UA-71569690-1

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Haro sur Günter Grass

 medium_Grass.jpg

Un écrivain dans l'imbroglio de l'Histoire 

 L' affaire a éclaté le 12 août dernier, à la parution d'un entretien paru dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung, où Günter Grass évoquait pour la première fois son enrôlement dans la division SS Frundsberg à l'âge de 17 ans, dont il a choisi de parler dans une autobiographie à paraître sous le titre d'En pelant les oignons (Beim häuten der Zwiebel). «Mon silence, au fil de toutes ces années, est l'une des raisons pour lesquelles j'ai écrit ce livre. Cela devait finir par émerger», a déclaré l'écrivain qui précise qu'après s'être porté volontaire dans l'armée à l'âge de 15 ans, pour échapper à sa famille, il reçut en 1944, à l'âge de 16 ans, un ordre de marche qui l'incorporait de force dans la Waffen-SS. Affirmant qu'il n'a jamais tiré un coup de feu durant cette période, Günter Grass a cependant relevé que cet épisode l'avait poursuivi «comme une tare» dont il ne pouvait pas ne pas parler. Blessé en 1945 et envoyé dans un camp de prisonniers américain, il affirme que ce n'est qu'à ce moment qu'il fut confronté aux réalités de l'extermination. Par la suite, il devint un militant pacifiste.
L'aveu de l'auteur du Tambour et de nombreux autres romans et essais engagés, couronné par le Prix Nobel de littérature en 1999 et faisant figure d'autorité morale, a provoqué une vague d'indignation en Allemagne, ainsi qu'en Pologne où Lech Walesa lui a demandé de rendre sa distinction de citoyen d'honneur de Gdansk, l'ancien Dantzig où Grass est né en 1927. S'opposant à cette requête, le maire de Gdansk, Pawel Adamowicz a accusé Walesa de «jouer sur des phobies anti-allemandes». «Grass a toujours et sans hésitation porté des jugements sans équivoques sur les origines de la Seconde Guerre mondiale et sur la responsabilité des Allemands pour leurs crimes», a-t-il conclu.
En Allemagne, le débat est d'autant plus vif qu'il concerne l'un des intellectuels qui ont le plus poussé ses compatriotes à sortir du silence qui pesait après la guerre sur le passé nazi et le ralliement massif de la population à Adolf Hitler. «Celui qui se tait est fautif», affirmait-il ainsi dans une lettre ouverte. Ce qui choque le plus semble l'aspect tardif de l'aveu de Grass, que d'aucuns vont jusqu'à réduire à un effet publicitaire visant à vendre son nouveau livre…
Plusieurs voix saluent au contraire cette «victoire sur soi», et Martin Walser, qui avait lui-même déclenché une polémique en évoquant en 1998 le danger d'une «instrumentalisation» d'Auschwitz, estime qu'«qu'il faut être reconnaissant» à l'auteur du Turbot d'avoir donné une leçon face au «climat triomphant, avec ses usages normalisés de la pensée et de la parole».
Quant à Günter Grass, il a réagi lundi en affirmant que certains en profitaient pour faire de lui une «persona non grata»…

 

Commentaires

  • Un billet intéressant (pour une fois !) d'Assouline à ce sujet sur son blog. Ce qui est incroyable, c'est le caractère très tardif de cet aveu. Et les archives devaient être bien cachées pour que ce fait n'ait jamais été découvert. Suggestion d'Assouline : et si Grass avait parlé pour désamorcer une révélation qui n'allait plus tarder ?

  • Quand on a passé sa vie à combatre le mensonge, il n'y a aucune culpabilité à avoir été un pion de l'histoire dans sa jeunesse, un pion qui n'a pas de sang sur les mains !
    Je regrette de ne pouvoir parler directement à Walesa, tant sur les actes politiques qu'il a inévitablement commis avec le pouvoir que sur l'attidude des polonais en général et (probablement) de certains de ses proches à cette époque sordide...

  • Toujours aussi consternant de voir avec quelle ardeur on crie haro sur le baudet. Si Grass a parlé tardivement c'est sans doute, qu'il est plus facile de conseiller et d'encourager les autres à la parole que de faire sa propre analyse. Rien de nouveau dans tout cela. Mon père a fait partie des jeunesses hitlériennes comme la majorité des enfants de cette époque (comme le Pape!). Ils n'avaient pas le choix, comme les Cubains qui défilent sous les fenêtres de Castro! A 17 ans il était à la guerre et il a été fait prisonnier jusqu'en 48. Il n'était pas dans la Waffen mais je vois des similitudes dans sa vie et dans celle de beaucoup d'allemands de cette génération. Bien facile de leur donner des leçons.

  • Merci pour ce témoignage, qui remet les choses à leur juste place.

  • Lech Walesa qui s'est rallié à la devise "travail, famille, patrie et religion" n'a sûrement pas de conseil d'honnêteté à donner à Günter Grass.

Les commentaires sont fermés.