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  • Ceux qui se gaussent

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    Celui qui se place très haut dans la courbe / Celle qui est née d’une rupture de continuité du principe de Peter / Ceux qui se gaussent des pays sans dette / Celui qui refuse de s’asseoir à la table des moqueurs (dit-il, citant The Bible) tout en se gaussant des Annamites phallocrates / Celle qui vit à crédit et se le reproche par contumace / Ceux qui estiment avec le comte Tolstoï (célèbre par la barbe de son cheval) que celles qui fument constituent un symptôme du mensonge existentiel / Celui qui appelle bla-bla tout effort de situer le débat au-dessus du niveau de la merde / Celle dont personne ne se moque plus depuis qu’elle a déposé son brevet d’acquisition d’argent facile / Ceux qui se rallient aux raisons de la junte thaïlandaise décidée à lutter contre la corruption des autres à son seul profit méritant / Celui qui a passé de la Quête à la revendication en renonçant au port de la cravate / Celle qui spécule sur l’idée qu’il faut brider la spéculation avec l’assentiment de son chauffeur castriste / Ceux qui citent La fin de l’histoire de Fukushima sans l’avoir lu plus que Le déclin de l’Occident d’Oscar Spengler / Celui dont la mentalité vinaigre fait tache d’huile / Celle qui est jeune de profession et coache donc les retraités positifs de son âge branchés karaoké / Ceux qui prônent la canaillocratie en sorte de rester inaperçus / Celui qui aura fait de sa vie une suite de visites alors qu’il rêvait d’un festival d’invitations / Celle qui se moque des créationnistes en affirmant que Darwin a écrit son livre en six jours et s’est reposé le dimanche selon la règle syndicale / Ceux qui rappellent à leurs jeunes écoliesr canadiens que le péché originel de l’islam tient à la prise en otage de la religion par la politique et que ça ne s’arrangera pas sans lar econnaissance du fait par les imams libéraux de demain qui marcheront main dans la main avec les esprits libérés du césaro-papisme et du fanatisme religieux du Likoud et consorts / Celui qu’on humilie en lui imposant un Trivial poursuit élitaire de centre-gauche / Celle qui tard levée jacasse déjà alors que son voisin néo-hégélien  planche sur sa réforme de l’aide au quart monde / Ceux qu’inspire leur hémisphère droit et rejettent par conséquent la ligne de pensée Ikea redéfinie par Comte-Sponville, etc    

    Peinture: Caspar David Friedrich

  • Ceux qui ont connu la fée Miam Miam

     

    Truie.jpgCelui qui fantasme sur son corps de rêve depuis l’effondrement des Twin Towers / Celle qui était majorette à Charleville au temps de Dutroux / Ceux qui la paient avec des peluches / Celui qui lui a conseillé d’évoquer des « doigts de fée » dans ses petites annonces / Celle qui lui a proposé de faire un lesboshow avant de s’apercevoir de son inconséquence en matière de gestion / Ceux qui l’on fait danser nue dans la robe du faux cardinal / Celui qui lui a juré qu’il caserait ses poèmes romantiques en se réservant un pourcentage en cas de succès monstre / Celle qui l’a mise en garde contre les premières atteintes de la mélancolie lourde / Ceux qui ont fait interdire le club des Pyromanes du Sexe dont elle était la doyenne / Celui qui croit que ses résultats au bac + vont lui valoir un prix spécial / Celle qui voudrait te convaincre que moins boire est un plus / Ceux qui ont pressenti qu’un destin tragique ferait connaître la vamp de la rue des Potiers surtout qu’un journaliste connu créchait dans le voisinage / Celui qui trouve aux travelos brésiliens une humanité nettement plus marquée qu’aux poétesses protestantes des cantons romands / Celle qui ne sort que rasée / Ceux qui lancent l’Atelier d’écriture des dominatrices coiffées en brosse / Celui qui demande à Miam Miam de lui faire un rapport sur les goûts des académiciens belges de plus de 66 ans qu’il classera de toute façon CONFIDENTIEL / Celle qui a fait  à Miam Miam une réputation de sainteté qu’elle estime tout à fait outrée et peut-être même préjudiciable au rayonnement de la sainte attitrée du quartier des Abattoirs /  Ceux qui travaillent au nouveau logiciel en 3 D qui leur fera goûter à la maison et en toute sécurité  hygiénique à l’Xtase selon Miam Miam, etc. 

