officiel des huiles (excellent écrivain mais...)
    Bien sûr que rien n'est plus idiot que ces classements. Concernant l'affaire Céline de ce WE, ce qui est choquant, c'est le désaveu brutal d'un universitaire comme Godard. Personne n'obligeait le ministère de la culture de s'embringuer dans une telle affaire et, dès lors que c'était fait, il est scandaleux qu'une association et un particulier aient eu raison en 24 heures d'un projet planifié depuis longtemps, et qui avait eu l'aval dudit ministère. Inconséquence et porte ouverte à n'importe quoi, convenez-en...

  • Oh pardon, Solko, je n'ai pas bien suivi cette affaire d'Etat dans le détail. Je vais y aller voir même si tout ça n'a guère d'importance - il me semble que nous sommes d'accord sur ce point.

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