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  • Ex voto

    graces.jpg…C’est ça, tu te moques, faut dire que t’es tellement plus évolué  que nos aïeux, tu te moques de leur crédulité mais tu te vautres à genoux pour que Barcelone gagne, tu trouves leur petite épicerie sordide mais t’es sans arrêt à spéculer sur la Bourse ou au Tribolo, et finalement tu trouves  pas triste de n’avoir personne à remercier, même pas ta mère qui te fait tes lessives ?...

    Image : Philip Seelen 

  • Les Passions partagées


    Ce livre est un magnifique chemin de lectures et de rencontres. Je le mets en parallèle avec L’Ambassade du papillon, des carnets tenus entre 1993 et 1999, paru en 2000. Ici, il s’agit plutôt du journal d’un lecteur professionnel et passionné. Il couvre une période particulièrement intéressante de l’histoire de la littérature en Suisse romande, puisque les chroniques commencent en 1973, peu de temps après la création de L’Âge d’Homme, dont Jean-Louis Kuffer était alors un des auteurs et collaborateurs. Jean-Louis Kuffer évoque les grandes traductions des auteurs des pays de l’Est, comme ces Migrations de Milos Tsernianski, qui ont opéré un tel choc. Il parle aussi de ses voyages, de ses rencontres avec des auteurs. J’ai beaucoup apprécié les portraits: Pierre Jean Jouve, Gustave Roud. Il y a des anecdotes amusantes sur Michel Tournier. Bref, c’est un ouvrage généreux qui communique une soif de lectures et donne des envies. Et l’hommage à la mère décédée, placé en fin de volume, est très beau et émouvant, avec cette citation de Tsernianski en exergue: «Les migrations existent. La mort n’existe pas!». SYLVIANE FRIEDRICH, Le Temps

    Le chant du monde
    Incontestablement, c’est l’événement littéraire de ce début d’année riche, pourtant, en parutions intéressantes. Par sa taille, d’abord, qui en impose d’emblée. Mais aussi par son propos, ample et intime, par son ton généreux, par son ambition, enfin, d’interroger la littérature dans ce qu’elle a d’irréductible et de secret, ambition parfaitement maîtrisée. Avec Les Passions partagées, Jean-Louis Kuffer confirme – si besoin en était – qu’il est l’un des lecteurs les plus attentifs et les plus perspicaces de ce pays. À lire toute affaire cessante.
    Certains seront tout d’abord effrayés par ce livre fleuve (près de 440 pages) qui tient à la fois du roman de formation, du journal intime, des carnets où chacun consigne ses réflexions, et du traité de littérature. Ils auraient tort, pourtant, de ne pas se laisser entraîner par une écriture à la fois limpide et fluviale, qui plus d’une fois retrouve les grâces du chant, et évite constamment les préciosités stylistiques, comme les facilités de tout genre.
    Qu’on ne s’y trompe pas pourtant: Les Passions partagées se lisent comme un récit épique et passionnant dans lequel l’auteur à la fois nous guide à travers les méandres de ses pérégrinations, et se cherche lui-même en découvrant le monde. Car Jean-Louis Kuffer réussit le prodige, dans ce livre fleuve qui est une somme de vie, de dire à la fois le monde et le miracle de son expression. Dès les premières pages – magnifique éloge de la lecture qu’il faudrait donner à lire à tous les collégiens ou gymnasiens de ce pays – le monde s’offre comme une découverte et une jubilation, une énigme et une interrogation. Mais comment dire ce monde en perpétuels mouvement et mutation? Comment percer son mystère? Kuffer pose d’emblée la question et y répond aussitôt: en retrouvant, par la magie de l’écriture, cet état chantant où le monde se donne à dire (et à voir) dans sa transparence originelle. C’est à propos de Georges Haldas que Kuffer définit ainsi son travail : «L’écriture, donc la vie: l’écriture sous ses deux aspects diurne et nocturne, qui transcende la durée en cristallisant dans l’instant (poésie) ou en reproduisant, au fil des courants subconscients, le cheminement de la mémoire dans le temps (chronique).» JEAN-MICHEL OLIVIER, Scènes Magazine



    JEAN-LOUIS KUFFER. Les passions partagées 
    Lectures du monde (1973-1992)

    Editions Bernard Campiche, 2004. 440 pages. Prix: CHF 42.-; € 24.