    Peinture: Lucian Freud

     

  • Ceux qui sont sous médocs

     

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    Celui qui carbure à l’Optimax / Celle qui se shoote à la moraline / Ceux qui sniffent du snuff / Celui qui se dit malade d’être né / Celle dont le nez coule sur rendez-vous manqué / Ceux qui se consolent d’une peine de cœur par un plan cul / Celui dont le sang bleu se fige devant le drapeau rouge / Celle qui change de placebo après l’entracte / Ceux qui prennent l’avion pour élever le débat / Celui qui soigne son orgueil blessé par la Rolls du Bulgare / Celle qui se shoote à la formaline / Ceux qui braquent la pharmacie homéopathique pour soigner le mal par le mal / Celui qui s’est fait un fonds de commerce dans la pose de ventouses morales / Celle qui estime ( avec Ortega y Gasset son grand-oncle du côté de son aïeule madrilène) que le mouvement antithétique qui oppose les jeunes adultes de trente à quarante-cinq ans aux vieux adultes de quarante-cinq à soixante ans représente le moteur invisible  de la mutation psychosociale /Ceux qui ne sortiront jamais par la puerta grande (la grande porte) même en se faisant couper les oreilles et la queue/ Celui qui se rend en Albanie pour se faire implanter une jambe d’ivoire et en revient avec une molaire de bois greffée à la rotule / Celle qui se soigne du silence au gueuloir de Gustave / Ceux qui ont succombé à l’oppression thoracique de groupe en pleine Love Parade filmée par Kanal Sex / Celui qui rêve de tout avoir sans mettre la main à sa poche trouée / Celle  qui lit The Economist pour comprendre ceux qui la tondent / Ceux qui se mettent à la« diète unilatérale » en sorte de se trouver au diapason du bon docteur Wittgenstein / Celui qui est très « marche blanche » au niveau socio-affectif de masse / Celle qui s’incline devant les victimes en vérifiant que la caméra tourne / Ceux qui se mettent au lit pour surdose de lecture proustienne / Celui qui note quelque part (mais oû donc ? se demande la postière Fernande) que l’homo sapiens (à ne pas confondre avec le cretinus terrestris hétéro) partage le 70 % de son bagage génétique avec l’éponge / Celle qui s’éponge les aisselles avec un slip de son ex bas de plafond / Ceux qui s’aiment en tas comme les éponges échangistes, etc.   

     

  • La littérature des intermittents

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    (Choral parano)

     

    À propos du prétendu Blues des écrivains, dossier éploré du magazine Marianne concluant au désamour frappant  la littérature en France. De l’état plus nuancé des choses. Des constats de Peter Sloterdijk sur la transmission. Entre autres choses...

     

    Moi l’autre : - Et c’est reparti pour le lamento…

     

    Moi l’un : - Ou pour un marronnier estival de plus ?

     

    Ma sœur Anne : - Qu’est-ce qu’il entend  par marronnier, çui-là ?

     

    Moi l’autre : - Ce qu’on appelle marronnier en termes journalistiques, ma sœur Anne, désigne un sujet bateau servi quand la rédaction est en vacances, genre : La sexualité des Françaises ou Où en êtes-vous avec Dieu ? Et cette fois, c’est le désamour dont pâtiraient les écrivains en France…

     

    Ma sœur Anne : - Merci pour l’info : je capte.

     

    Moi l’un : - Donc à en croire le dernier dossier, vite fait sur le hamac, de Marianne, les écrivains français se sentiraient mal : à part quelques-uns ils relèveraient de l’aide sociale s’ils comptaient sur les revenus de leurs droits d’auteurs, ils seraient maltraités par les éditeurs, ils n’auraient que les Salons du livre pour se sentir exister, et les lecteurs de littérature éprouveraient « un même malaise »…

     

    La prof de lettres : -Il y a sûrement du vrai là-dedans, comme il y en avait dans La littérature en péril de Todorov, non ?

     

    Moi l’autre : - Sûr qu’il y a du vrai, mais le prétendu dossier est tellement« téléphoné » dans le sens du lamento qu’il laisse perplexe.

     

    Moi l’un : - Disons qu’il sent terriblement la France démoralisée se réfugiant dans les jérémiades genre intermittents du spectacle, pour qui tout devient revendication sur les fins de mois. Tout se passe comme si le vague mécontentement éprouvé par certains écrivains devenait vérité générale, et comme si le seul palliatif était d’ordre économique.

     

    Clément Lesage, libraire : - C’est vrai que ce dossier est très mal « cadré ». Que la littérature au sens que nous aimons foute le camp, c’est à la fois vrai et faux. Que la bonne littérature ne soit plus défendue dans les médias, c’est à la fois évident et relatif. Mais qui est à plaindre le plus : l’écrivain, le libraire indépendant, l’éditeur littéraire essayant de survivre ?  Quand Morgan Sportès se plaint de ne plus recevoir d’ « avances confortables » de son éditeur à la signature d’un contrat, il situe déjà le débat. Comme si l’« à-valoir » était un droit acquis !   

