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Le rock des anges-quarks

Lecture de Cosmos incorporated (5)

Je vais de surprise en surprise à la lecture de Cosmos incorporated, et d’autant plus que je n’avais jamais vraiment mordu jusque-là à Dantec, qui me semblait trop touffu dans ses romans, trop mégalo dans son journal, vraiment trop tout. Mais j’ai dû mal lire : j’ai dû trop voir les défauts de sa prose à la masse, sans voir vraiment le projet de chaque livre et la vision de l’olibrius, que je classais dans la catégorie des timbrés éventuellement intéressants à la Philip K. Dick, parano à outrance et abusant peut-être de substances nocives...
Or Cosmos incorporated correspond à ce que j’attends d’une nouvelle forme de narration, à la fois entée sur le Grand Récit des littératures et de la science dont parle Michel Serres, poreux au présent et pariant pour une possible écriture à venir, qui passe ici par la (ré)incarnation d’un personnage de notre monde déchu (genre tueur russe de téléfilm) en figure de héros vivant une « nouvelle enfance ».
Il y a du génie visionnaire à la Tarkovski (salut la Zone…) et à la Burroughs dans l’exploration de la ville contaminée de Neon Park, à la fois dépotoir électrifié en surface et souterrain dostoïevskien, où Slotkine passe avant de repérer, au bord d’une rivière, une vieille voyante orphique fumeuse de pipe et le chien Balthazar qui « agit comme un chien » mais « parle comme un homme, au moment où les hommes se conduisent comme des porcs et parlent comme des machines ».
Ce livre me rappelle une injonction qui me tient lieu de vieille conviction de postadolescence, résumée par le titre d’un roman de Miroslav Karleja lu dans ma vingtaine et intitulé Je ne joue plus. C’est cela qui arrive à Plotkine, à la fois à son corps défendant (il est choisi, désigné, inventé par Vivian) et ensuite de son libre choix assumé. Il sait maintenant qu’il doit trahir ce qu’il a été, « dépouiller le vieil homme » comme disait l’autre, reconnaissant la nécessité absolue de « la trahison de tout ce qui désintègre en permanence la liberté dans l’espace grand ouvert de la Métrastructure de Contrôle et de l’ensemble de ses rhizomes, mafieux, flicards, humanitaires, culturels, techniques ». Quand on se sent pris dans ce filet on sort son poignard et ensuite seulement on peut écrire…

Lorsque Dantec écrit qu’ « amour et trahison du monde allaient de pair » et qu’il repère un « temps discret » courant de L’Aquinate et Leibniz à l’espace-temps d’un nouveau récit « en douce », tout cela censé marquer une « réunification poétique de l’être » en suivant humoristiquement la souple démarche d’un chien, je balance un clin d’œil à mon compère Fellow et je souris aux anges rockers psalmodiant leur cantique des corps quantiques …

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