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Chemin faisant (58)

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Ma cabane au Canada . - De Lugano, dont la façade monégasque de place d'affaires me rebute de plus en plus, je m'impatientais de m'éloigner, et le nom de GANDRIA s'est alors imposé à mon attention, me rappelant la proche côte italienne qu'on longe en arrivant des Grisons, sa route calamiteuse et ses hôtels décatis campés tout au bord du lac, mais c'est avec un nouvel étonnement, tout de même, que j'ai passé, ce soir, du front de lac outrageusement luxueux de Castagnola et ses palaces aux obscurs petits bourgs italiens d'après la frontière, semblant réellement d'un autre monde, vingt ou quarante ans en arrière, mais immédiatement plus à mon goût,plus vivants et vibrants.

Hélas j'arrivais trop tard pour y trouver encore une chambre libre, mais j'avisai alors le nom quasiment effacé, sur un placard de bois vermoulu, de CAMPEGGIO SAN ROCCO, aussi me lançai-je dans la remontée improbable d'une pente à n'en plus finir serpentant entre murs de vignes et jardins suspendus, riant sous cape de pouvoir étrenner ainsi ma tente à arceaux et sardines d'opérette acquise pour l'occase, grimpant et grimpant encore à bientôt cinq cents mètres à l'aplomb du lac, n'y croyant plus au moment de déboucher sur un système de terrasses comme en trouve en Valais ou à Bali, toute dévolues au camping; et déjà le plus souriant jeune barbu m'accueillait et me proposait, plutôt qu'un carré d'herbe pour ma tente à arceaux, vu le mauvais temps qui s'annonçait: une caravane à 12 euros la nuit pourvue d'une véranda de bois à pampres de vigne et luminaires automatiques - bref le paradiso subito...   

 

Padre padrone. - Et déjà j'étais prié à souper: dès qu'installé, le jeune barbu, fils du propriétaire des lieux, m'avait proposé de partager le repas du soir avec les rares résidents de ce début d'automne, et voici que, d'autorité, son père proprio des lieux, Gian Carlo de son prénom, octogénaire fort en gueule et en gestes, me sommait de prendre place à ses côtés pour ne plus me lâcher de la soirée.

Quatre heures durant, ensuite, je me suis régalé d'humanité comme dans aucun cinq étoiles. De pappardelle maison, bien sûr, et de chasse de saison, arrosés de Nero d'Avola, mais surtout de parlerie fraternelle avec ce vieux conquérant de l'inutile me racontant son équipée d'ado de quatorze ans au Piz Badile, ses virées avec le jeune gang de varappeurs dont Walter Bonatti était le plus talentueux et le plus fou, sa jeunesse au temps du Duce (son irrésistible imitation des discours du Duce), ses transhumances de son Milan natal à ces hautes terres - et la Madre se taisait à ses côtés, le Figlio parlait à une autre table  avec deux belles, et deux Bâlois, attachés à ces lieux heureux depuis des lustres, nous avaient rejoints pour refaire le monde en langue alternée de Dante et de Goethe...

 

Balades14.jpgE la nave va... - Un jour me disais-je, en regagnant ma capite à tâtons, un peu titubant, aussi cuité que vanné mais heureux quelque part, un jour j'amènerai Lady L. en ce lieu, tout en pensant: ou peut-être que non. Peut-être que si, me disais-je, car elle partage ton goût de la simplicité et du bon naturel, mais comment ne pas se dire, aussi, que ce quelque part est partout ? Or je lui avais déjà dit ce soir-là, débarquant à San Rocco, à elle qui se trouvait pour lors aux Amériques parmi les siens: je lui avais dit par SMS que j'avais trouvé là le lieu des lieux. Mais va: je te connais, je nous connais, nous avons déjà notre cabane au Canada - e la nave va...         

 

 

 

 

Commentaires

  • ce quelque part partout ? comme vous y allez ! bien sûr, on en rêverait, reste la joie de l'explorateur lors de la découverte d'un îlot préservé

  • Belle variation sur l'autre et l'autre...part. Tout, dans cette évocation, est juste.

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