     

    Ma sœur Anne : - C’est qui çui-là, Morgan Sportès ?

     

    Moi l’autre : - Eh là, ma sœur Anne, tu n’as pas lu Tout tout de suite, le Prix interallié 2011 ? Et La dérive des continents ? Disons que c’est un emmerdeur talentueux un peu hors cadre. Un ancien ami de Guy Debord. Tu vois le genre ?

     

    Ma sœur Anne : - Debord j’adore ! Mais Sportés j’ignore !

     

    Clément Lesage : – Limite provocateur quand il reproche à son éditeur d’annoncer 150.000 exemplaire de son dernier livre aux médias alors qu’il plafonne à 60.000. Limite enfant gâté !  

     

    Moi l’un : - Et la littérature dans tout ça ? Elle survit ailleurs !

     

    JLK : - Tout juste Auguste. À vingt ans et des poussières, après un article bienveillant que j’avais consacré à son dernier livre, qui n’a pas dû atteindre les 600 exemplaires, Marcel Jouhandeau m’a écrit plusieurs lettres et recommandé de ne jamais vivre de ma plume : « Prenez un métier mon enfant, pour rester libre »…

     

    L’ancienne militante : - Il t’appelait « mon enfant », Jouhandeau ? 

     

    JLK : - Il avait 60 ans de plus que moi…

     

    Moi l’un : - Cette question des tirages fait fantasmer tout le monde…

     

    JLK : - Un jour que nous en parlions avec Jean d’Ormesson, le cher homme me cite Henri Michaux prétendant qu’un auteur se « compromet » à plus de 1000 exemplaires. Et Jean d’Ormesson de me lancer à juste titre : « Vous ne trouvez pas ça un peu snob ? ». Ceci dit, c'est à Michaux que je reviens tout le temps, pas à Jean d'O...

     

    Moi l’autre : - Ouais, tout ça revient à un changement complet de société…

     

    JLK : - C’est exactement ça. Il y a 40 ans, quand tu publiais un livre en Suisse romande, il y avait une vingtaine de critiques littéraires, souvent profs « à côté », qui te consacraient un papier, bon ou pas. Aujourd’hui...

     

    Moi l’un : - Tu vas te plaindre toi aussi ?

     

    JLK : - Que non pas : je me la coince. D’ailleurs j’estime qu’écrire et publier est une chance et un bonheur, et puis j'ai horreur des salons. Mais je lis ce matin, dans les carnets de Peter Sloterdijk, Les lignes et les jours, que son émission-philosophique à la télé allemande fait un tabac alors que la télé suisse romande reste toujours infoutue de se risquer à parler de livres et d’écrivains. Et je vais passer vite sur la dégringolade des rubriques littéraires dans nos journaux, comparées aux journaux alémaniques ou allemands.   

     

    La prof de lettres : - Il faudrait parler aussi  du peu de curiosité des enseignants pour la littérature…

     

    Moi l’un : - Tout se tient dans ce domaine de la transmission. Mais tout n’est pas perdu, je crois. Le même Sloterdijk dont parle JLK, dans un entretien paru dans le même numéro deMarianne, pose d’ailleurs cette question centrale de la transmission, non sans pessimisme.

     

    Moi l’autre : - Mais lui ne se contente pas de râler: il agit. Par ses livres. Par son travail de conférencier en Allemagne et partout. Quand il parle en public, Sloterdijk draine un public inimaginable en France ou en Suisse.

     

    L’ancienne militante : - Effet de mode, tu crois pas, genre "star de café philo" ? ?

     

    Moi l’autre : - Non :plutôt une tradition qui fait qu’en Suisse alémanique ou en Allemagne, la lecture publique est une pratique largement partagée.

     

    Moi l’un : - Qu’on voit pourtant resurgir, aussi, en Suisse romande et en France...

     

    Clément Lesage : - C’est vrai. Et puis il y a la Toile.

     

    Moi l’un : - Vous allez sur Internet, vous le « pur » littéraire ?

     

    Clément Lesage : - Et comment !

     

    Moi l’autre : - Mais vous n’êtes pas, quand même, sur Facebook ?

     

    Amina Mekahli : - Mais bien sûr que Clément est sur Facebook. C’est d’ailleurs un de mes amis ! On partage !

     

    Marianne, No 900. En couverture: Pourquoi l'Allemagne nous gonfle !
    Peter Sloterdijk. Les lignes et les jours. Maren Sell, 2014.