Celui qui a gardé son Opinel / Celle qui ne lâche pas la main du Seigneur même quand elle nage sur le dos / Ceux qui continuent de lire Michaux dans le texte et même dans le sous-texte / Celui qui pratique l'écriture automatique avec conduite assistée dans les virages en épingles de chapeau / Celle qui reste attachée à la marque Le Rêve garantissant la chaleur d'un poêle à bois suisse donc sûr / Ceux qui voient l'avenir de la poésie en prose / Celui qui ne voit que le drapeau à brandir et point de blanche colombe sur le fauteuil crapaud / Celle qui aspire à l'hiver total dans son coffre-fort à capitons dorés / Ceux qui se la jouent colosses de Même Nom / Celui qui voit couler le temps comme une longue enfance / Celui qui trouve ce soir de soie beau comme l'espoir / Celle qui revient de la lune par l'escalier de service / Ceux qui regrettent de ne pas regretter le regret / Celui qui est sensible (j'veux dire ultrasensible) à l'évidence du mystère / Celle qu'illumine la seule idée de l'éclair au chocolat / Ceux qui dissertent sur la fuite de l'enfoui en gardant le moral / Celui qui enfant voyait Dieu comme une boule et parfaitement ronde et gare aux quilles / Celle qui tombe ou croit tomber et se relève grâce au Seigneur ou croit se relever et son ombre la suit / Ceux qui jubilent dans le fourmillement des atomes athlétiques / Celle qui se fait faire une mise en plis béton genre permanente de statue soviétique / Ceux qui dorment en chiens de fusil mitrailleur / Celui qui croit peindre des visages et ce sont des paysages / Celle qui croit voir des paysages et ce sont des visions / Ceux qui croient voir des bisons dans l'armoire aux visons, etc.
Peinture: Michael Sowa.
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Celles pour qui les mots se démarient / Celles qui peuvent tout dire et ne rien dire / Celles qui font des promenades pathétiques /Celles qui mettent la gomme pour fuir des destins anachroniques / Celles pour qui ce qui se conçoit bien s'énonce obscurément /Celles qui ont des airs de rien / Celles qui font une déclaration d'absence...