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La bonne foi de Guillebaud

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  Selon Jean-Claude Guillebaud, se dire chrétien serait aujourd’hui plus gênant, en France, et plus particulièrement dans le milieu intellectuel et médiatique, que se déclarer homosexuel ou échangiste. Cette nouvelle forme d’intolérance, faisant l’impasse sur l’acquis inestimable de vingt siècles de judéo-christianisme pour lui substituer l’équation chrétien=ringard,  lui a inspiré une colère qui ne reposait même pas sur une conviction personnelle inébranlable :    « Je ne suis pas sûr d’avoir intimement la foi », écrit Guillebaud dans Comment je suis redevenu chrétien, « mais je crois profondément que le message évangélique garde une valeur fondatrice pour les hommes de ce temps. Y compris pour ceux qui ne croient pas en Dieu. Ce qui m’attire vers lui, ce n’est pas une émotivité vague, c’est la conscience d’une fondamentale pertinence ».

Dans cette perspective, le témoignage et la recherche approfondie qui s’entremêlent dans son livre vont bien au-delà du « coming out » confessionnel : c’est d’un retour à nos sources qu’il s’agit. Le philosophe René Girard le relevait: « C’est ce qui reste de chrétien en elles qui empêche les sociétés modernes d’exploser ». Or ce que rappelle Guillebaud, c’est que les valeurs que nous attribuons aux Lumières (à commencer par la conception de la liberté, de l’égalité et de la fraternité) remontent à la Bible et à l’Evangile. Qu’il s’agisse de l’autonomie de la personne (toute différente dans l’islam, le bouddhisme ou le confucianisme), de l’égalité entre les hommes (en rupture avec la conception grecque), des notions d’universalité et d’espérance, de fraternité et de solidarité, le christianisme a marqué une suite d’avancées à valeur universelle, parfois combattues au sein même de l’église : de la fameuse controverse de Valladolid sur la question de savoir si les Indiens ont une âme, à l’encyclique de Pie IX contre les idées modernes, ce qu’il y a de subversif dans le christianisme a souvent buté contre l’Ordre clérical.

Par ailleurs, Guillebaud ne se borne pas à cette approche périphérique : « Le christianisme, c’est autre chose qu’une simple collection de valeurs humanistes. Avoir la foi, ce n’est pas adhérer simplement à un catalogue de principes normatifs, qui serait comparable au programme d’un parti politique. Oublier cela, ce serait confondre la « religiosité » avec la croyance ».

La trajectoire personnelle de Jean-Claude Guillebaud, grand reporter au Vietnam et au Liban, via le Biafra, qui a décidé un jour de remplacer l’observation « horizontale » du journalisme par une investigation « verticale », au fil de grands essais interrogeant notre « époque d’inquiétude », est exemplaire par sa façon de lier le besoin de savoir à l’expérience vécue, la recherche de la vérité et le « saut » de la foi. Au demeurant, plus chrétien que catholique, disciple du protestant Jacques Ellul mais aussi d’un Jean XXIII (« Nos textes ne sont pas des dépôts sacrés mais une fontaine de village »), Guillebaud nous intéresse moins par sa position que par les questions qu’il pose à chacun, croyant, agnostique ou athée. 

cf5a9d5a5756b848b681f3f24780443d.jpgJean-Claude Guillebaud, Comment je suis redevenu chrétien. Albin Michel, 182p.

Commentaires

  • Jean-Louis, avez-vous appris quelque chose de cette prose somme toute assez plate et niaise?
    Moi même croyant, je n'arrive pas à trouver que les positions de Guillebaud ont le moindre intérêt... Vaguement technophobes mais pas trop quand même, nous exhumant des demi-vérités molles sur l'impact chrétien sur le monde contemporain...
    Mais je suis peut-être injuste, dites-moi...

  • De fait, je vous trouve injuste. Je sais que Guillebaud agace les catholique français de droite, mais il dit clairement et simplement des choses qui ne sont pas si molles que vous le dites, même si elles vont de soi pour des gens à têtes philosophique comme vous. A moi non plus ce livre ne m'a rien appris, ou peu s'en faut, mais j'en aime bien le propos décalé tant par rapport à l'hédonisme ambiant que face aux crispations intégristes. Pareil en ce qui concerne ses grands essais: Guillebaud nous donne souvent de bonnes pistes de lecture (notamment dans La tyrannie du plaisir) et ses observations sont d'un honnête homme équilibré. Pour nous fouetter le sang de l'âme, il y en a d'autres n'est-ce pas, dont mes chères Annie Dillard et Flannery O'Connor. Bref c'est de la moyenne montagne que Guillebaud, qui repose des parcours d'arête et des faces nord...

