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Une modernité métissée


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    Le commencement d'un monde: une synthèse passionnante de Jean -Claude Guillebaud, , qui interroge la «séquence occidentale», ses effets pervers dans le monde, sa remise en question et les nouveaux échanges indispensables à sa survie dans le monde à venir.

    L’Occident a-t-il perdu la partie? Le déclin de l’empire américain, sur fond de crise financière, annonce-t-il la fin d’une hégémonie de quatre siècles? La seule réponse au présumé «choc des civilisations» est-elle la guerre? La formidable expansion de l’Inde et de la Chine, entre autres «nations émergentes», doit-elle forcément nous faire peur? Et que penser de l’expansion mondiale du phénomène religieux? Vous avez dit régression?

    Dans un «message personnel» liminaire, Jean-Claude Guillebaud explique quel état d’esprit était le sien, marqué non seulement par la crainte de «l’immensité des changements auxquels nous devons faire face», mais aussi par celle d’un «écroulement des valeurs fondatrices de la culture européenne», prélude à des «barbaries renaissantes». Puis il a commencé à travailler à ce nouveau livre, dont l’élaboration, trois ans durant, l’a profondément changé, affirme-t-il.

    Nouvelle donne

    C’est qu’au fil de ses recherches lui est venue la conviction qu’à l’engloutissement de tout un monde va succéder le surgissement d’un nouvel univers défiant nos crispations et «cette vaine obstination à vouloir recycler sans cesse des concepts, des repères, des préjugés qui n’ont plus de pertinence». C’est que «nous ne sommes plus «le Centre» fondé sur des siècles de civilisation conquérante se posant en modèle universel, libérateur et prédateur à la fois, en butte alors aux «grands refus» dont les attentats du 11 septembre 2001 marqueraient le summum. Choc des civilisations? Trop facile de le prétendre, affirme aussitôt Jean-Claude Guillebaud, décortiquant la fameuse formule de Samuel Huntington pour en montrer l’idéologie sous-jacente, appelant à une sorte de fatalité guerrière – contre le fameux «Axe du mal» par exemple.

    Car les civilisations ne sont pas des entités closes mais de grands ensembles poreux et en mouvement. Et de rappeler ce que furent, avant l’essor de l’Europe au XVIe siècle, les civilisations indienne et chinoise, aux échanges trop souvent ignorés. Et de souligner aussi, avant le début de ce qu’il appelle la «séquence occidentale», l’extraordinaire créativité médiévale, trop souvent réduite à une période d’obscurantisme.

    Un autre métissage

    De sa «percée décisive», qui s’amorça en Angleterre au XVIe siècle, à l’actuel «chaos-monde», la séquence occidentale de quatre siècles a bel et bien changé la face du monde, mais ce monde a continué de changer depuis lors.

    Changement de planisphère, transformation des rapports de l’homme avec l’espace et le temps, expansion de la religion défiant toutes les prévisions (un nouveau christianisme affleure, et l’islam évolue lui aussi). Mais aussi vitalité démographique et culturelle en phase avec des économies galopantes: l’Inde de demain, la Chine de demain ou l’islam de demain nous attendent pour de nouvelles «négociations».

    Exposant les thèses «postcoloniales» et leurs propres impasses, Guillebaud ne donne pas dans le multiculturalisme diluant que pourrait annoncer son appel à une «modernité métissée».

    Le métissage, nous dit-il, est la base même de toutes les civilisations. Connaître avant de juger, comprendre au lieu de se crisper: l’avenir appartient à la délibération, «chemin ouv ert» défiant le catastrophisme…

    Jean-Claude Guillebaud,Le commencement d’un monde, Seuil, 390 p.

    Guillebaud3.jpgLes essais-synthèses d’un grand «reporter d’idées»

    RGuillebaud4.jpgevenu de tous les fronts de la fin du XXe siècle, du Vietnam au Liban, d’Israël en Afghanistan, Jean-Claude Guillebaud (né en 1944 à Alger), grand reporter au Monde puis au Nouvel Observateur (où il tient toujours une chronique), est devenu, depuis une quinzaine d’années, «reporter d’idées» avec huit essais-synthèses. Ainsi de La trahison des Lumières (Prix Rousseau 1995) à La tyrannie du plaisir (Prix Renaudot «essai» 1998), du Principe d’humanité (Prix européen de l’essai 2001) à La force de conviction (Prix Siloë 2005).

    Sans jargon philosophique, portés par une immense curiosité intellectuelle et un optimisme lucide, ces ouvrages de «passeur» ont le mérite rare de capter les préoccupations de l’homme d’aujourd’hui.


    Ainsi, il se maintient à l’écart de la mode mais sans se détacher pour autant de l’actualité en cours, de la chute du communisme à l’expansion de la Chine ou du 11 septembre à la guerre en Irak. Fait singulier en France franco-centriste: Guillebaud, qui a fait retour au catholicisme (Comment je suis redevenu chrétien, Prix 2008 des librairies La Procure), nourrit sa réflexion de pensées venues de tous les horizons, et particulièrement dans Le commencement d’un monde où il relaie analyses et critiques de grands intellectuels indiens, japonais ou africains, entre autres.

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