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  • Mon âme fille de joie

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    Pour Shmuel T. Meyer
     
     
    Mon âme, cette juive errante
    tombée en ce bas monde
    et projetée dans les tournantes,
    en tous sens égarée
    t’appelle, toi Méchant immonde
    qui a permis tout ça,
    en moi lové comme un serpent
    sans peur et sans remords
    juste assoiffé du sang des morts...
     
    Mon âme en son corps de dentelle
    est à jamais frivole
    et danse au jardin bagatelle
    ou rêve sur l’oreiller mol,
    comme une joue d’enfant
    jaloux du baiser de Maman...
     
    Mon âme monte tous les soirs,
    sans peur et sans remords,
    avec le soldat le plus noir
    des armées d’innocents
    que le vampire encule -
    chacun nimbé de pureté :
    les corps ont la légèreté
    de l’Être sans férule...
     
    Mon âme toute dépouillée
    ne se lasse jamais
    de vous adresser l’oraison
    de sa naïveté;
    son cantique de toute chair
    ne fait que vous louer,
    Seigneur saignant vos univers...
     
    Mon âme fière, jamais servile,
    toute joie et lumière...
     
    Peinture: Louis Soutter

  • To blog or no to blog

    A propos de Riverbend et de la blogosphère. 666e note de ce blog.
    D’aucuns se sont émus, ces derniers temps, du fait que le blog d’une jeune Irakienne fût nominé pour l’attribution d’un prestigieux prix littéraire anglais : le Samuel Johnson Prize de la BBC-Four, récompensant les ouvrages hors fiction et doté de plus de 40.000 euros, pour lequel 19 autres titres sont en lice, l’attribution étant fixée au 14 juin prochain. Etait-ce à dire que, désormais, les prix littéraires consacreraient n’importe quoi par conformité à l’esprit du temps ? Un blog aurait-il donc quoi que ce soit à voir avec un vrai livre ?
    Or justement, c’est un livre, tiré d’un blog, intitulé Bagdad brûle et racontant, de l’intérieur, trois ans d’occupation, de massacres et d’attentats, qui a été sélectionné en l’occurrence. Sous le pseudonyme de Riverbend, une jeune universitaire  de Bagdad a entrepris, dès le 17 août 2003, de décrire au quotidien ses craintes et ses colères dans l’Irak occupé. Ayant perdu son poste de programmatrice en informatique, du fait de l’impossibilité de se déplacer dans la ville en feu, la jeune femme s’est attelée à la rédaction de ce blog pour témoigner de ses tribulations au jour le jour. Or on notera qu’à la même époque Elisabeth Horem, épouse de l’ambassadeur de Suisse à Bagdad, entreprenait la même démarche, dont elle tira le journal intitulé Shrapnels, paru chez Bernard Campiche en 2005. Quelle différence entre les deux ?
    Dans un cas comme dans l’autre, l’écrit reste la base des deux démarches, dont l’une est propagée dans les grands espaces du web tandis que l’autre restera confinée dans les pages d’un livre. Mais  le blog remplace-t-il le livre ? Nullement, et la meilleure preuve en est que Bagdad brûle atteindra le grand public par les voies traditionnelles de l’édition.
    Cela étant, on relèvera deux atouts de ce nouveau moyen de communication que représente le blog, non négligeables et loin s’en faut. En premier lieu, c’est l’extension de la diffusion  du « message », qui fait que les notes de la jeune Irakienne peuvent être lues simultanément dans le monde entier. En outre, c’est le caractère interactif du blog, qui permet à quiconque de réagir dans l’instant aux écrits de la jeune femme, et à celle-ci d’être confortée, encouragée peut-être ?
    La littérature de demain va-t-elle se trouver modifiée par les blogs ? Ce n’est pas impossible, dans la mesure où l’instrument correspond à une nouvelle perception du monde, immédiate et globalisée. Mais comme il en va du téléphone ou de la télévision, c’est l’auberge espagnole : à message débile, réponse inepte ; à parole sensée, échange souvent gratifiant. Autant dire qu’on espère plutôt que les blogs soient modifiés par la littérature…

    C’est d’ailleurs ce qu’on voit déjà : si le papotage est exponentiel dans la blogosphère, les îlots de parole originale résistent étonnamment. Un véritable archipel créatif se développe, dont les atolls se relient les uns aux autres par mille liens et lignes. De grands écrivains, comme un John Updike, ont innové naguère en ouvrant leur site-atelier « en ligne », mais le blog permet aujourd’hui plus de légèreté et de souplesse dans  l’échange. Tout à l’heure cette chronique sera casée sur le blog du soussigné. Avant d’être publiée dans 24 heures, elle aura atteint l’Australie où la lira tel ami Jef, tandis que nous dormirons tous, et peut-être Rachid, l’exilé irakien francophone  à Sapporo, sera-t-il intéressé de constater qu’un plumitif suisse signale la chronique de Riverbend que les Anglais ex-coloniaux ont nominée ?  Le blog est une bouteille à la mer dont les messages disent (parfois) la ressemblance humaine...

    Cette chronique a paru dans l'édition de 24Heures du mardi 4 avril, en complémenet d'une page entière consacrée à la blogosphère.