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La blanche de sa vie

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La pêche à rôder, de Jacques-Etienne Bovard
C’est toujours un bonheur que de voir un écrivain gagner en liberté dans le développement de ses thèmes et de son expression, comme il en va des quatre récits de La pêche à rôder de Jacques-Etienne Bovard, après les avancées déjà très remarquables du Pays de Carole et de Ne pousse pas la rivière, ses deux derniers romans. D’aucunes et d’aucuns, sans même y aller voir de plus près, auront fait cette petite moue des gens sérieux pour qui la Littérature ne saurait se complaire dans l’anecdote, en avisant cet album assorti de photographies « maison », genre cadeau de fin d’année, où l’on voit la fille de l’auteur, un ami à lui pêchant de dos, son matériel exposé, un long poisson dans la rivière, que sais-je encore de plus inspirant pour les belles âmes de la paroisse littéraire romande ?
Quant à moi, déjà ferré par l’enthousiasme véhément de notre compère l’éditeur, mais demandant pourtant à y voir, j’ai bel et bien culbuté dans ce livre à l’unisson de l’auteur, puisque c’est par une chute dans la nuit matinale, suivie d’un empêtrement ponctué de jurons, que Bovard marque son ouverture, au double sens du terme tant il est vrai que la première des quatre séquences du livre, intitulée La grande blanche, coïncide avec le première jour légal de la pêche, non loi de l’embouchure de la Venoge.
Or tout de suite on y est : on y est physiquement, comme aux petites aubes les conquérants de l’inutile sortant de la cabane d’altitude, tout de suite on flaire la rivière après en avoir perçu la rumeur entre les feuilles, tout de suite on est comme happé par cette Attente dans laquelle va se dérouler tout un combat compliqué dont l’enjeu est une fuyante merveille, mi chair-mi fantasme, vivant défi qui ne peut qu’être dans l’absolu du pêcheur, aujourd’hui où c’est la mort, la « blanche de sa vie »…
La quête de l’absolu, chez Jacques-Etienne Bovard, ne va pas sans patauger, s’embrouiller le fil et le matos, surtout risquer de faire mayaule, l’expression vaudoise signifiant tout louper et rentrer bredouille. A cette sainte salope de poisse, l’écrivain consacre de formidables pages, dignes d’un grand écrivain. Deux passages, déjà, de Ne pousse pas la rivière avaient atteint cette intensité de fusion d’une perception très physique et d’une aspiration quasi métaphysique à vivre sa passion jusqu’aux confins de l’extase et de la mort, dont l’inatteignable blanche était déjà le symbole. Dans La pêche à rôder, où il gagne encore en liberté narrative et en puissance d’évocation - salut Hemingway, salut Jim Harrison -, Bovard touche à toutes les gammes de sensations et de sentiments, de la tendresse filiale (la belle initiation de Retrouvailles) à l’amitié scellée par l’Aventure, en passant par la relation profonde avec la nature ou la reconnaissance manifestée à ceux qui l’ont initié, le ressouvenir personnel d’épisodes familiaux révélateurs, enfin tous ces petits côtés et tous ces beaux moments constituant les facettes de son Grand Jeu.

medium_Bovard5.JPGJacques-Etienne Bovard. La pêche à rôder ; un art de l’impatience. Bernard Campiche, 130p.

Commentaires

  • Oui, quatre textes qui happent littéralement le lecteur, comme toujours d'ailleurs avec Bovard. Tout farci que j'étais du cliché de la pêche assise et à mourir d'ennui, je me suis surpris à Attendre avec le narrateur, à traquer le "coin", à guetter le poisson, le souffle, la vaguelette...
    D'autant plus enthousiasmé par ce texte que le premier aperçu que j'en ai eu a été une lecture par l'auteur lui-même, devant un public ne cachant pas sa jubilation.
    Si vous manquez d'idées de cadeaux de Noël...

  • Hum... Cadeau de noël.... Bonne idée. Il y a un de mes très bons amis qui me désespère par son peu de goût pour la lecture mais ne manque pas de me tanner avec sa pêche et qui ne va pas éviter ça. En plus 130 pages, c'est parfait.

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