Du changement. – On se promet de changer, le matin, on se promet d’être ce jour un peu meilleur que la veille, on ruse avec le serpent de la décréation qui ricane tandis qu’on se remet à l’ouvrage - et voici qu’une lumière me traverse et qu’elle m’inspire un quart de seconde avant que je ne retombe sur mes vieilles pattes, mais c’est elle qui me fait aimer un peu mieux ce matin mes vieilles pattes et ton ombre, mon amour, me retient de penser que rien ne changera jamais puisque ta lumière me fait pousser…
De notre corps. – L’un me dit que c’est une guenille, l’autre un temple, juste une enveloppe qui se flétrit, une illusion plus ou moins séduisante, un sac de nerfs ou de nœuds, mon frère l’âne, notre maladie mortelle ou Dieu sait quoi d’inventé par ces drôles d’apôtres que sont nos frères humains, mais ce matin je me sens vraiment l’âme à fleur de peau, je t’ai vraiment dans la peau ce matin, ah ça ton corps est bon ce matin comme un pain, miam miam…
De la rencontre. – Je ne sais si tout est écrit, prévu, noté comme sur du papier à musique, en fait je n’en crois rien, mais je sais parfaitement que rien de ce qui nous arrive n’est le fruit du hasard, rien n’a été prévu mais notre rencontre était prévisible, ni toi ni moi n’avons mérité cet amour mais l’amour est imprévisible et ça tu peux le noter et je l’écris aux enfants, tiens, tu as encore un peu de papier à musique sous la main ?
Image : Philip Seelen
Commentaires
Me suis réveillé à 7 heures.Mais pendant vingt minutes je l'ai enlacée et lui ai fait l'amour avec plus de ravissement,plus de profond plaisir que je n'en ai ressenti de ce genre depuis les matins de hillsdale.Est-ce l'air de la montagne?Est-ce l'atmosphère amoureuse du Pays de Glles-est-ce "l'aura"du domaine d'Owen Glendower?Est-ce quelque mystérieuse sève vitale émanant de ces collines et de ces vallées?et pendant que je l'enlaçais,j'ai eu conscience d'un parfum venant de son essence la plus intime,l'odeur de quelque plante magique inconnue!Un peu comme du foin-peut être comme la Reine des Prés.Ce n'était pas de la transpiration.Dieu seul sait ce que c'était.L'odeur même de l'âme de la petite T.T.[...]il y a tant de petites sources et j'ai vu et embrassé les Primevères qui poussent près de minuscules rus.Les premières Primevères que j'ai vraiment appréciées depuis que celles que T.T. avait plantées dans le jardin de Hillsdale.
John Cowper POWYS
PETROUCHKA ET LA DANSEUSE
JOSE CORTI
Merci, Robert, pour cet écho matinal du cher Powys dont l'Autobiographie reste toujours à ma portée...