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Chemin faisant (64)

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La surprise du Chef. - C'était un samedi soir, mon Admirable Compagne (formule lénifiante des gendelettres dont je n'use qu'avec ironie) nous avait réservé par la Toile une chambre à l'hôtel Le Bosquet aux Ponts de Cé, tout près d'Angers, où nous nous pointâmes à cinq heures du soir pour tomber sur une porte close. Point de lumière ni trace de la moindre présence. Mauvais signe. Mais une pancarte annonçait: "La réception s'ouvre à 18h". Et au téléphone une voix se voulant rassurante: "Pierre arrive ! Nous finissons les courses..." 

Chemins95.jpgUn hôtel, bien noté pour sa table, qui "fait ses courses" un samedi soir à 17heures, voilà qui eût pu nous inquiéter, voire nous impatienter après une journée plus que remplie de belles découvertes, du marché matinal de Blois à la descente de la Loire via Chenonceau et La Devinière de Rabelais, les coteaux d'Anjou, Montsoreau et les tapeurs de pommes des caves creusées dans le tuf du même beau blanc crémeux que les petits bourgs se succédant  - nous aurions pu faire aussi grise mine qu'aux quelques ondées du jour,  mais non: Pierre arrivait bel et bien sur sa pétarelle, suivi bientôt d'autres jeunes gens affables au possible, puis du chef Régis LeGain, et deux heures plus tard tout un monde de dîneurs débonnaires se régalaient de concert - et ce soir tel vin d'Anjou nous parut le plus pur nectar...

En quête de Qualité. - À vrai dire nous sommes assez peu "gastro", ma bonne amie et moi: guère portés sur les cumuls de toques ou d'étoiles, mais les bonnes choses de la table nous semblent participer de l'âme d'un pays autant que ses belles personnes ou que toute forme d'art ou d'artisanat exprimant son fonds de Qualité comme un savoir-être par savoir-faire.

Chemins177.jpgEt quelle plus belle et bonne manifestation, alors, de cette Qualité, que la Tapisserie de l'Apocalypse de Jean de Bruges et de cent mains tisserandes anonymes, exposée au formidable Château d'Angers, et déployant son extraordinaire bande dessinée où tous les effrois et les douleurs d'un siècle de guerre et de peste, de famine et de massacres, se mêlent aux appels à l'espérance et au recours à la grâce ?

L'accueil d'un hôtelier à La Noiselée, l'art d'un jeune chef décidé à redorer le blason d'un établissement sur le déclin, la lumière éperdue d'un sourire de reconnaissance sur le visage d'un mendiant le dimanche matin, et cette tenture arrachée à l'oubli des siècles et nous montrant le pire et le meilleur de l'homme - voici ce que nous cherchons, en somme, qui participe peu ou prou de la Qualité.

002.jpgHiéroglyphe. - Or nous nous sommes retrouvés, ce soir, dans un décor à la Simenon, le long d'une digue de Noirmoutier, entre pacages à fleur d'eau  et hauts fonds découverts par la marée basse où s'alignaient bateaux vivants et morts.

Dans la lumière orange voilée de bruine, le clocher de Saint Philbert m'a évoqué un instant celui de Combray, quelque part dans notre mémoire à tous; enfin sur le fond gris de l'eau et du ciel, juste là, le temps d'une immobile station, rien qu'un instant: ce trait d'encre plus foncé, ce pur hiéroglyphe d'un héros cendré.

Commentaires

  • Beaucoup de charme dans ce billet...

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