    Ce livre est disponible chez l'auteur, au prix cassé de 20.-

  • Ceux qui sont organisés

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    Celui qui impose son Programme Santé Bio à ses tantes grabataires lectrices de romans russes / Celle qui a un cybercoach spirituel / Ceux qui planifient leur procrastination / Celui qui prend son temps par tranches horaires classées sur son ordi de poche / Celle qui travaille ses abdos en écoutant La Recherche du temps perdu lue par Michael Lonsdale / Ceux qui attendent beaucoup du retour sur investissement d’une lecture pragmatique de La Bible / Celui qui ne trouvera jamais rien faute de perdre jamais son temps / Celle qui ne demande pas à son oncle savetier ce qu’il pense des financiers dont elle-même ne comprend point toutes les menées même en lisant attentivement les éditos de The Economist chez sa pédicure Paloma dont elle dit et répète que c’est « une belle personne » / Ceux qui savent où ils vont sachant ce qu’ils savent que nous aussi savons donc on est bien d’accord / Celui qui sait ce qu’il va faire de sa matinée de pré-retraité de 27 ans fort soucieux de la propreté de sa Toyota Cressida et de ce qui s’ensuit / Celle qui tient un compte précis des allées et venues du nouveau locataire de la maison d’en face roulant Honda CRV 4x4 alors qu’il est café au lait et même pas cadre à ce qu’elle sache/ Ceux qui ne sont en somme que demi-racistes vu qu’ils tolèrent les métis / Celui qui range ses voitures par ordre de grandeur et ses cravates selon leur couleur / Celle qui rend compte de tout ce qu’elle fait dans son Cher Journal qui l’accompagne depuis cinq décennies et dont elle fera répandre les cendres avec les siennes dans la mer qu’elle appelle la Grande Mémoire à l’instar de certains surréalistes belges hélas oubliés même dans les cantons de l’Est / Ceux qui reprochent au Révérend Sigismond de saper le moral des jeunes en affirmant tous les dimanches qu’on n’est pas là pour s’amuser alors qu’ils dorment encore après leurs teufs / Celui qui a préservé un Espace Dieu dans son loft qui mériterait d’être aéré le dimanche / Celle qui ne consacre que les dimanches à ses promenades dominicales sinon tu oublies / Ceux qui se sont mariés au motif que leurs choix de placements coïncidaient avec le bonus de naissances également programmées dans le même timing / Celui qui assortit ses poèmes aux vers très très libres à une stricte surveillance de copyright / Celle qui suit la ligne inexorablement ascendante de son plan de carrière au sommet de laquelle l’attend un fauteuil pivotant avec vue sur les calvities / Ceux qui pour rompre la monotonie de ce matin morose passent leur chien Peter à l’encaustique avant de faire le tour du square avec leur canapé en laisse trop bien élevé pour aboyer quand il avise un couple adultère, etc.

     

  • Ceux qui l'avaient bien dit

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    Aux victimes des violents qui ne l’emporteront pas…

