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Yasmina Reza au clavecin

Les mots pour patrie

Yasmina Reza reprend, dans Nulle part, sa partie de clavecin personnel. C’est doux et ferme, finement incisif, cela sonne comme une confidence dans le froid, sous la neige peut-être, dans un jardin public ou dans un café, c’est égal.
Elle parle de ses enfants petits qui s’éloignent en grandissant, et cette liberté bonne lui fait mal, puis elle écrit : « Je ne connais pas les langues, aucune langue, de mes père, mère, ancêtres, je ne reconnais ni terre ni arbre, aucun sol ne fut le mien comme on dit je viens de là, il n’y a pas de sol où j’éprouverais la nostalgie brutale de l’enfance, pas de sol où écrire qui je suis, je ne sais pas de quelle sève je me suis nourrie, le mot natal n’existe pas, ni le mot exil, un mot pourtant que je crois connaître mais c’est faux, je ne connais pas de musique des commencements, de chansons, de berceuses, quand mes enfants étaient petits , je le berçais dans une langue inventée »…
Sa patrie ce sont donc les mots, la musique de la langue française, à un moment donné elle cite le Requiem de Fauré et c’est cela même, cette douceur et cette netteté sous la neige.
Au théâtre, Arts m’avait paru trop brillant, mais Conversations après un enterrement, puis La traversée de l’hiver et L’homme du hasard m’ont touché comme du Tchekhov à la française, ça et là un peu lisses encore mais avec des résonances émotionnelles d’une autre profondeur, et le monologue du ronchon magnifique d’Une désolation est aussi une belle chose généreuse à la Gary, dont la mélancolie réservée se retrouve dans cette suite de méditations fuguées à fines touches...

Yasmina Reza. Nulle part. Albin Michel, 77p.

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