  • Soit, Jean-Louis.
    Ce n'est pas tant que je me revendique "catho de droite", mais c'est cette manière de tout réenglober en de grands "principes" qui comprennent un peu tout, et qui devraient nous redonner le sens d'une humanité menacée sinon perdue, qui me laisse un peu sceptique.
    Un peu de moyenne montagne, selon moi: Le Choix de Dieu, de Lustiger, que je lis suite au décès de cet homme de pouvoir de premier plan. C'est clair, émouvant, intéressant, et ça redit des choses simples et justes.
    Pour le reste, bien d'accord avec vous qu'une ligne de réflexion valable passe loin des deux écueils que sont l'hédonisme forcené et l'extrémisme religieux...

  • Y a-t-il vraiment une bonne foi ?

    J’entendais ce matin qu’ « il est grand le mystère de la foi »… ou ce lieu commun « les voie du Seigneur sont impénétrables »…

    Eh oui ! Je vais parfois à la messe, discrètement sans en parler autour de moi… à Paris en 2007… et je ne suis même pas baptisée.
    Pourquoi ? Parce que cela me fait du bien et me redonne la force de rester ce que je suis, quelqu’en soit le prix.
    Je ne peux biensur pas répéter tout du crédo, et je n’irai pas communier. Je trouve la communion ailleurs. Je me surprends aussi à prier Sainte Rita pour ceux qui m’ont blessée, avec la prière de Saint François d’Assise et à déposer des cierges à l’église ou chez moi. Je prie pour ne jamais tomber dans la haine et la vengeance, et pour être un jour capable de pardonner. Pour continuer à donner autour de moi de l’amour et de la joie, en relativisant mes petits problèmes qui s’accumulent. J’espère pouvoir prochainement partager le Grand Pardon avec des amis Israélites, anciens déportés, qui savent le mal que font la calomnie et la délation…

    Cette foi, qui ne nomme pas est quelque chose d’intime… elle n’a pas besoin d’être cataloguée ni jugée par autrui ou un quelconque clergé…

    Je ne souhaite d’ailleurs pas le baptême à cause de cela : s’engager dans l’une ou l’autre des religions m’emprisonnerait dans un dogme au dépend des autres et de l’humanité toute entière. La foi ne se dicte pas, elle se vit, se ressent, si différente pour chacun de nous.

    Cette semaine un prêtre hollandais proposait de renommer Dieu, du même nom, pour toutes les religions… les esprits ne sont pas murs, mais je pense qu’il est dans le vrai ! Que de sang versé au nom de Dieu, encore aujourd’hui et partout dans le monde. Cette idée n’est d’ailleurs pas nouvelle, et la lecture d’E Schure sur son histoire des religions, Les grands initiés, expose le même concept et démontre l’origine commune de la foi depuis la haute antiquité…

    Je continuerai mon petit bonhomme de chemin, sans références théologiques ou philosophiques agrées, pour si je le peux un jour, comme Gandhi, pouvoir dire « Je suis musulman, je suis chrétien, je suis juif, je suis hindouiste… » ou mieux l’Esprit de Dieu est en moi comme en chacun de nous et c’est le même !


    « Celui qui arrive au cœur de sa religion est aussi arrivé au cœur des autres religions »
    Ghandi

    Amicalement de retour!

  • Je n'ai pas qualifié la foi de Guillebaud de bonne: je n'ai parlé que de sa bonne foi. Lui-même parle à peine de sa foi, qui relève en effet du secret, voire de l'aporie. Il montre en revanche très bien par quels cercles concentriques il faut passer pour aller de la surface des fois proclamées à ce qu'on croit ou croit qu'on croit, au bord d'un abîme intérieur qui ne peut se dire - et sur Internet moins qu'ailleurs. Il y a de fortes pages, dans le dernier livre d'Alina Reyes, sur les malentendus liés à tous les mots qui tentent de dire Dieu et le font être moins que Rien . Bien sûr Gandhi, bien sûr les généralités, bien sûr se rassurer en s'affirmant croyant ou athée, bien sûr la toute bonne foi des bonnes gens, mais l'important est au secret de chacun et comment nous vivons tout ça, bonjour Fred...

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