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Sur des pattes de colombe

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Si vous n’aimez pas Anna Gavalda, offrez La consolante à vos ennemis !

Il y a des gens qui ne supportent pas Anna Gavalda. Ils n’ont pas lu ses livres, mais ils n’aiment pas. Ils trouvent ça trop salon de coiffure ou gondole de gare, voire d’aérogare. Sans ouvrir aucun de ses livres, douteusement prisés par le populaire, ils relaient la rumeur selon laquelle Gavalda c’est bon sentiment et compagnie, point barre. Bref il y a un effet anti-Gavalda, et qui va s’accuser probablement chez tous ceux qui ne liront pas La consolante, à paraître ces jours avec 200.000 exemplaires de premier tirage.
Or les gens qui n’aiment pas Gavalda vont souffrir même en ne lisant pas La consolante. D’abord parce que tout le monde va en parler. L’éditeur claironne déjà « l’événement littéraire » de la saison, et les médias vont faire écho dare-dare, même si la romancière se défile, qui a choisi de ne rencontrer aucun de leurs mercenaires. Ensuite parce que ne pas lire 636 pages est nettement plus fastidieux que se borner à ne pas lire les 320 pages de Chagrin d’école de Daniel Pennac. Enfin parce que ne pas lire un bon livre est une souffrance d'autant plus lancinante qu'elle ne s'avoue pas...
Ceux qui, comme moi, sont assez kitsch (ou prétendus tels) pour avoir apprécié les livres de Gavalda dès les nouvelles de Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part, risquent plus encore d’aimer La consolante, qui cumule toutes les tares présumées de l’auteure et les déborde de surcroît, tant il est vrai que La consolante pourrait aussi s’intituler La débordante. C’est en effet un livre débordant de bonté et de vitalité, à la fois Dickens et Dubout sur les bords, tout en restant du pur Gavalda. On y entre tout doucement sur la pointe des sentiments et le récit s’amplifie bientôt et se ramifie pour devenir une espèce de grand fleuve intranquille qu’on remonte en même temps qu’on le descend puisqu’il s’agit du fleuve du temps qu’un homme approchant de la cinquantaine, flanqué de sa sœur, plus proche à vrai dire que sa compagne, en attendant qu’il en change, longe et remonte en s’interrogeant sur le sens de tout ça au miroir de ses souvenirs doux ou cuisants. Il sera question d'enfance et d'amitié, de métiers et de fidélités, de ressentiment et de trahison, de société qui va dans le mur et des façons éventuelles de survivre.
Sans le lire ceux qui scient d’avance Gavalda diront que La consolante n’est qu’un long mélo méli-mélo. Une rumeur argüe en outre déjà que cette fois Gavalda fait dans le noir, mais je n’ai pas bien vu la différence d’avec ses livres précédents même si celui-ci gagne de beaucoup en amplitude: Gavalda reste Gavalda comme Gary est resté Gary même en se faisant Ajar puis hara-kiri. Il y a du roman-photo et du Chet Baker là-dedans, de l'Amélie Poulain en plus richement nuancé et du Sarraute en baskets (la Sarraute des Fruits d'or persiflant à l'oreille, ou celle des murmures d'enfance) un mélange de trémolo très génération 68 et d’acuité sensible hors d'âge, de musicalité au petit point contrapuntique et d’élans carrément symphoniques, de gouaille quenelle à la Zazie et de gravité plombée àla Calet dans ce livre arrache-cœur qui montre, entre beaucoup d’autres choses, comment les familles éclatées se recomposent en tribus plus ou moins déjantés, entre tel oncle de substitution qui devient tante le soir et telle Kate fée bohème un peu sorcière - mais ne déflorons pas le secret de tout ça..
Ecoutez plutôt, si vous ne lisez pas : La consolante est en effet un livre plus secret qu'il n'y paraît, donc à écouter vraiment. Tout s’y passe entre les lignes autant que dans la linéarité non linéaire du récit, en douceur âpre et à fleur de cœur. Et comme on n’est pas à court de bon vieux lieux communs ce matin, allez, on dira que les personnages de La consolante nous arrivent sur des pattes de colombes en nous roucoulant comme ça que la jeunesse est à la fois derrière et devant, selon ce qu’on y prendra ou comprendra…
Anna Gavalda. La consolante. Editions Le Dilettante, 636p.

Commentaires

  • Cher JLK, vous avez le droit d'aimer Gavalda, même si mon dogmatisme me fait croire à une terrible faute de goût ! J'ai lu "J'espère..." que j'ai trouvé navrant... Mais cela fait longtemps que je ne souffre plus des livres dont on parle, bien au contraire ! Aujourd'hui sont sortis deux livres dont on ne parlera guère : 2666 de Bolano et Explorateurs de l'abîme de Vila-Matas, alors on peut toujours parler de Gavalda...
    Cordialement,

  • Vous avez sûrement raison: les dogmatiques ont toujours raison.

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