    Celui qui en appelle illico à l’Armement de la France Pure et Dure dans le droit fil de l’Axe du Bien fauteur de chaos / Celle qui se dit du côté des victimes avec l’Iran pacifiste et le Hezbollah sympa / Ceux qui n’y comprenant rien concluent au vendredi 13 / Celui qui recommande la surveillance accrue des minarets suisses possiblement ceinturés d’explosifs / Celle qui prône une nouvelle Inquisition visant en priorité les banlieues pauvres de ceux qui ne foutent rien et donc ont le temps de s’armer sous l'effet d'un ressentiment suspect / Ceux qui semant le chaos se frottent les mains dans leurs tours sécurisées du Qatar et d’Arabie saoudite / Celui qui parle de drones humanoïdes pilotés par le Mossad / Celle qui a perdu deux enfants au Bataclan et prie qu’on lui foute la paix / Ceux qui sur Facebook se félicitent d’être restés devant leur écran / Celui qui sur le site d’extrême-droite Boulevard Voltaire dit clairement ce qu’il faut faire contre ceux qui ont sévi Boulevard Voltaire/ Celle qui en conclut que c’est le moment de construire un mur autour du canton de Vaud après épuration de qui vous savez / Ceux qui accusent Bernard-Henri Lévy d’avoir prétendu que Daech n’était pas casher  / Celle qui prédit de monstrueux défilés oÙ tous se diront BATACLAN y compris Netanyahou et consorts / Ceux qui ne voient là que le contrecoup de l’arrogance interventionniste de la France gendarmette néo-colonialiste / Celui qui exige une meilleure surveillance des boîtes de jeunes fauteuses de désordre / Celle qui ne sortira plus de son hôtel particulier de Neuilly dont elle a congédié le jardinier sunnite / Ceux qui vont enfin pouvoir se lâcher sur Twitter / Celui qui en tant que psychologue-conseil décrypte le message des kamikazes en fin de droit / Celle qui reproche au Président Hollande d’avoir cherché noise à ceux qu’y fallait pas / Ceux qui rejoignent Alain Soral sur les rangs de celles qui l’avaient bien dit à l’instar de Renaud Camus prophétisant le Grand Remplacement / Celui qui estime qu’Allah n’est pas un Dieu donné / Celle qui rappelle que les Légions du Christ ont fait aussi pas mal de dégâts urbains mais c’était dans un pays de sauvages il est vrai /Ceux qui se disent solidaires sans se rappeler ce matin de qui ni de quoi / Celui qui n’y voit qu’une mauvaise parodie du théâtre de l’Absurde / Celle qui se demande si, plus que la troisième guerre mondiale dont on nous rebbat les oreilles depuis 20 ans, ce n’est pas la quatrième qui a éclaté hier soir / Ceux qui n’ont jamais eu l’occasion de dire qu’ils étaient TIAN ANMEN ou GROZNY ou GAZA ou FUKUSHIMA vu qu’ils n’y étaient pas / Celui qui avec Madonna s’exclame « nous sommes tous des migrants au sang de la même couleur » et avec  Justin Bieber « je compatis avec U2 qui a annulé son concert  de ce soir» / Celle qui se retrouve ce matin au parc Monceau dont elle se tient à l’écart des bosquets peut-être minés / Ceux qui prennent un ton solennel et pour ainsi dire historique à l’instant (c’est maintenant) de dire qu’ils sont aussi concernés, etc.

    Peinture: Robert Indermaur.

  • Ceux qu'on laisse tomber

     

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    Celui qui a rêvé qu’il tombait de l’étalon noir Prince of Wales et se réveille en si bonne forme qu’il saute sur sa fiancée Cindy au joli poney roux/ Celle qui se voit abandonnée de tous sauf de son bichon maltais Mouton qu’elle appelle Bouton quand elle a le rhume / Ceux qu’on a oubliés en route et se sont retrouvés dans les campagnes rases entourant les établissements médico-sociaux assez moroses à l'époque / Celui qui s’est exclu du groupe faute de se laver les pieds plus souvent / Celle qui a vexé tout le monde en persiflant également les couples modèles ou séparés / Ceux qui sont restés liés sur Facebook en fonction du réseau / Celui qui n’a pas su entretenir ses relations sociales au moyen des formules idoines et autres pokes de fin d’année / Celle qui a toujours feint de se trouver bien disposée envers autrui mais sans réelle sincérité ce qui s’est su et l’on sait qu’au su de ça autrui est souvent déçu / Ceux que nous avons laissé tomber dans l’escalier roulant qui nous les a ramenés finalement / Celui qui ne fait plus signe pour se faire remarquer / Celle qui préfère aller seule à selle ou déchaussée dans sa baignoire sabot / Ceux qui offrent deux places pour Le Lac des cygnes à leurs voisins en ménage à trois / Celui qui ne t’a plus écrit depuis qu’il est mort sans que tu le saches aussi lui en veux-tu quand même sans qu’il s’en doute / Celle qui ne te fait plus signe au motif qu’elle se figure que tu l’as oubliée en quoi elle a tort puisque tu t’en souviens à l’instant / Ceux qui reculent pour mieux se sauter dans les bras /Celui qui à son dernier repas invitera ses 3857 amis Facebook qui se partageront équitablement le frugal goûter vegan / Celle qui se rappelle au bon souvenir de ses chers disparus au moyen de bâtons d’encens allumés devant leurs portraits sépia d’un charme suranné mais indéniable en ces après-midi d’automne où quelque brume d’automne enveloppe les noisetiers et autres essences communes ou plus rares propres à ces contrées / Ceux qui ont toujours pensé qu’il y avait quelque chose de l’autre côté et s’en émerveillent en effet dans leurs urnes aussitôt alignées sur les éternel buffets / Celui qui s’est senti abandonné par Marie-Paule partie sans crier gare / Celle qui a fait la morte pour en voir l’effet sur Victor qui n’y a pas survécu / Ceux qui se croient abandonnés de Dieu sans se douter de ce qui les attend, etc.

    Peinture: Robert Indermaur